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Dernière lettre d’une mère à son fils à l’épée de bois

Mercredi 13 janvier 2010

Du 27 janvier au 13 février Christine Melcer interprète “La dernière lettre”, extraite du roman de Vassili Grossman :” Vie et Destin” au Théâtre de l’épée de bois. Dirigée avec pudeur par la toute jeune Nathalie Colladon de la compagnie “Têtes d’ampoules”‘ la comédienne donne corps à l’ultime témoignage d’amour d’une mère à son fils.

“Comment finir cette lettre? Où trouver la force pour le faire mon chéri? Y a-t-il des mots en ce monde capables d’exprimer mon amour pour toi? Je t’embrasse, j’embrasse tes yeux, ton front, tes yeux. Vitenka…Voilà la dernière ligne de la dernière lettre de ta maman Viv, vis, vis toujours… Ta maman.”

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A Berditchev, en Ukraine, dans la chaleur insupportable de l’été 1941, et juste après que les nazis ont pris la ville, Anna Seminiovna est obligée de quitter sa maison. Parce qu’elle est juive, elle est enfermée dans le ghetto de la ville où sont parqués tous ses coreligionnaires. Elle sait qu’elle n’en sortira pas. Et que, par conséquent, elle ne reverra jamais son fils mobilisé dans l’armée. Elle lui écrit donc une dernière lettre où elle inscrit tout son amour pour lui. 17e chapitre du grand roman de Vassili Grossman, cette lettre est un texte puissant. En écrivant la lettre que sa mère n’a jamais pu lui envoyer avant d’entrer dans le ghetto, Grossman fait parler en même temps toutes les mères du monde, en imaginant comment elles exprimeraient l’amour qu’elles ont pour leur enfant, sachant que c’est la dernière occasion de le faire.

C’est la comédienne Christine Melcer qui a proposé à Nathalie Colladon de travailler ce texte pour la deuxième mise en scène de la compagnie “Têtes d’ampoules”. Dans un décor sobre, fait d’une grande palissade de bois, l’interprète complétement investie dans le rôle de la mère condamnée. Se découvrant peu à peu de ses vêtements chiffons, elle semble se dévoiler tout au long de la pièce pour arriver à la nudité de la coexistence inexplicable de la mort imminente et de l’amour pour son fils. Pendant plus d’une heure, la salle est suspendue à ses lèvres, entrant en empathie avec le sens à la fois simple et essentiel de chaque mot écrit par Grossman. Avec une grande sensibilité et un attention toute particulière à l’universalité du message, à à peine 25 ans, Nathalie Coladon met en scène sa bouleversante comédienne. Son engagement artistique est aussi politique :”Oui, je suis jeune, Non, je ne suis pas juive. Oui, je suis concernée”. Et touche juste, puisque le public a déjà plébiscité ce spectacle lorsqu’il a été représenté une dizaine de fois à l’épée de bois en juin dernier. A vous d’aller découvrir ce monologue à la fois superbe et terrible et qui nous concerne tous, quel que soit l’âge ou l’appartenance identitaire.

“La dernière Lettre”, un texte de Vassili Grossman, Mise en scène Nathalie Colladon de la compagnie “Les têtes d’ampoules”, avec Christine Melcer, du 27 janvier au 13 février, Cartoucherie, Route du Champ de Manoeuvre, Paris 12e, m° Porte de Vincennes PUIS Bus 112, durée du spectacle : 1h10, 13 euros (TR : 9 euros).Réservation au : 01 48 08 39 74.


La dernière lettre Nathalie Colladon
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Cinéma : Mère en sursis

Mardi 11 août 2009

A partir d’un fait divers rapporté par Emmanuel Carrère dans L’Evènement du jeudi en 1992, et reprenant un projet que Jacques Audiard devait porter à l’écran, les Miller père et fils filment l’amour meurtrier d’un jeune homme pour sa mère absente. « Je suis heureux que ma mère soit vivante » est un huis clos digne de Mauriac, la spiritualité en moins…

Sortie le 30 septembre.

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Thomas a quatre ans lorsque sa mère l’abandonne avec son petit frère, faute de moyens nécessaires pour les élever. Un couple aimant adopte les deux garçons, mais rien ni personne ne peut faire oublier à Thomas sa mère. Lorsqu’il sonne à sa porte, il a vingt ans, un travail dans un garage, et il passe beaucoup de temps avec elle et son tout jeune demi-frère. Mais la douleur et le ressentiment le poussent un jour à l’attaquer et à la blesser mortellement.

Sur une idée du producteur, Jean-Louis Livi, et parce que Jacques Audiard était trop occupé par d’autres projets, Claude Miller a confié la première caméra à son fils, Nathan, qui avait notamment participé au tournage d’ « Un Secret ». Sans souci de retracer la « vérité historique », et pour éviter les liens de causalité entre enfance malheureuse et devenir assassin, le tandem Miller minimise les flash backs et les filme en plan fixe.

Un érotisme larvé entre mère et fils vient encore compliquer leurs relations. Dans le rôle du fils, Vincent Rottiers est hypnotisant et, en face, Sophie Cattani est à la fois touchante et sensuelle en mère un peu paumée.

Malgré la force du sujet, la liste impressionnante de grands noms du cinéma Français qui se sont penchés sur le fait divers, le talent de tous les acteurs, et les efforts de pudeur des réalisateurs, le film ne touche pas. Les ellipses et les non-dits ne donnent pas envie d’imaginer plus que le quotidien triste d’êtres humains qui réagissent finalement comme des bêtes, mais sans aucune dimension monstrueuse ou mythique. Ca s’est passé, et c’est passé, mais cela ne dévoile rien des méandres de l’esprit humain, ni sur la complexité de l’amour filial.

A force de s’inspirer de David Fincher et de Martin Scorcese, Nathan Miller a peut-être oublié qu’il existe en France une longue tradition cinématographique de traitement génial du fait divers, de Chabrol pour l’atmosphère glauque ,à Téchiné qui évite les liens de causalités socio-politiques dans « La fille du RER », en passant par Duras pour l’usage du plan fixe, et Louis Malle pour les personnages « indignes ».


« Je suis heureux que ma mère soit vivante », de Nathan et Claude Miller, avec Sophie Cattani, Vincent Rottiers, Christine Citti, et Yves Verhoeven, 1h30, sortie le 30 septembre 2009.