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Koltès à la Colline : quand les chiens ne rencontrent jamais leur nègre

Lundi 7 juin 2010

Jusqu’au 25 juin, le Théâtre National de la Colline a invité le metteur en scène Michael Thalheimer (qui avait déjà proposé “Les Rats” au début de l’année à la Colline) à mettre en scène une version européenne de “Combat de nègre et de chiens”. Respectant le vœu de Koltès de ne pas faire du texte une pièce sur l’Afrique, Thalheimer montre la peur de l’autre dans sa nudité la plus violente. Un spectacle éblouissant, porté par une scénographie majestueuse et des comédiens époustouflants.

Dans un pays d’Afrique de l’Ouest, un chantier est en train de fermer. Il ne reste plus que son chef, Horn, et le jeune ingénieur Cal. Mais deux autres personnages se glissent dans l’enclos du camp : le “boubou” Alboury venu réclamer le corps de son frère mort écrasé sur le chantier et la blanche et naïve Leone venue rejoindre Horn qui l’a invitée de Paris à assister au feu d’artifice annuel qu’il organise sur le chantier. Enfermés dans la peur des noirs cachés derrière les arbres sur le chantier déserté, les trois personnages blancs n’arrivent pas à dialoguer : ni entre eux, ni avec Alboury. La peur enfante la violence dans une ascension terrifiante, ponctuée par la moiteur des corps qui les lâchent.

Il y a d’abord la fantastique scénographie de Olaf Altman, avec lequel le metteur en scène Michael Thalheimer travaille depuis les années 1990. Le chantier est une plateforme déserte et totalement ouverte; et pourtant, elle enferme plus sûrement chaque comédien que toutes les cavités des prisons. A peine aidé de quelques accessoires, comme des bouteilles de whisky ou des casques de chantier, celui-ci n’a “affaire à rien d’autre qu’à l’auteur, à lui-même et à ses partenaires. Il ne dispose d’aucun accessoire, d’aucun intérieur, d’aucun meuble auxquels il pourrait s’accrocher”. Dans cette esthétique radicale ce sont les corps mêmes qui se font instruments : ceux de l’ombre du chœur noir inspirent la peur, qui se transmet petit à petit aux trois blancs aux prises avec leurs fantasmes sur un autre qu’ils ne rencontrent jamais vraiment. La mise en scène pousse les comédiens à incarner directement chacun de leurs sentiments. C’est littéralement que la naïve Leone se fait Ruth locale pour épouser l’identité noire : elle s’enduit de cirage. C’est de manière toute aussi directe que Cal exprime son désir (en se masturbant sur scène) où son caractère damné de “salaud” (en plongeant dans la merde). De même, le mépris d’Alboury s’exprime en crachats physiques, que les trois blancs copient souvent par automatisme. Si le radicalisme de Michael Thalheimer souligne la fin de toute utopie et de toute illusion, elle se situe aux antipodes du cynisme. C’est d’abord et avant tout pour respecter le vœu de Koltès de lire “Combat de nègre et de chiens” comme une métaphore sur le non-dialogues d’individus blancs que l’ancien directeur artistique du Deutsches Theater de Berlin (2005-2009) a décidé de se passer de toute médiation. Voyant son rôle comme celui d’un “condensateur”, il ne change pas le texte par sa mise en scène, il ne l’illustre pas non plus benoîtement, mais en livre l’essence dans un don violent et fascinant. Ce jaillissement n’est pas sans racine.  Car c’est également pour convoquer un passé européen, de racisme, de colonialisme et de sacrifices, que Thalheimer fait ainsi parler sans médiation les corps de ses comédiens. Ne sachant quel dialecte employer avec Alboury, Leone lui parle … Allemand ! et entonne le “Roi des Aulnes” de Goethe et Schubert, raccrochant ainsi cette production de la pièce de Koltès à toute une tradition européenne de fous faucheurs d’innocents : le cœur des ténèbres de Conrad, l’Amok de Zweig, mais aussi le roman de Michel Tournier (ce dernier ne se passe pas en Afrique.) Les quatre comédiens principaux de la pièce se prêtent au jeu sans masque de leur metteur en scène. En humaniste vieillissant, Charlie Nelson estompe peu à peu le caractère bonhomme de son personnage. Cécile Coustillac parvient à rendre Léone parfaitement naïve, sans aucune hystérie et pourtant de manière très angoissante. Jean-Baptiste Anoumon joue un Alboury fier, inflexible et néanmoins aussi raciste que les personnages colonisateurs de la pièce. Enfin, pièce rapportée d’Allemagne à ce casting français, Stefan Konarske étonne et séduit beaucoup dans le rôle de l’ingénieur sur-diplômé, apeuré, raciste, hystérique, et cherchant un point d’autorité où se soumettre pour arrêter de penser. Le public français est ravi de découvrir ce phénomène qu’est Konarske, avec son accent allemand, son débit de mitraillette, et son corps menu et musclé qui exprime autant les contradictions de son personnage que son visage.

La pièce créée par Chereau en 1983 aux Amandiers se trouve régénérée par ce souffle allemand, européen et intransigeant, que Thalheimer et sa troupe lui infusent. Un spectacle splendide, effrayant et galvanisant, probablement un des meilleurs à l’affiche en ce moment dans la capitale.

Combat de nègre et de chiens“, de Bernard-Marie Koltès, mise en scène : Michael Thalheimer, scénographie : Olaf Altman, avec Jean-Baptiste Anoumon, Cécile Coustillac, Stefan Konarske et Charlie Nelson, Théâtre National de la Colline, Grand Théâtre, durée du spectacle 2h15, jusqu’au 25 juin 2010, mer-sam 20h30, mar 19h30 et dim15h30, 15, rue Malte-Brun, Paris 20e, m° Gambetta, 27 euros (abonné : 13 euros, moins de 30 ans : 13 euros, moins de 30 ans abonné : 8 euros). Réservation : 01 44 62 52 52 ou ici.

Photos : Elisabeth Carecchio.

L’Affaire Dominici plaide pour un théâtre interactif

Mardi 18 mai 2010

Vu avec ma chère Grand-mère Yvette et suivi d’un dîner mémorable au petit Marius. Suivi également du film avec Gabin, qui est un monument (Gabin, pas le film). La présentation de la pièce par le vieux Robert Hossein était très touchante.

Après l’affaire Seznec, Robert Hossein avance de trente ans dans sa mise en scène des grands procès et s’attaque au cas de la famille Dominici. Mettant en scène l’intégralité de l’affaire (qui a traîné pendant plus de deux ans) au coeur du tribunal jugeant le patriarche Gaston Dominici, Hossein demande à l’issue de la représentation au public de voter. Et il sait tenir la barre de l’objectivité sans jamais glacer par l’énumération des faits. Un réalisme qui inspire le respect.

Dans la nuit du 4 au 5 août 1952, une famille de trois anglais – une homme, sa femme et leur très jeune fille- est sauvagement assassinée dans les Alpes de Haute-Provence. la commune s’appelle Lurs et le meurtre a lieu près du domaine de “GrandeTerre”, qui appartient à une famille de fermiers : les Dominici. L’arme du crime est une carabine datant de la résistance et l’enquête dure plus de deux ans avant que le patriarche Gaston Dominici, 75 ans, soit accusé du triple meurtre. La cour n’a pas de preuve mais seulement les aveux assez improbables du vieil homme très digne, obtenus après une longue nuit de torture psychologique. Gaston Dominici a-t-il vraiment commis le meurtre où s’est-il sacrifié pour l’un de ses fils et afin que la “Grande terre” perdure? Robert Hossein fait rejouer ce procès qui s’est conclu par la condamnation à mort du vieux fermier après douze jours d’audiences (sa peine a été commuée en emprisonnement à vie par le président Coty en 1957, et Dominici a été gracié par le général de Gaulle en 1960).

C’est Robert Hossein qui a lui-même accueilli son public, le remerciant d’être fidèle au rendez-vous et partageant avec lui sa passion pour les enjeux révélés par l’Affaire Dominici. Sa mise en scène de l’affaire Dominici se veut avant tout réaliste. Puisque des jetons sont remis aux spectateurs qui sont censés voter à l’issue du spectacle, Robert Hossein a voulu reproduire exactement les heures du procès. Le décor est sobre: une cour de justice de province. Et souvent statique, avec d’un côté des juges et le procureur et de l’autre l’avocat et son client. Au centre et en hauteur un narrateur rappelle les détails d’une enquête fort mal menée et rendue plus difficile encore par le silence de plomb et les mensonges partagés du clan Dominici. En dessous du narrateur, un fonctionnaire dit quand et comment les témoins peuvent prendre la parole et se retirer. Très loin de la mission de justice que s’était donné le film de Claude Bernard-Aubert, qui voulait réhabiliter le patriarche (joué par Jean Gabin, irremplaçable, même par Michel Serrault), la mise en scène de l’affaire Dominici au Théâtre de Paris ne prend pas parti. En reprenant mot pour mot ce qui s’est dit pendant le procès, elle donne ainsi à voir deux visages de la France qui s’entrechoquent : le monde paysan finissant des années 1950, où le patriarche règne en maître contre une cour assez troublée par cette discipline de clan et qui ne parvient pas toujours à faire entendre son jargon à la femme, aux neuf enfants, à la bru et au petit- fils de Gaston Dominici. Dans le rôle de l’inculpé, Pierre Santini est d’une sincérité et d’une dignité qui ne pâlissent pas si on les compare à la performance de Gabin. En bru têtue et intelligente, Geraldine Masquelier impressionne, tandis-qu’en femme bourrue, mais amoureuse après de longues années de compagnonage, Jenny Bellay est excellente. Au-delà du fait divers l’affaire Dominici concentre la France des années 1950 dans une seule pièce, et l’on en sort plein de mots surranés dans la tête et bourdonnant de questions sur le fonctionnement de la Justice d’hier et d’aujourd’hui.

“L’Affaire Dominici”, mise en scène Robert Hossein, avec Pierre Santini, Pierre Dourlens, Yannick Debain, Gérard Boucaron, Serge Maillat, Jean-Paul Solal, Frédéric Anscombre, Jenny Bellay, Henri Deus, Luc Florian, Dominique Gould, Pierre Hossein, Vincent Labie, Géraldin Masquelier, Danik Patisson, Jean Antolinos, Maurice Patou, Dominique Roncero, Théâtre de Paris, mar-sam 20h30, sam 16h30, dim 15h30, 15, rue Blanche, Paris 9e, m° Trinité, 29-49 euros, réservations ici.

photo Eric Robert

La Seconde Guerre de Léon Werth rescussitée à l’Epée de bois

Mercredi 14 avril 2010

Au théâtre de l’Epéé de bois, Valérie Antonijevich met en scène des extraits du Journal de guerre de l’écrivain Léon Werth. Le titre de cette pièce qui nous plonge au coeur du quotidien de Français ordinaires pendant les années noires reprend un des codes de Radio Londres pour annoncer le débarquement de Normandie : “Mon Coeur carresse un espoir”. Une épopée réaliste et surranée.

Léon Werth est un auteur typique de la Troisième République : Khâgne, laïcisme, tranchées, et engagement d’intellectuel. C’est aussi un auteur un peu oublié et remis au goût du jour par les éditions Viviane Hamy. Valérie Antonijevich est allée puiser dans son Journal de guerre pour inventer un équivalent théâtral au “Chagrin et la Pitié” de Marcel Ophuls. Alternant récits extraits du texte de Werth en voix off, affichage de discours officiels de l’époque, et scènes de la vie quotidienne sous l’occupation, “Mon Coeur carresse un espoir” plonge le spectateur dans les débats politiques qui ont pu remuer les familles ou les villages de France de 1940 à 1944. Et l’on se re-pose avec des personnages fort simples des questions auxquelles nous avons désormais toutes les réponses : La France n’a-t-elle pas mérité sa défaite, à force de se laisser aller depuis la victoire de la Première Guerre? Pétain est-il vraiment pro-allemand ou tandis que le héros de Verdun “fait semblant” pour gagner du temps, la collaboration est-elle à mettre entièrement sur le compte de Laval? Le STO, un acte de nécessité, de lâcheté, ou patriote pour libérer des prisonniers? Les soldats allemands, si polis et bien mis, sont-ils vraiment des ennemis? Comment passer la ligne qui mène de la zone occupée à la zone libre? Puis : Mérite-t-on l’exécution pour avoir saisi l’opportunité de commercer urbainement avec l’occupant?

Si le texte de hussard de Léon Werth s’évère très decevant, d’une neutralité qui confine à la grisaille, et paraissant a posteriori carrément pontifiant sur les clichés des français collaborant gentillement, la mise en scène de Valérie Antonijevich est une belle réussite.  Cette dernière sait mettre ses comédiens en scène autour d’une simple table, puisque, même devant un ersatz de café ou leur dernière bouteille de vin, les Français discutent politique devant des victuailles. Elle a aussi l’idée géniale de déplacer la table sur l’immense scène de l’Epée de bois, parvenant ainsi à meubler avec 6 comédiens, quelques habits et deux rangs de vêtements, un espace où le spectacle pourrait se perdre. Endossant les rôles de Français moyens qui se succèdent sans jamais rien dire de très original ou de très touchant, Yves Buchin, Jean-Marie Garcia, Frédéric Jeannot, Toma Roche et Nadja Warasteh donnent leur maximum pendant plus de deux heures pour offrir une voix émue à ces personnages. Un voyage dans l’histoire dans ses heures les moins glorieuses.

Mon Coeur carresse un espoir“, d’après un texte de Léon Werth, mise en scène Valérie Antonijevich, chorégraphies Yano Iatridès, avec Yves Buchin, Jean-Marie Garcia, Frédéric Jeannot, Toma Roche, Nadja Warasteh, et Aristide Legrand (voix de Verth), jusqu’aun 25 avril à l’Epée de bois, Route du Champ de Manoeuvre, Cartoucherie du Bois de Vincennes, mar-sam 21h, dim 16h, sam 17 et 24 avril 16h, Paris 12e, m° Porte de Vincennes PUIS Bus 112, durée du spectacle : 1h10, 18 euros (TR : 13 euros).Réservation au : 01 48 08 39 74.

© Joey

Opéra : Dans la colonie pénitentiaire de Philip Glass à l’Athénée

Jeudi 8 avril 2010

Après “The Rake’s progress” d’Igor Stravinsky en novembre dernier, le théâtre de l’Athénée propose un autre opéra au livret littéraire : “Dans la colonie pénitentiaire” est une nouvelle de Franz Kafka, mise en musique par le grand Philip Glass et interprété par leQuintette à cordes de l’Opéra national de Lyon. Le résultat est un vrai spectacle total, d’une grande qualité musicale, avec danse, jeu, et une mise en scène convaincante signée Richard Brunel.

Réfléchir sur discipline est à la mode. Hier soir la machine de torture de la colonie pénitentiaire  imaginée par Franz Kafka en 1914 s’est déplacée du musée d’Orsay où elle trône dans l’exposition “Crime et Châtiment”, pour se mettre en mouvement au son des vents polyphoniques de Philip Glass. Et Robert Badinter, à l’origine de l’exposition à Orsay était dans la salle du théâtre Louis Jouvet pour assister à  la première de cette métamorphose. Gommant le fantatsique de l’inquiétante et étrange nouvelle de Kafka pour en donner une lecture proprement politique Glass, Brunel et le librettiste Rudolph Wurlitzer ont mis l’accent sur la neutralité coupable du visiteur de la colonie pénitentiaire. Respectant le tragique “en temps réel” de la nouvelle, l’opéra de chambre recentre la tension sur la cauchemardesque machine de punition inscrivant à la herse et dans le dos de condamnés qui ne savent pas qu’ils ont été jugés ni pourquoi le motif de leur punition. Faisant le lien entre le système de surveillance (les fameuses “sangles” qui tiennent les membres des suppliciés pendant les heures) et le système de biopouvoir totalisant (qui a prise directement sur les corps), cette machine donne à l’injustice l’idéologie (selon Hannah Arendt étymologiquement : la logique d’une idée) qui convient pour que tous l’acceptent même si plus personne ne festoie au spectacle de la machine en marche, comme cela a pu être le cas dans des temps barbares et passés.

En marche la machine de l’opéra l’est tout au long des 16 tableaux composés par Glass: l’orchestre d’instruments à vents se déplace et la machine se construit peu à peu dans une tension presque intenable et envahit toute la scène. Des lambeaux de peau viennent à peine s’interposer entre la torture et le spectateur pour mieux le laisser imaginer la cruauté. Et pourtant, que la cruauté est belle dans ce mouvement inexorable! la musique tonale de Glass, les scènes de danse entre les victimes et les bourreaux, les tours et détours mesurés de la machine, l’anglais si propre des colonisateurs et du visiteur et même le sang final se répandant en volutes viennent envoûter et fasciner le spectateur. Seuls quelques cris et des bruits de radio viennent le déloger de cette douce torpeur au cœur des ténèbres. Les deux voix d’hommes qui se répondent, celle chaude et grave de l’officier et son souci de préservation de la “tradition” (Stephen Owen) et celle plus haute et étonnée du visiteur immaculé qui prend calmement ses notes (Michael Smallwood) participent de cette inquiétante étrangeté du beau là où l’on attend le bruit et la fureur.

On ne peut que saluer bien bas toute l’équipe de cette colonie pénitentiaire pour la qualité exceptionnelle du spectacle, et la gêne qu’elle parvient à créer. Une gêne qui pousse celui qui ne peut pas fuir à longuement réfléchir.

“Dans la Colonie pénitentiaire”, de Philip Glass, livret de Rudolph Wurlitzer d’après la nouvelle de Franz Kafka, mise en scène Richard Brunel, direction du Quintette à cordes de l’Opéra national de Lyon : Philippe Forget, scénographie Anouk Dell’Aiera, avec Stephen Owen, Michael Smallwood, Nicolas Henault, Mathieu Morin-Lebot, Gérald Robert-Tissot, jusqu’au 17 avril, mercredi, jeudi, samedi, 20h, mardi 13 avril, 19h, dimanche 11 avril, 16h, Théâtre de l’Athénée-Louis Jouvet, 7 rue Boudreau, Paris 9e, m° Opéra, 40 € à 18 € (TR dont moins de 30 ans, 31 € à 14 € e le jour même, de 20 € à 9 €).

Crédit photo : Jean-Louis Fernandez.

Ô Carmen au Théâtre du Rond Point, un opéra comique de génie

Mercredi 17 mars 2010

Toutes les voix de l'”Opéra clownesque” qui se donne jusqu’au 3 avril au Théâtre du Rond-Point sont interprétées par le géniam Olivier Martin-Salvan. Accompagné au piano par Aurélien Richard. Tout y est : jeu de mime, de clown, qualité musicale, l’opéra, les coulisses de l’opéra, et le rêve de recréer à deux sur scène le plus célébre opéra du répertoire français. Ah on allait oublier l’ingrédient principal : le public par 1h20 à hurler de rire. A voir absolument quitte à partir du bureau pour être au Rond-Point à 18h30.

Olivier Martin-Salvan, Anne Reulet-Simon et Nicolas Vial ont décidé de plonger en apnée dans les rouages d’un opéra donné dans une ville Française dont on n’arrivera jamais à entendre le nom. Et cet opéra, c’est pas n’importe lequel, puisqu’il s’agit DU Carmen de Bizet. En suivant le long chemin de croix de la doublure de Don José, “Ô Carmen” rend compte des efforts et des travers (sur scène et à la maison) de toutes l’équipe qui monte ce Carmen original. Les solistes bien sûr, mais aussi le chef d’orchestre qui marmonne en anglais, le metteur en scène hispanique qui a la brillante idée de transposer carmen dans une fête foraine (du coup l’usine de cigarre se transfore en usine de barbe à papa, c’est plus politiquement correct sauf quand il faut remplacer les cigarières du livret de livret de Meilhac et Halévy par des “barbapapères), la secrétaire de l’opéra, le costumier qui parle en franglais sous sa frange, et bien sûr les réactions des critiques à l’émission de Evi Ruggiera après la générale. Finalement, il ne manque que le public, mais celui-ci semble trop occupé à se tordre de rire.

Réalisant sans chiqué mais en grands professionnels le fantasme de jouer tout Carmen en 1h20 à un piano et une voix, Olivier Martin-Salvan et Aurélien Richard tranforment l’opéra de Bizet en grande comédie humaine. Pour ceux et celles qui n’ont pas encore vu le phénomène Martin-Salvan sur scène, soit dans l’Acte inconnu de Valère Novarina, soit dans le Bourgeois Gentilhomme, mis en scène par Benjamin Lazare, “Ô Carmen” sera une révélation. Bruiteur, clown, basse, soprano, ténor, mime, et surtout comédien qui pousse sont art à de tels sommets que cela en devient poétique, Olivier Martin-Salvan donne dans cette pièce un performance étourdissante. Il est et continuera à être l’un des plus grands acteurs français de notre époque.

Mégalo mais tout en humour, extrêmement technique mais tout en souplesse, “Ô Carmen” réunira ceux qui veluent rire, et ceux qui sont en quête d’extrême sur les planches. Quant à ceux qui sont à la recherche des deux sensations, qu’ils se précipitent au Théâtre du Rond-Point avant le 4 avril.

Ô Carmen”, mar-ven 18h30, sam 15h, jusqu’au 3 avril, Théâtre du Rond-Point, 2bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris 8e, m° Franklin-Roosevelt, réservation : 01 44 95 98 21.

Ce soir j’ovule au Théâtre des Mathurins : quand avoir un enfant est un parcours de combattante

Mardi 2 mars 2010

Le théâtre des Mathurins accueille dans sa petite salle un monologue drôle et poignant de Clara, une femme qui passé la quarantaine n’arrive pas à avoir d’enfant. De conseils de bonnes copines, en cure d’hormones, l’héroïne voit ses idéaux féministes mis à mal. Sur un excellent texte de Carlotta Clerici (dont la boîte à sorties vous avait parlé comme metteuse en scène pour la « Trilogie de la villégiature), et dans une mise en scène de Nadine Trintignant, la comédienne Catherine Marchal nous rend le désir frustré d’enfant de Clara proche et très tendre…

Clara vient de fêter son quarantième anniversaire, et cela fait près de cinq ans qu’elle se bat pour avoir un enfant. L’idée est née lors d’une folle nuit dans un grand hôtel au bord de la plage avec son compagnon, Marc. Depuis, le couple est soumis à la rude épreuve de s’accoupler utile, pendant l’ovulation. Et Clara, si fière de sa pilule et de sa liberté de femme dans l’adolescence se voit soumise à l’antique opprobre qui touche les femmes stériles. De tous côtés, on veut la faire culpabiliser, et on lui administre des conseils et des traitements extrêmement pénibles. Mais Clara retourne son désir d’enfant contrarié en fable franche, drôle et tendre où l’humour vient sublimer l’aliénation…

Très juste, et partant d’une histoire vécue, le texte de Carlotta Clerici sait- à l’image de son titre- appeler un chat un chat mais ne tombe jamais dans la vulgarité d’une description clinique ou  dans la trop grande légèreté d’une rubrique courrier du corps de magazine féminin. A l’heure où un couple sur sept rencontre des difficultés à avoir un enfant en France, ce texte vient mettre en lumière un sujet crucial et dont l’on parle pourtant très peu. L’humour est la clef de la réussite de ce monologue qui dénonce l’impératif antiféministe d’enfant, la mise au ban archaïque des femmes stériles ; et même si Clara reconnaît que les progrès de la science lui permettent d’espérer, elle fustige l’acharnement thérapeutique qui consiste à nourrir d’hormones et forcer à faire des FIV  à grands traits de culpabilisation des femmes dont on ne connaît même pas les causes d’infertilité. Dans une mise en scène sobre, blanche, et chic de Nadine Trintignant où le canapé du salon se transforme plus souvent qu’à son tour en fauteuil de gynéco, la formidable Catherine Marchal (qu’on a pu voir dans 36 Quai des Orfèvres, et dans de nombreuses séries françaises) incarne une Clara pleine de vie malgré son ventre plat.
« Ce soir j’ovule » oscille avec succès entre le spectacle charmant, la comédie et le monologue coup de poing. Et des personnes de tous sexes et de tous âges  (sisis) dans la salle sympathisent et rient de grand cœur avec Clara.

« Ce soir j’ovule » de Carlotta Clerici, avec Catherine Marchal, mise en scène Nadine Trintignant, assistée de Vincent Trintignant, Théâtre des Mathurins, mar-sam, 19h30, 36 rue des Mathurins, Paris 8e, m° Hâvre-Caaumartin ou Madeleine, 24 euros, réservation : 0142656246.

© Nathalie Mazéas

Cabaret Terezin : encore deux représentations exceptionnelles au Théâtre Marigny

Vendredi 26 février 2010

Pour la première fois en France, un spectacle nous livre dans notre langue les trésors du cabaret composés dans le camp de Theresienstadt, où ont d”abord été envoyés la plupart des grands artistes juifs européens déportés. Des trésors inestimables que Sergueï Dreznin, Isabelle Georges, David Krüger et Olivier Ruidavet font revivre pour un public volontiers composé de collégiens.

Ouvert pour les juifs les plus renommés ou les plus âgés après la conférence de Wannsee, le camp de Theresienstadt a servi de vitrine ou de camp-modèle aux nazis pendant la guerre. la Croix Rouge est même venue le visiter au début de l’année 1945 alors qu’il avait été soigneusement transformé en camp idéal. Le spectacle écrit par Josette Milgram n’oublie jamais de rappeler que l’on mourait de faim et de fatigue à Terezin et que les convois pour Auswchitz y étaient réguliers. Le spectacle suit le fil rouge de l’histoire d’Alexander Waechter ouvrant une valise longtemps restée dans le grenier afin de retracer la vie de son grand oncle Raimund mort dans le camp où il avait été déporté pour avoir épousé une juive. Peu de textes et beaucoup de chansons, constituent ce “Cabaret Terezin”. Parmi les numéros, les airs qui sont restés du camp  comme “Une valise raconte” (Ilse Weber), “La marche de Terezin” (Karl Svenk), “Le fond  reste musical”  (Fred Raymond) ou “Ce bon vieux cabaret” (Frida Rosental).  A un moment, l’on entend même le “St Louis blues” interdit partout en territoire nazi comme “art nègre” mais joué à Terezin.

Tous les textes sont traduits de l’allemand en français sauf deux (on peut entendre un morceau en tchèque et un autre en allemand, mais rien en yiddish), si bien que le public comprend immédiatement à quel point, alors même que rôde une mort souvent  évoquée, l’humour et le désir de vivre ont continué à irriguer la formidable création artistique qui a eu lieu dans le camp (une centaine de spectacles et conférences en trois ans).  A l’image de l’empereur d’Atlantis de l’opéra de Viktor Ullmann composé  dans le camp, c’est en chantant que les juifs de Thersienstadt exprimaient leur “refus de mourir”.  La charge émotionnelle d’interpréter des œuvres composées par des auteurs qui se savaient condamnés est parfaitement portée avec leur étoile jaune a veston par les quatre immenses interprètes du spectacles. Chanteurs hors pairs, danseurs,  et acteurs, Isabelle Georges, David Krüger et Olivier Ruidavet nous  font parfois rêver que l’on n’est plus à Theresienstadt mais à Broadway. Seul instrument pour les soutenir, le piano de Sergueï Dreznin est tout simplement magique.

“Cabaret Terezin” se donne encore deux fois pour le grand public au Théatre Marigny : le 8 mars et le 10 mai à 20h30.

Les collégiens et lycéens  peuvent assister à des séances spéciales les mardi 16 février à 15h, jeudi 18 février à 15h, lundi 8 mars à 15h et lundi 10 mai à 15h. Pour réserver pour  votre classe : cabaret.terezin@gmail.com.

“Cabaret Terezin”, dialogues Josette Milgram, oeuvres de Ilse Weber, Léo Straus, Frida Rosental, Karel Svenk, Walter Lindenbaum, Kopper… , piano et arrangements : Sergueï Dreznin, avec  Isabelle Georges, David Krüger et Olivier Ruidavet, Théâtre Marigny, le 8 mars et le 10 mai à 20h30, Carré Marigny Paris 8e, m° Franklin Roosevelt,  18-40 euros ( pour mes représentations jeunes : 5 euros) infos et réservations : cabaret.terezin@gmail.com.

Facebook de l’évènement ici.

Le journal d’une autre au Théâtre Paris-Villette

Mardi 16 février 2010

Tirée des notes codées prises par l’écrivaine Lydia Tchoukovskaïa sur la poétesse Anna Akhmatova durant leurs trente ans d’amitié politique et littéraire, « Le Journal d’une autre » est une pièce intimiste de retour dans la petite salle du théâtre de Paris-Villette. Mise en scène et jouée par Isabelle Lafon, fantastique et complètement habitée par l’auteur de « Requiem ».

Elles ont vingt ans d’écart et leur amitié commence en 1938, au pire moment des purges staliniennes. C’est l’année où le mari de Lydia Tchoukovskaïa est arrêté et exécuté (ce qu’elle n’apprendra officiellement que longtemps après) et où le fils d’Anna Akhmatova, Lioucha est envoyé en déportation en Sibérie. Les deux femems se rencontrent pour « affaires », c’est-à-dire pour parler de la situation. Akhmatova qui avait été réhabilitée brièvement pendant la Seconde Guerre,se trouve à nouveau exclue de l’Union des écrivains en 1946. Elle ne sera plus publiée en URSS, alors qu’elle vit à St Petersbourg, jusqu’en 1961. Tchoukovskaïa se met alors à apprendre les poèmes d’Akhmatova par cœur, car ceux-ci sont trop dangereux et brûlés une fois écrits. Ainsi, le fameux « requiem » restera uniquement dans la mémoire de la jeune femme de 1938 à 1962.

Photo : Fred Kihn

Absolument habitée par le personnage, la comédienne et metteuse en scène Isabelle Lafon redonne vie  à  une Anna Akhmatova, politiquement lucide, à la fois et critique vis-à-vis de ses vers et extrêmement egocentrique et sûre d’elle. Et elle fait trembler son audience quand elle cite et récite des vers d’Akhmatova, en Français et en Russe, en décortiquant les phrases du long livre de Tchoukovskaïa pour rendre hommage avec des mots historiquement justes à la poétesse. En face, nouvelle venue, Johanna Kortals Altes incarne avec blancheur et fragilité cette femme intelligente qui a eu l’idée d’écrire un journal intime à propos … d’une autre. Puisqu’ « on ne peut travailler qu’à mains nues » (I. Lafon) sur cette relation de dénuement et de poésie qu’est celle des deux femmes, la petite salle du Théâtre Paris Villette se prête agréablement aux confidences, vers et réflexions sur les pairs comme Maikovski, Madelstam ou Pasternak. Une table, deux chaises, quelques livres, et un projecteur font l’affaire. Pas de bande-son et pas de grands corps de ballets pour évoquer les âmes sœurs et leurs disparus en train de se construire « un abri de mots » contre l’inviable réalité soviétique qu’elles ne voient que trop clairement.

Un beau spectacle, qui nous plonge dans l’intimité d’une des plus grandes plumes du 20e siècle, et rend compte du bruit et de la fureur de l’Histoire à travers l’attente et les mots des femmes.

photo : Fred Kihn

« Journal d’une autre », adapté du texte de Lydia Tchoukovskaïa (Albin Michel), adaptation, mise en scène et interprétation : Isabelle Laffon, avec Johanna Kortals Altes, rendez-vous mensuel du 8 au 13, février, mars, avril et mai 2010 lun, mer, sam. 19h30, mar, jeu, ven. 21h, dim. 16h, durée 1h20 Théâtre Paris-Villette, Parc de la Villette, 211 av Jean Jaurès, Paris 19e, m° Porte de Pantin, 8-21 euros, réservation : 01 40 03 72 23.

« Et j’ai appris l’affaissement des visages,
la crainte qui sous les paupières danse,
les signes cunéiformes des pages
que dans les joues burine la souffrance ;
les boucles brunes, les boucles dorées
soudain devenir boucles d’argent grises,
faner le sourire aux lèvres soumises,
et dans le rire sec la peur trembler.
Et ma prière n’est pas pour moi seule,
Mais pour tous ceux qui attendaient comme moi
dans la nuit froide et dans la chaleur
sous le mur rouge, sous le mur d’effroi .»
Anna Akhmatova, Requiem

Dernière lettre d’une mère à son fils à l’épée de bois

Mercredi 13 janvier 2010

Du 27 janvier au 13 février Christine Melcer interprète “La dernière lettre”, extraite du roman de Vassili Grossman :” Vie et Destin” au Théâtre de l’épée de bois. Dirigée avec pudeur par la toute jeune Nathalie Colladon de la compagnie “Têtes d’ampoules”‘ la comédienne donne corps à l’ultime témoignage d’amour d’une mère à son fils.

“Comment finir cette lettre? Où trouver la force pour le faire mon chéri? Y a-t-il des mots en ce monde capables d’exprimer mon amour pour toi? Je t’embrasse, j’embrasse tes yeux, ton front, tes yeux. Vitenka…Voilà la dernière ligne de la dernière lettre de ta maman Viv, vis, vis toujours… Ta maman.”

afficheDEF

A Berditchev, en Ukraine, dans la chaleur insupportable de l’été 1941, et juste après que les nazis ont pris la ville, Anna Seminiovna est obligée de quitter sa maison. Parce qu’elle est juive, elle est enfermée dans le ghetto de la ville où sont parqués tous ses coreligionnaires. Elle sait qu’elle n’en sortira pas. Et que, par conséquent, elle ne reverra jamais son fils mobilisé dans l’armée. Elle lui écrit donc une dernière lettre où elle inscrit tout son amour pour lui. 17e chapitre du grand roman de Vassili Grossman, cette lettre est un texte puissant. En écrivant la lettre que sa mère n’a jamais pu lui envoyer avant d’entrer dans le ghetto, Grossman fait parler en même temps toutes les mères du monde, en imaginant comment elles exprimeraient l’amour qu’elles ont pour leur enfant, sachant que c’est la dernière occasion de le faire.

C’est la comédienne Christine Melcer qui a proposé à Nathalie Colladon de travailler ce texte pour la deuxième mise en scène de la compagnie “Têtes d’ampoules”. Dans un décor sobre, fait d’une grande palissade de bois, l’interprète complétement investie dans le rôle de la mère condamnée. Se découvrant peu à peu de ses vêtements chiffons, elle semble se dévoiler tout au long de la pièce pour arriver à la nudité de la coexistence inexplicable de la mort imminente et de l’amour pour son fils. Pendant plus d’une heure, la salle est suspendue à ses lèvres, entrant en empathie avec le sens à la fois simple et essentiel de chaque mot écrit par Grossman. Avec une grande sensibilité et un attention toute particulière à l’universalité du message, à à peine 25 ans, Nathalie Coladon met en scène sa bouleversante comédienne. Son engagement artistique est aussi politique :”Oui, je suis jeune, Non, je ne suis pas juive. Oui, je suis concernée”. Et touche juste, puisque le public a déjà plébiscité ce spectacle lorsqu’il a été représenté une dizaine de fois à l’épée de bois en juin dernier. A vous d’aller découvrir ce monologue à la fois superbe et terrible et qui nous concerne tous, quel que soit l’âge ou l’appartenance identitaire.

“La dernière Lettre”, un texte de Vassili Grossman, Mise en scène Nathalie Colladon de la compagnie “Les têtes d’ampoules”, avec Christine Melcer, du 27 janvier au 13 février, Cartoucherie, Route du Champ de Manoeuvre, Paris 12e, m° Porte de Vincennes PUIS Bus 112, durée du spectacle : 1h10, 13 euros (TR : 9 euros).Réservation au : 01 48 08 39 74.


La dernière lettre Nathalie Colladon
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L’amant, d’Harold Pinter au Café de la Danse

Mardi 22 décembre 2009

Jusqu’au 30 décembre, la Compagnie Bord Cadre présente une version lisse et lounge de la pièce de Harold Pinter : « L’amant ». Une plongée dans les zones d’ombre et de perversion du couple.

couple-sur-chaiseSarah et Richard sont un couple de la moyenne bourgeoisie anglaise. Après dix ans de mariage, sans enfant, ils sont encore très tourtereaux amoureux. Le matin et le soir, quand il sort du travail, Sarah s’occupe très bien de son mari. Mais dans l’après-midi, deux à trois fois par semaine, elle reçoit chez eux son amant, Max. Richard est très compréhensif : il sait que l’amant est un élément important de l’équilibre de Sarah. Et de la jalousie serait une preuve d’inélégance. Lui-même est régulièrement infidèle à sa femme adorée, avec une prostituée. Tout va pour le mieux dans le plus poli des mondes, donc, jusqu’au jour où l’amant décide que le mensonge et l’adultère ne peuvent pas continuer…

after-sexe

Les mots d’Harold Pinter nous font entrer dans les coulisses des après-midis de jeux érotiques de Sarah, et dans la cordialité tendre d’un couple qui a duré sans s’éroder. La traduction française, laisse parfois un peu à désirer (mais comment traduire la première phrase « Is your lover coming today ? », “coming “voulant dire à la fois venir et jouir ?). Surtout, malgré une scénographie « pure » et lounge aux tons blancs, gris et rouges, la mise en scène de Cécile Rist étale le texte dans le temps (2h20 !) jusqu’à l’éclater et le faire tomber en morceaux. En mari, comme en amant, Guillaume Tobo n’estpas très crédible ; peut-être parce que l’on sent qu’il n’est pas très sensible à la sensualité de la sublime Dounia Sichov, même quand elle enlève sa culotte rouge de dessous son caraco rouge. Bref on s’ennuie vraiment dans cette version longue et lente de l’ « Amant », malgré certaines idées intéressantes dans la mise en scène, comme le fredonnement de mélodies en guise de B.O. ou l’utilisation de la vidéo. Et même ces dernière s’essoufflent sur la longueur… jusqu’à porter sur les nerfs.

lamantfinal « L’amant », de Harold Pinter, Cie Bord Cadre, mise en scène Cécile Rist, avec Dounia Sichov, Guillaume Tobo, Robert Hatisi, jusqu’au 30 décembre, 20h30, Café de la danse, 5 passage Louis-Philippe, Paris 11e, m° Bastille, 19 euros (TR 12 euros).