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Retour à la Berlinale

Samedi 8 février 2014

C’est la troisième année que je couvre le festival du film de Berlin. Malgré un calendrier bien rempli par les projections, et la manière un peu déprimante dont la capitale vit comme si son festival planqué dans le fort froid de la potsdamer platz n’avait pas lieu, la ville résonne beaucoup en moi.

Par la langue d’abord, un gris prononcé bariolé de travaux où l’on se sent privilégié de se faire un petit nid chaud, même pour quelques jours. Et par sa taille démesurée qui met à mal mon ferme désir de rester non-conductrice.

Cette année, il fait particulièrement doux, ce qui encourage les errances et ravive les rêves de vivre ici, un temps ou longtemps, le temps de rêver en allemand et de connaître tous les frozen yoghurts et scènes de performance de la ville. Le temps de m’échapper un peu et de rêver un monde disparu; de me laisser blesser par un passé lourd, pesant le poids du plomb, lors des longes heures d’été que j’ai pu passer seule ici, à la fin de mon adolescence. Le temps de tomber amoureuse d’un poète mort, de vivre les nuits jusqu’aux aurores à refaire le monde avec les pieds ou avec des étrangers, le temps d’être libre.

Le canevas de cette couverture cinéphilique de 6 jours ne laisse pas ces marges, ni même l’espace de souhaiter ces échappée. Et pourtant, malgré les twitts, les reports, les conférences de presse et les projections qui préviennent les errances intempestives, il y a beaucoup de joie pour moi à être ici, à ne pas avoir froid, à être unie en un seul en endroit sans me sentir coupable de ne pas être ailleurs, et à me sentir prête à voler, baskets aux pieds, d’un film à un autre, comme si ces séances ne pouvaient m’être comptées ou déprises. Un sentiment de correspondance incompressible, comme celui que je sens à Cannes – mais moins les crises de nerfs d’épuisement- ou que je vis quand je suis seule à Tel-Aviv à butiner comme une abeille chaleur, extraits de vies étrangères et familiarité qu’on peut aussi mettre à distance.

Pas de chagrin d’amour, pas de souvenir douloureux personnels dans ces deux capitales. Seul le passé des autres les hantent, les habitent, dépassent l’espace imparti à l’imparfait, et cette démesure ne m’attaque qu’indirectement. L’oxygène circule et le corps s’allège. Un bon poulet rôti, une marche le long des tilleuls, une chambre à soi avec vu sur la Fernsehturm depuis une tour légo, et la paix monte, comme un répit volé à une vie où il y a trop à prouver et trop à porter.

Rentrée tourmente

Samedi 21 septembre 2013

Samedi matin, en me levant vers 5h30, j’ai enfin eu le temps d’écrire deux articles. La rentrée est à flux très tendus et pourtant pleine de nouvelles aventures. Le guide de “Tout la Culture à Paris” sort le 2 octobre et fait donc de moi… un auteur publié. A part ça, et le fait qu’honnêtement le guide est canon, le travail photo et les adresses de Bérénice, la structure thématique et deux fois trente ans de vie très parisienne en font une sorte d’objet témoin des lieux où notre vie de journalistes culturels nous mènent, témoignage que j’apprécierai probablement plus tard, coincée entre télé, poêles et devoirs.
La semaine a donc été avant tout TLC, avec de nouveaux bureaux, un double temps plein, des rencontres et sorties avec les rédacteurs, les affres des dossiers de subvention et autres choses administratives et l’écriture un peu.
La semaine a été très glossy, diner avec un grand danseur russo-américain et mes parents adoptifs lundi (du coups je l’ai quand même vu sur scène hier soir!), concert de Mylène Farmer fascinant et nostalgique mardi, et jeudi, première branchouille de la pathétique adaptation de la “parodie musicale” de 50 shades of grey au Palace.
La semaine a été familiale, jolis moments avec papa et googletalk fraternels pour finir le fameux business plan du site, version 12.
La semaine a été parlée en anglais, entre mes parents adoptifs et mes étudiants étrangers du cours d’éthique.
La semaine a été amoureuse, très.
La semaine a été active et très réflexive.
Mais la semaine a été un peu trop, je dors 4/5 heures par nuit, parfois 3. Cela fait depuis mon retour de bruxelles, dimanche soir, en slalomant avec ma chère valise déchirée entre les feuilles mortes que j’aurais envie d’écrire un poème, des poèmes, pour canaliser l’énergie et la peur, mais l’horloge n’est pas au salon, plutôt dans mon corps et elle ne dit ni oui ni non, elle court… je cours. C’est un peu court et c’est très long.

Energie entre Luxembourg, Metz et Paris

Lundi 8 juillet 2013

Après 36 heures absolument revigorantes à Luxembourg (où j’ai dormi avec une vue sur le sublime bâtiment du Mudam et son parc vert, formule detox+++, surtout que le sauna était en face de ma chambre) et à Metz (Pompidou, plus conformiste, un peu décevant malgré le soleil), j’ai fait une folie après avoir chroniqué quelques livres hier : escaladé à à deux heures du matin les grilles du Palais Royal pour me poser sur une chaise verte en fer le long du bassin avec un ami. Deux heures de discussion privilégiée dans la chaleur d’un été qui est enfin arrivé. Après des mois de froid et de pluie nous n’en revenons pas de passer nos nuits d’été jambes nues et dans la douceur enveloppante des étoiles que l’on peut voir briller. Il fait encore que je décante la grande exposition du Mudam, l’excellente “image-papillon” qui questionne visuellement la mémoire à partir de l’œuvre littéraire de Sebald, mais j’ai bien avancé dans mon infini planning de fermer les tiroirs de la rédaction avant la rentrée. J’ai notamment retranscris aujourd’hui l’interview de Avi Mograbi (rencontre très décevante, il était à la limite de la politesse et de l’intéret, mais bon on ne peut pas plaire à tout le monde, ni même faire parler de soi tout le monde) et écrit sur l’expo du casino Luxembourg, passionnante sur l’univers visuel (et macabre) du heavy metal). Continent noir musical qui m’a fait penser à notre cher Eric et au sublime vernissage de l’expo “Europunk” à la Villa Medicis, il y a deux ans. Eric est parti vivre à Austin, donc pas possible d’en parler avec lui, probablement en amont de ce j’ai vu hier.
Mon escapade dans les jardins du palais royal m’a coûté beaucoup de sommeil (3h30 pas la nuit dernière) et la suspension matinale aux fils de TRX à la porte d’Auteuil m’a fatiguée, malgré un soleil matinal absolument galvanisant et une marche nocturne dans paris à une heure plus raisonnable ce soir.

15 jours pour écrire un peu

Mardi 2 juillet 2013

Enfin une vraie chaleur pour mes déambulations nocturnes parisiennes. Je reviens des Bouffes du Nord où je suis allée seule voir la mise en scène de la Flûte enchantée (décidément!) par Peter Brook. Un enchantement, un vrai 🙂 J’ai du mal à écrire quand je en suis pas seule car j’aime écrire la nuit, même si à l’heure actuelle, je devrais être entrain de dîner devant un des films du réalisateur que j’interviewe jeudi… Début de semaine fort en émotions avec de grandes questions pour l’Avenir (oui, oui avec un grand A). L’énergie est de retour pour toute la culture mais m’a coûté 36 heures collée à mon fauteuil pour finir un dossier de candidature auprès de la mairie de Paris, les choses bougent à sciences po, et il faut décider dans quelle ville je veux vivre. Si bien que le soir venu, si par hasard je suis dans les rues, je suis tentée de ne plus rentrer. A l’idée même de devoir quitter un jour Paris, mon cœur saigne tellement que – comme à 17 ans- je marche des heures, les yeux grands ouverts pour engranger des impressions, des observations ou des souvenirs à faire revivre en exil. Enfin rien de pressé, si déménagement il y a, ce sera dans plusieurs mois, voire plusieurs années. La chaleur apporte un peu de bonheur, j’ai l’impression qu’autour de moi on a tous un peu bouclé les affaires courantes avant l’été. Bon les festivals de juillet c’est encore du travail mais “at large”. Restent encore avant un joli voyage à Metz et Luxembourg et l’assemblé de l’association française de science politique où je dois parler dans un atelier… Je clos ce petit listing par une bande annonce magique de circonstance (même sans flute) et vais diner!

Huit mois plus tard

Samedi 15 juin 2013

Muette depuis octobre, ça n’a jamais été aussi long. Et je ne suis pas vraiment sûre qu’en ce samedi orageux, antichambre d’un été qu’on nous prédit aqueux, mes lèvres soient tout à fait desserrées et mes doigts désengourdis. En huit mois rien n’a changé pour que tout change. Les spectacle se sont multipliés, j’ai vu des dizaines de superbes films à Cannes et Berlin, aussi un peu Angers et Belfort. Côté théâtre et surtout musique, RAS, pas de gros coup de cœur. Toute La Culture a reçu une subvention du Ministère de la Culture, ce qui nous donne de l’espoir pour l’avenir et le nouveau site fonctionne plutôt pas mal. Nous allons aussi sortir un guide de Paris dont nous ne finissons pas de corriger les épreuves. Depuis un mois environ je travaille un peu moins et passe parfois la moitié de la nuit au Silencio et j’ai un peu des fourmis dans les doigts, même un nouvel homme dans ma vie depuis novembre dernier m’accompagne la nuit, à l’heure où de temps en temps, j’avais besoin d’écrire. Probablement avec le calme de l’été, j’arriverai à poser quelques signes ici, et pourquoi pas ? même quelques vers mélancoliques. Surtout en cette année où tout le monde passe des chiffres d’âge rond dans la famille. 60, 90, 80 et 30 !

Nomadismes (suite)

Vendredi 20 août 2010

Comme toujours, la fin du voyage est bien plus trépidante que la semaine langoureuse de mon arrivée. Bien sûr, le rythme n’a rien à voir avec celui de ma vie parisienne à triple emploi et dont la reprise m’effraie, mais une sois mes repères fixés à Tlv je me suis quand même bien baladée ces deux derniers jours. Avant-hier soir, un ami argentin chef à ses heures perdues de designer a balayé mon blues à grands renfort d’aubergines grillées, et de mets délicieux aux épices les plus folles. Rien que le dessert était un poème : figues revenues à l’huile, au miel, à l’anis, avec glace vanille. Nous avons écouté des litres de tango pour digérer…Hier, départ vers 10h en Shirout pour Hashkélon, au Sud, où j’ai rejoint ma soeurette E. dans un paysage de desert et de mer, au milieu de nulle part, devant une marina qui effaçait à peine l’effet Robinson. On ne devinerait pas que la ville est à quelques km de Sdérot et que des missiles lancés de Gaza y tombent régulièrement. Après un déjeuner délicieux (fin définitive du régime lié à la chaleur) dans un ancien Kibboutz qui porte le nom d’une épice (Sumac) et du vin du Golan, nous avons été conduites en face de Gaza et briefée sur la situation pour un cicérone ‘neutre’ qui s’y rend au moins deux fois par semaines. Instructif. Juste le temps de sauter à nouveau dans le shirout où mon voisin d’origine indienne me donnait des coups de coudes pour continuer une conversation-fleuve … en Hébreu et m’empêcher de dormir. Je dors de moins en moins, 3-4 heures par nuit, la routine habituelle, en fait. Bref il voulait que je fasse encore un bout de chemin avec lui, et j’ai compris qu’en l’absence de femme officielle, ce voyage était son trajet hebdomadaire pour le bordel. Pas le temps de me changer pour retrouver mon élégant cousin à l’Hôtel Montefiore, tenu par le couple qui connaît également le succès avec l’excellent restaurant français La Brasserie. Ambiance Boutique, mi-néo-colonial, mi-Mercer de Soho, délicieux Bloody Mary et intense conversation avant que ma chère Y. dont c’était le dernier soir nous rejoigne, toute pimpante. je voulais aller voir le concert de Hadara Levin Arredy mais après prise d’info, celui-ci annoncé pour 21h30 n’avait lieu qu’à 23h00, nous avons donc eu le temps de manger le meilleur sandwich au Corned Beef de la ville au n° 58 de la rue Yehuda Ha’Levi. Finalement arrivée un peu pompettes au concert, nous avons été frappées au coeur par la grâce : voix rocailleuses, textes forts en anglais, et en hébreu, délicieusement imparfaite, son piano planté entre deux serveurs allant chercher bouteilles de vin et addition, la grande et maigre chanteuse était à chaque morceau à la hauteur de la chanson qui m’avait interpellée dans le film «I Shot my love» : «Going Home». Du underground avec âme et beauté, comme je l’aime. Y. aussi s’est assise par terre, et quoiqu’un peu choquée par les couples de lesbiennes s’embrassant entre deux claps de leurs mains au rythme de la musique, s’est laissée porter par cette mélancolie essentielle.

Après un Jeroboam d’eau, direction rue Lilienblum, non pas au Nanotchka, mais au bar d’enface, extérieur, lounge, blanc, et bien gardé. Discussion intéressante avec deux amis français dont un a fait son alliah, et puis quitte à attendre le départ pour l’aéroport de Y. jusqu’à 4 heures du matin, nous serions bien allées danser au galina encore une fois, mais la fatigue a gagné, et nous sommes rentrées discuter à la maison en luttant contre le marchand de sable. Je me suis effondrée jusqu’à 9h30 du matin pour reprendre un Shirout vers Jérusalem où je n’avais pas eu le temps de voir ma famille lundi. Habitant dans le joli quartier de katamon, Y. m’a raconté de jolies anecdotes sur mon père, son cousin et lui nageant dans la Garonne quand ils avaient 12 ans et A. avait réussi à préparer le meilleur repas, aloors ue le frigo était en panne. Retrouvailles avec E. et un de ses amis à la cinémathèque, où nous n’avons pas pu bouger du bar climatisé tellement le soleil tapait sec dehors. Petit tour de moto jusque chez l’ami de E. toujours dans le quartier de katamon, et soirée de discussion à coeur ouverte avec un quatrième ami brillant et un peu plus religieux, entrain de finir sa thèse et que je connaissais d’une conférence donnée ensemble à la Sorbonne. Vers 22H, il était temps de rentrer – pour travailler un peu, la boîte à sorties émerge doucement de son sommeil estival- mais à défaut de connexion Internet, j’ai écrit un peu, préparé un CD pour mon ami israélien G, et là je dois filer sous la douche pour un dernier verre, comme dans la chanson de Biolay passée en boucle ces vacances «Ton héritage».

Lézardages entre la mer morte et les plages de Tel-Aviv

Dimanche 15 août 2010

J’étais prévenue : il fait vraiment une chaleur humide et suffocante à Tel-Aviv en aout. J’étais prete à faire face. Mais lors de ma première semaine seule ici, je marchais, allais au cinéma etc.. et n’étais jamais allée à la plage avant 16h. Chose faite, avec regret avant-hier. A une heure pile, sous le soleil exactement, à peine protégée par un petit parasol glissé dans le bras de mon transat de la plage du Hilton, je me suis vraiment sentie plus mal que dans un sauna : zéro vent, impossible de respirer, et encore moins de lire ou de penser. En voulant m’éclipser et retourner dans mon cher lit, je me suis… brûlée les pieds. Mais vaillante, dès le lendemain, même s’il y fait encore plus chaud que TLV, j’ai décidé de suivre un ami de mon cousin dans son trip “bien-être éclair” à la mer morte. Rendez-vous à 7h du matin, je suis quand même passée au Souk avant voir mon ami Adel, et acheter du pain frais au stand voisin. A grand renfort de musique lounge et sans âme (la compil du Bouddha Bar 23), nous avons mis deux heures à arriver à un charmant hôtel où nous avons fait villégiatire pour la journée. Tout y était : la plage ocre, l’eau solide de sel à 60 °, les matelas, les parasols, la cafétaria et le centre de soins où j’ai eu un massage et un enveloppement de boue. Très agréable, j’ai beaucoup dormi, barboté dans le sel huileux assez magique, eu chaud, mais pas trop, et me suis laissée chouchouter par une masseuse russe comme dans les livres. Très attentif et prévenant, mon compagnon me tendait une bouteille de coca, d’eau ou un magnum quand je sortais d’une de mes multiples siestes. Mais ets demeurer plus que laconique pendant les 13 heures du voyages. A mes questions, il répondait par un mot final et laconique, et ne posait aucune question, si bien que je suis vraiment devenue cruche : silencieuse et souriante la plupart du temps et faisant des remarques enjouées et stupides de temps en temps pour parsemer de fleurs l’ambiance pénitencier soviétique. Le mur de silence m’ a tellement pesé que, lorsqu’il est parti plus tôt pour son massage, j’ai alpagué un pauvre touriste allemand et parlé avec lui dans sa langue des banques de Düsseldorf! Tout ceci n’a pas empêché mon compagnon de se montrer un adorable chauffeur, faisant demi-tour pour venir à la rescousse d’un étudiant perdu sous le soleil de Ein Gedi, et de me ramener chez moi. Et la journée de peu de mots fût finalement assez agréable, et qui plus est un bon aperçu de ce que serait la vie avce un mari à qui je n’aurais rien à dire. Bonne leçon. C’est toute salée que j’ai emporté la bouteille de vin achetée au souk pour filer dans la banlieue de Givataim diner pour shabbat chez Amos, un formidable ancien enfant caché que j’ai interviewé il y a 5 ans, et qui est également un photographe de génie. Voir sa grande famille de 4 enfants et 5 petits enfants présents (sur 9 ) m’a ravie, j’ai communiqué mi en anglais, quart en hébreu et quart en français avec tout le monde et Amos m’a ensuite ramenée en voiture vers mon QG de Rerov Lapin. Aujourd’hui, journée molle, petit dej/brunch classique chez Benedikt, j’ai tenté de repousser la journée de plage par une habile marche rue shenkin, puis par un verre et jeu de cartes “comme nos grands parents”, avant de finalement profiter de l’heure divine sur la plage du Hilton. Ce soir, sortie franco-française dans l’air… mais tout ça s’organise et finalement apprendre à ne rien faire est un travail à temps plein!

Gay Tel Aviv (la tirade de la fille)

Jeudi 5 août 2010

J’ai entendu assez de Lady Gaga pour les trois prochaines années de ma vie, ces trois derniers jours. Dans la voiture, dans les clubs, à la gym, et bien évidemment également toutes les sonneries de portables des amis de mes amis entonnent “Alejandro” ou “Just danse”. L’autre icône gay est Beth Ditto, mais seule Lady Gaga alimente des conversations passionnée où l’on dirait que chacun parle du poète de ses premiers émois adolescents. Je suis donc devenue une grande adepte du Tel Aviv Gay  : les plages (Hilton), les brunchs (Neve Tsedek), même certains aspects politiques, par l’ami d’un ami, et bien sûr les clubs. J’aime beaucoup l’ambiance de ces clubs, ici, mi-rétro, mi-ici et maintenant, ouverts à tous (je ne me sens pas coupable d’être une femme, comme à NYC par exemple), et où je peux librement parler à tous et les ramener vers mes amis – quand ils trouvent le nouveau venu assez mignon. J’ai même traîné un de mes amis plutôt religieux et très hétérosexuel à rejoindre la joyeuse troupe au “Lima Lima”, joli club bondé de la rue Lilienblum (à deux pas de l’ancien bar georgien Nanotchka, où je dansais sur les tables il y a 5 ans, et qui est malheureusement devenu un lounge comme les autres). Nous nous sommes perchés sur des tables en hauteur dans la cour fumeurs de la discothèque pour observer. Avec une bienveillance toute extérieure. Avant-hier, nous avons enchaîné sur “Evita” où de plantureux travestis donnaient un show sous le portrait de Mme Peron, avant d’enchainer sur “Vice” en face de la tour de la paix, qui a le même bar central et carré que tous les bars sympas ici et  une cour remplie elle aussi de beaux éphèbes. Le tour ne serait pas complet, si je ne mentionnais pas les brunchs à 15H – notamment au port de Tel Aviv-où les langues se délient, et le shopping assez délirant, surtout quand l’un des membres du groupe s’occupe lui-même d’importer des pantalons vert fluo et bleu pétrole griffés par des designers scandinaves. Je sens que cette partie disco-flash du voyage s’arrête aujourd’hui et qu’elle va un peu me manquer…

Reprise israélienne

Lundi 2 août 2010

Le journal de la femme de cendres a un peu été laissé en friche ces dernières semaines. Pas le temps, et surtout pas le cœur à écrire, et pas même envie d’insérer mes articles de la boite à sorties. Enfin seule (avec un ou deux cafards et quelques moustiques, ces derniers magiquement tenus loin de ma peau bronzée par un bracelet rouge à plaquette de citronnelle horriblement efficace), je reprends peu à peu le fil des pattes de mouches dans mon adorable studio de la rue Lapin (hop! hop!) à Tel-Aviv. Après quelques jours à Saint-Tropez très actifs dans l’oisiveté (organiser trois merveilleux amis américains est un temps plein, malgré le programme léger des journées), et une arrivée au poil (plutôt à poil : ma valise avait disparu dans la bagarre, quelque part entre Rome et Tel-Aviv), je peux enfin fêter mes premières vraies longues et prometteuses vacances depuis 6 ans : pas de thèse sur les bras et décision irrévocable de louer la boîte à sorties à mes chères lieutenants. J’ai commencé hier soir, dans mes simples atours de voyage (la situation valise était encore en suspens) par un bar hopping de tous les diables, avec deux des trois américains tropéziens (notez par ailleurs qu’en n’écrivant pas à Saint-Tropez je vous ai évité la description annuelle du bling bling des plages à musique et prix forts et des boîtes locales). Munie d’une carte sim israélienne, je note consciencieusement sur mon “Foursquare” de geekette tous les restaurants et bars que nous essayons, déchiffrant pour cela l’hébreu des titres, ce qui n’est pas plus mal puisque je suis un peu venue ici pour progresser dans cette langue. J’ai enquillé une ballade solitaire le long de Schenkin, à faire du lèche-vitrine, une fois les magasins fermés, un peu de caviar d’aubergine et de viande fumée chez l’ami israélien où vivent mes deux amis new-yorkais, quelques bars pas assez veggan-friendly, un stop pour manger quelques tapas cacher dans le joli “Tapas 1”, et une soirée classique sur un toit local (le sublet, face à la mer). pas de grande activité le dimanche soir, qui est le premier jour de la semaine ici, mais assez cependant pour rencontrer un charmant jeune avocat avec qui je dois aller à la plage demain. Et de finir chez moi épuisée à 3 heures du matin à force de me perdre dans les rues. En termes de plage, pas grand chose, pour l’instant, mais j’ai eu l’impression de boire trop de soleil dans le Sud de la France. Devenue noire, j’ai donc décidé de réserver la pause plage à l’heure du coucher de soleil, joli cadeau à moi-même parfaitement réalisable parce que je réside exactement à 5 minutes à pied de la mer. Avant cela, la bonne surprise de la valise revenue comme par miracle, cours de gym en hébreu (hilarant!) dans la tour du Dizengoff center, brunch pas terrible rue George V, virée au Musée de Tel-Aviv – nous sommes restés à la porte (il ferme à 16h, eh oui, il y a pire que la France pour les horaires des musées), et petit tour le nez au vent dans le nouveau port dont les habitants de cette ville sont si fiers. Tel-Aviv m’énergise et tout m’émerveille, j’espère que le charme durera ces trois semaine de liberté formidable.

Mon amie la rose

Lundi 3 mai 2010

Quelques lignes nocturnes avant de ne pas dormir assez pour enseigner demain matin à 8h. L’humeur est passée de maussade à légèrement angoissée, ce pluvieux premier week-end de mai. Hyper-activité toujours mais avec de très belles choses, comme le spectacle de Claire Diterzi à la ferme du buisson, hier soir (critique à venir) et FINALEMENT le dernier Polanski ce soir (pour ce film, il y avait une malédiction, j’ai “failli” le voir au moins quatre fois, avant d’y parvenir). Mes cheveux sont superbes en ce moment (paraît-il) sorte d’excroissance sur mon cerveau un peu épuisé, et fruit d’une cure de compléments alimentaires sur lesquels à l’avenir je me garderais bien de cracher. Le bout du tunnel n’est pas loin puisque les cours s’arrêtent la semaine prochaine. La vraie, grande et bonne surprise de la semaine : un homme m’a offert des fleurs. vingt-quatre roses blanches comme dans “Lettres d’une inconnue”. Ça n’était pas arrivé depuis 2002. Parce qu’en général, les hommes m’offrent des livres. Ça doit être écrit sur mon front que j’aime les livres… Et même depuis que j’ai laissé mes lunettes d’intello au tiroir pour le dimanche, il ne leur vient pas à l’idée que j’ai déjà trop de livres, qui bouchent mon couloir et gagnent les étagères du frigidaire. Par ailleurs, en général, les hommes marquent leur territoire quand ils offrent ce genre de choses. Avec un petit commentaire et une signature sur la première page, comme s’ils étaient l’auteur du bouquin. On pourrait carrément entreprendre une généalogie de ma vie amoureuse en recherchant comme des étoiles dans un ballet de poussière leurs autographes… Pour les plus importants, il faudrait volontiers se pencher sur la section “internationale” de mes livres. Parce que Nietzsche en Allemand, Van Gogh en Néerlandais, et Auden en Anglais, c’est quand même autrement plus chic que dans ma vulgaire langue maternelle. Certains se sont même risqués à signer du Pasternak en Russe, langue extrêmement mystérieuse pour moi. Bref, donc, ces roses m’ont émue aux larmes. Surtout débarquant en milieu d’après-midi au bureau, comme ça juste par gentillesse (les roses rouges estampillées 2002 étaient des fleurs d’excuse). Ce petit retour à la case “compter fleurette” dans les rues de Paris (ou de Noisy) fait un bien fou, comme un grand bain de mer purifiant tous les coups bas et les drames des cinq dernières années. En face, personne en danger de mort, personne au bord de la dépression, personne en fuite du facteur humain pour écrire son œuvre (qui dépasserait l’escogriffe de première page ou trois notes mélancoliques) juste une attention réelle et élégante. Ça détend aussi des délires de mes amis, qui m’emmenant à la présentation de nouvelles prétentieuse décrite jeudi dernier, qui filmant l’hôtel amour (dont le charme à mes yeux est le joli jardin ou j’aime trainer l’été, n’ayant jamais fait escort-girl la nuit pour de luxueux types véreux) comme un hangar d’érotisme macabre”à la” Eyes Wide Shut : luxe, coke et sexe triste entre squelettes. Il y a aussi ceux qui me traînent à des vernissage d’art abstrait ou je dois faire semblant d’être fascinée par des toiles  blanches avec un trait noir (“mais tu comprends, la ligne en fait c’est un vide découpé, c’est le vide qui crée les nuances de gris”, moui, et si je ne ressens rien, c’est “mal”?). Et enfin, ceux qui suivent les cours d’acteurs chevronnés, massacrant systématiquement  et avec une justice arithmétique  tout texte sur lequel ils tombent, en hachant les mots, et enlevant la ponctuation, jusqu’à rendre le texte incompréhensible. Et ça marche encore mieux avec le flux de conscience pédants de jeunes auteurs contemporains qui se la racontent des tonnes, avec des scènes forestières suivant des scènes SM qui pourraient presque être drôle si tout le monde ne prenait pas tout ça tellement au sérieux. Malheureusement la technique de hachage ne fait pas disparaître la monotonie médiocre de ce genre de textes. Heureusement restent les amis qui picolent sans se faire mousser, ceux qui maternent sans trop angoisser, et ceux qui tombent amoureux pour mieux se remettre après s’être très vite cassé le nez. Et surtout ce formidable bouillonnement d’énergie que je sens autour de moi, qui m’emporte dans de nombreux projets et qui m’avait tant manqué l’an dernier. Ceci étant dit Manhattan me manque, et je pense bientôt me renvoler…

Et au programme des jolies choses à faire une fois que l’école est finie : écrire, bien sûr, et volontiers une chronique sur mes taxis parisiens. J’ai toujours des conversations hallucinantes avec les chauffeurs parisiens. Il a celui qui est coiffé comme Elvis et chante le King à tue-tête le long des quais (après avoir demandé poliment la permission), celui avec qui je parle exclusivement de parfums, celle qui est en fait décoratrice d’intérieur, et celui de ce soir était évangélique, et m’a donné un cours de théologie… je me demande si on ne pourrait pas remplacer les cours par des courses en taxi…

Sur ce au lit, pour enseigner la tolérance demain. Une notion que j’ai du personnellement remettre en cause ce matin, quand à 8 heures (un dimanche) des Loubavitchs déchaînés ont entonné des Nigounim avec assez de décibels pour faire trembler le quartier pour exprimer toute leur joie d’avoir reçu la Torah. Le petit post de protestation sur mon facebook à engendré une mini-polémique, assez débile ma foi, si bien que par souci de mon cher petit sommeil je risque de passer pour une affreuse antisémite…