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Filmer les camps : derrière l’épaule de trois grands réalisateurs américains au Memorial de la Shoah

Mercredi 10 mars 2010

Jusqu’au 31 août, le Mémorial de la Shoah présente au premier étage une exposition sur les images prises par trois grands réalisateurs américains : John Ford (Les raisins de la colère, La Chevauchée fantastique), Samuel Fuller (The Big red one) et George Stevens (Swing Time, Le Journal d’Anne Frank). “Filmer les camps” s’intéresse à la manière dont ces trois cinéastes ont recueilli  des images des camps de concentration de Dachau et Falkenau (annexe de Flossenbürg) pour l’armée américaine à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Et l’on découvre que, aux antipodes de toutes les idées reçues, ce sont de véritables équipes de professionnels, briefées pour obtenir des témoignages incontestables et recevables par des cours de justice qui ont été envoyées à la libération des camps.

Ne manquez pas ce soir la projection du documentaire sur le témoignage de Samuel Fuller sur son travail à Falkenau, en présence de Georges Didi-Huberman.

Déjà très célèbre à Hollywood, notamment pour ses comédies musicales comme “Swing Time” avec le couple Astaire/Rogers, George Stevens s’est engagé en 1943 dans l’armée américaine au service de la communication, le signal corps. Eisenhower lui a demandé de créer une unité spéciale de tournage, la SPECOU (Special Coverage Unit). C’est cette unité -composée de 45 pérsonnes- qui est allée filmer la libération du camp de Dachau à partir du 3 mai 1945. Le responsable de chaque unité faisait un rapport quotidien des activités. Un rapport hebdomadaire, souvent signé par Stevens lui-même, était également rédigé chaque semaine. Membre de l’équipe, l’écrivain Ivan Moffat, a également tenu un cahier relatant les activités de la SPECOU. Très conscients du fait que leurs concitoyens risquaient de ne pas croire ce qu’ils ont vu, les membres de l’équipe de Stevens documentaient avec atention leurs rapports d’act_ivités et de prises de vues. Ils ont également pu interviewer une quinzaine de prisonniers du camp, dont le résistant français Edmond Michelet. 3 de ces entretiens sont visibles à l’exposition du mémorial.

“Crime reporter” reconnu pour certains tabloïds américains avant la guerre, Samuel Fuller a rejoint en 1942, la fameuse première division d’infanterie de l’armée américaine (“The Big red one”). Il s’est  fait envoyer une caméra en Tunisie par sa famille, et sachant cela, l’armée lui a demandé d’aller filmer la libération du camp Falkenau. Aidé d’une équipe de professionnels  d’hommes formés pour recueillir des images témoins, il a ainsi tourné son “premier film”.

John Ford, qu’on ne présente plus, était réserviste dans la Marine pendant la guerre. Il y a créé dès 1939 la Field Photo de la 11e section navale,  une section très indépendante vis-à-vis de la hiérarchie militaire, qui s’est trouvée fin prête pour aller filmer un documentaire sur Pearl Harbor, juste après l’attaque japonaise. Cette section de cinéma est devenue la Field Photographic Branch (FPB), comprenant une soixantaine de techniciens, spécialement formés pour filmer les évènements historiques. Contrairement aux idées reçues, les membres des équipes de la FPB étaient très formés  à immortaliser des témoignages et suivaient une procédure très précise, explicitée dans un cahier des charges explicites sur les manières de filmer pour que les documents soient considérés comme authentiques. Ce fascinant cahier des charges est exposé au mémorial. “December Seventh” puis “The battle of Midway” sont deux documentaires réalisés par l’équipe de Ford pendant la guerre et qui lui ont permis de remporter deux oscars en 1943 et 1944.

Lorsque le Tribunal Militaire International de Nuremberg a été mis en place, à l’été 1945, le procureur Jackson a demandé à la FPB de Ford de reprendre les images de la libération de Dachau prises par la SPECOU de Stevens, afin de réaliser une partie du film “Les camps de concentrations nazis” (qui montrait également des images russes de la libération du camp d’Auschwitz, projeté à Nuremberg le 20 novembre 1945.

L’exposition montre également comment leur expérience de la guerre a influencé les films des trois réalisateurs américains après qu’ils ont quitté l’armée. Stevens est revenu à Dachau avant de réaliser son journal d’Anne Frank, Fuller a utilisé des images de la libération  de Falkenau pour Verboten et certaines scènes de camps ont influencé les images des Raisins de la colère de Ford.

Mêlant textes (lus par Matthieu Amalric et Jean-François Stévenin), films, documents historiques de l’armée américaine et témoignages des réalisateurs, l’exposition “Filmer les camps” est sténographier de manière à parler à la fois aux historiens et aux cinéphiles. Elle explique bien les techniques de réalisation des années 1940, et exprime combie la problématique de savoir comment filmer pour enregistrer des preuves inattaquables a été au cœur des équipes chargées de filmer les camps pour l’armée américaine.

“Filmer les camps, John Ford, Samuel Fuller , George Steven, de Hollywood à Nuremberg”, jusqu’au 31 août 2010, Mémorial de la Shoah, tljs sauf samedi 10h-18h, 17, rue Geoffroy l’Asnier, Paris 4e, m° Saint-Paul ou Pont Marie, entrée libre.

Pour voir l’ensemble des projections rencontres autour de l’exposition, cliquez ici.
Un cycle Hollywood et la Shoah est organisé à partir du 25 mai.

Photo : 1944 © George Stevens Paper, Margaret Herrick Library, Academy of Motion Picture Arts and Sciences.

Turner inspiré au Grand Palais

Vendredi 26 février 2010

Depuis le 24 février, l’exposition “Turner et ses peintres” met en lumière les grands inspirateurs -maîtres et contemporains- du grand paysagiste anglais. L’ étape française de cette grande exposition démarrée cet hiver à la Tate met en valeur l’impact des collections du Louvre sur l’art de Turner après sa visite de 1802 et notamment sa passion pour Claude Lorrain.

“Étudiez la nature attentivement mais toujours en compagnie [des] grands maîtres. Considérez-les comme des modèles à imiter et comme des rivaux à combattre.” Sir Joshua Reynolds, Discours sur l’Art, 1779.

Né dans une famille modeste de Londres, William Yurner est un pur produit de la Royal Academy of Arts où les artistes apprenaient en copiant les grands maîtres. L’exposition “Turner et ses peintres” montre de quelles sources l’artiste s’est inspiré en donnant à voir ses copies et sublimations à côté des tableaux de maîtres classiques  ou de ceux de ses contemporains qu’il a su surpasser. Puis en évoquant la “Turner Gallery”, salle où Turner reconnu exposait ses peintres préférés souligne, les commissaires de l’exposition montrent la fidélité de la reconnaissance et de l’admiration de William Turner pour ses maîtres. Vu sous ce jour nouveau, le sublime des paysages turneriens prennent de nouveaux reliefs, et l’on découvre également certains portraits ou scènes mythologiques inspirés au peintre par Raphaël ou Titien. Plus qu’une simple rétrospective ou exhibition des trésors de la Tate (comme avait pu l’être par exemple l’exposition Turner du Metropolitan Museum de New-York à l’automne 2008), “Turner et ses peintres” est une réflexion sur les engendrements et les influences en peinture.

Intitulée “Un apprentissage britannique”, la première salle découvre un jeune Turner connu pour ses talents d’aquarelliste, et sa préoccupation, ainsi que sa capacité, à s’inspirer de certains de ses pairs, comme son ami Thomas Girtin, pour les surpasser. La deuxième salle commence avec la consécration : l’élection comme membre associé à la Royal Academy en 1899, ainsi que l’impact de la première visite de Turner au Louvre en 1802, sur son œuvre. Le carnet de dessins pris par Turner dans les galeries du Louvres est particulièrement touchant. On comprend combien Poussin, Savator Rossa,  et surtout le Lorrain qui lui arrache des larmes, ont modifié la manière de peindre des paysages de l ‘aquarelliste passés à l’huile.

Adaptant  la mode vaporeuse anglaise le classicisme français, Turner adapte par exemple en 1805 “L’hiver ou le déluge” de Nicolas Poussin (1660-1664) et il modifie à peine dans “Appulia à la recherche d’Appulus” (1814) le “Paysage avec Jacob,Laban et ses filles” du Lorrain (1654). Enfin, inspirés du Titien, la “Sainte famille” ou “Venus et Adonis”, deux toiles très éloignées des paysages classiques de Turner montrent des visages  éblouissants. Il n’y a pas que le Louvre qui fait de l’effet à Turner lors de son premier voyage à Paris, et la troisième salle de l’exposition montre comment le “salon de 1802” a nourri la réflexion de Turner sur la perspective.

C’est seulement à la quatrième section de l’exposition “Les ressources du Nord” qu’apparaît le thème canonique de l’œuvre de Turner : la question de la lumière à travers sa passion pour Rembrandt (ne manquez pas la Jessica plus rembrandtienne que Shakespearienne peinte par Turner en 1830).

Dans la salle suivante “Le culte de l’artiste”, les influences d’artistes aussi divers que Watteau, Raphaël, Canaletto, et Ruysdae! sont évoquées. A tous ces inspirateurs, Turner a rendu hommage dans la galerie qui jouxtait son atelier de la 64 Harley Street et où il exposait ses toiles. Celle-ci et sa lumière venue du plafond sont partiellement reconstituées au sein du Grand Palais. La sixième salle “L’inspiration sublime” évoque  la poursuite du “sublime” par les artistes de la génération de Turner. Bien avant Kant, cette notion de sublime avait été conceptualisée par Edmund Burke en 1757 en opposition à l’harmonie du beau. Ainsi, Turner imprime sur ses paysages blancs et gris d’avalanches toute l’émotion de la catastrophe.

Partant du postulat que pour un contemporain de Turner, voir son tableau exposé à côté d’une œuvre du peintre “est aussi préjudiciable que le voisinage d’une fenêtre ouverte”, la section 7 “Expositions et compétitions”  montre la férocité de la concurrence, Turner n’hésitant pas à faire son cabot en “finissant” ses toiles en public sur le lieu de l’exposition. Enfin, la dernière grande salle “Turner et la postérité de sa peinture” prouve la durée de l’impact du Lorrain sur un Turner vieillissant et endeuillé. La section comprend des grandes toiles magistrales de Turner, comme le déclin de l’Empire Carthaginois, ainsi que les dernières toiles brouillées de soleils couchants et délicieusement inachevées  (“Solitude”, “Paysage avec une rivière”.

Turner repose dans la cathédrale St-Paul de Londres et si ses plus grands chefs d’œuvres sont répartis entre la National Gallery et la Tate,  l’exposition “Turner et ses maîtres” prouve bien qu’au Louvre aussi on détient certaines clé pour comprendre la magie de ses toiles.

La programmation culturelle autour de l’exposition”Turner et ses maîtres” prévoit des visites, des conférences, des concerts et aussi des projections de films inspirés par Turner comme “meurtre dans un jardin anglais” de Peter Greenaway. Pour en savoir plus, cliquez ici.

Pour en savoir plus sur Turner, lire notre critique du documentaire d’Alain Jaubert.

“Turner et ses maîtres” jusqu’au 24 mai 2010, Grand Palais, 3, av. du Général Eisenhower, Paris 8e (entrée square Jean Perrin), m° Champs Elysées Clemenceau, ven-lun 9h-22h, mar 9h-14h, mer 10h-22h, jeu 10h-20h, 11 euros (TR 8 euros).

Crédits : Rmn & Tate Photography

Christian Boltanski : Mausolée de chiffon et de feraille à Monumenta

Mercredi 13 janvier 2010

Scène étrange ce mardi matin au vernissage presse de Monumenta. Comme vous l’avez peut-être compris je me faisais une joie, mais journée très chargée, trop. Malade le lendemain. Je suis arrivée un peu trard au vernissage. Ai marché parmi les chiffons pour voir les trois installations. CB ne s’était pas trop foulé,; minimum syndical attendu. Mais je me sentais bien dans son univers. J’ai donc décidé de m’asseoir sur un banc, tranquille entre deux barbelé pour lire le dossier de presse, avant de filer écrire l’article au bureau pour enchaîner sur le reste de mes activités. D’après l’atriste on devait se sentir en enfer, oppressé, pressé de revenir à la vie dans ce décor. Et moi je m’y posais pour lire, presque chez moi… Troublant….

Du 13 au 21 février, Christian Boltanski prend la suite de Anselm Kiefer et Richard Serrat en organisant l’espace de la nef du Grand Palais pour Monumenta 2010. Installation spécialement réalisée pour l’occasion, “Personnes”  est une vanité contemporaine.  Sculptée à grands renforts de métal, de chiffons et de battements de cœur, la symphonie architecturale que propose Boltanski se veut oppressante pour mieux rendre le visiteur à la vie.

“Quand je travaille au Grand Palais, j’ai la sensation de réaliser un opéra, avec cette différence près que l’architecture remplace la musique. L’œuvre est une scénographie”. C.B.

monumenta Boltanski

A l’entrée de Monumenta, Christian Boltanski a mis un mur. Le visiteur tombe directement sur de longs casiers de métal rouillés portant des numéros et surmontés des fameuses lampes de bibliothèque que Boltanski utilise depuis si longtemps dans ses œuvres. Il faut donc contourner ce massif écrin d’archives pour entrer dans le vif de “Personnes”.

monumenta christian boltanski

Derrière, sur trois rangées et s’étalant sous toute la nef du grand Palais, des vêtements sont étalés, proprement rangés en 25 carrées délimités par des poteaux de fer livrant la mélodie mécanique des battements de cœur humains du monde entier. Ceux-ci font partie d’un ancien projet du plasticien : “Les archives du cœur”. Chacun des carrés de fripes est surmonté d’un néon tenu à à peine un mètre du sol par des barbelés. Ce vaste champ de tissus et de fer est très ambivalent puisqu’il peut dégager une sérénité de jardin japonais, mais aussi faire grincer les oreilles et les nerfs sans aucune transcendance possible, comme un spectacle de Buto.

monumenta christian Boltanski

Enfin, derrière ce champ impossible, Boltanski a placé une montagne de vêtements usagés, brassés par une grue qui descend sa pince pour en hisser une partie jusque sous la voute, laissant quelques pulls tomber en route, avant relâcher brusquement sa proie molle qui revient s’éparpiller au sommet de la montagne.

boltanski Monumenta

L’ensemble de ces trois installations constituant “Personnes” sent la mort. L’artiste évoque d’ailleurs l’entrée DANS son œuvre comme une marche dans les cercles de l’enfer. Aucun nom, aucun visage ne vient parler humainement aux visiteurs qui gravitent entre le mur, la montagne et les champs, comme une horde de fourmis sans mémoire. Il n’y a plus vraiment dans ce travail de Boltanski la vieille volonté de lier nombre et individus. Et il n’y a plus non plus de célébration des morts. Juste un bal de morts-vivants. Perdu dans la masse et donc dans le nombre, le promeneur est ramené à sa mort qui vient, et rejoint Christian Boltanski à ce point où “on a le sentiment de traverser en permanence un champ de mines, on voit les autres mourir autour de soi, alors que, sans raison, on reste, jusqu’au moment où l’on sautera à son tour”.

L’absurde sentiment de sursis n’empêche pas Boltanski de continuer son œuvre au sein même de Monumenta puisque, en coulisses, vous pouvez aller faire enregistrer les battements de votre cœur, à ce qui semble être l’infirmerie de l’exposition. Et laisser l’emprunte de votre vie parmi les milliers d’autres recueillies depuis 2005 par le plasticien et archivées sur l’île japonaise de Tashima. Le processus est bureaucratique, clinique : vous prenez un ticket, vous vous asseyez en lisant un magazine sur Boktanski ou vous retournez faire un tour dans le mausolée. Puis lorsque votre tour vient, vous pouvez récupérer une copie de votre battement de coeur.

Mais, si ni les vivants  ni les morts ne comptent plus, et si Boktanski sculpte son public même dans “Personnes” jusqu’à le rendre sans visage, survivant, on peut se demander à quoi sert   tout cet édifice de mémoire de souvenir et de lutte contre le temps et l’oubli.

Une autre scénographie de Boltanski, “Après”, est à voir à partir du 14 janvierb  au MAC/VAL, en parallèle de Monumenta. Plus d’informations ici.

Par ailleurs de nombreuses conférences et tables rondes sont organisées pendant toute la durée de Monumenta 2010. Mercredi 13 janvier, la commissaire de l’exposition Catherine Grenier participera à la table-ronde “Christian Boltanski vu par…”, et le 6 février, le compositeur Franck Krawczyk propose une création réalisée pour “Personnes”, “Polvere”. Cliquez-ici pour voir toute la programmation autour de Monumenta.

Enfin, Arte Video a sorti un documentaire,“Les vies possibles de Christian Boltanski”,qui passe le 18 janvier sur arte.

Pour en savoir plus sur Christian Boltanski, lire notre article.

Monumenta 2010, Christian Boltanski : Personnes”, du 13 janvier au 21  février, Nef du Grand Palais, Porte principale, Avenue Winston Churchill, Paris 8e, m° Champs-Elysées Clemenceau, tljs sauf mardi, lun, mer, 10h-19h, jeu, ven, sam, dim, 10h-22h, 4 euros (TR : 2 euros).

Il y a cent ans… les inondations de janvier 1910, Paris se rappelle

Mercredi 13 janvier 2010

Impressionnante la grande crue de la Seine a transformé Paris en Venise du Nord de janvier à Mars 1910. Si la Seine a toujours débordé à travers les âges, la photographie  a permis d’immortaliser pour la première fois les inondations de 1910… dont le record de crue de 8m50 d’eau sous le pont de la Tournelle n’a, depuis, jamais été dépassé. Plusieurs expositions montrent les films et les photos du Paris de 1910 sous les eaux.

Rue de Seine. Courtesy Editions du Mécène
Rue de Seine. Courtesy Editions du Mécène

Amorcée mi-janvier la grande crue de 1910 a provoqué des dégâts estimés à 400 millions de francs or. Dès le 17 janvier, les inondations s’annoncent terrible et le 20 la navigation est interrompue dans la capitale. ce n’est que le 28 janvier que le niveau de la Seine cesse de monter, laissant encore Paris plus d’un mois sous les eaux. 100 ans après, plusieurs expositions permettent de voir les rues de Paris transformées en canaux, et les clichés montrent comment les parisiens se sont unis pour faire face aux flots.

– Une grande exposition virtuelle permet de voir sur Internet des photographies de l’époque. Et les archives de l’INA permettent de prendre la mesure des dégâts.

– La galerie des bibliothèques de Paris propose une exposition “Paris inondé”, qui permet de voir 200 photos, cartes postales, plans de Paris … pendant la crue. Ainsi que plusieurs films d’époque. Vendredi 29 janvier, un table-ronde thématique sur “Rencontre Paris inondé de 1910 à demain ? ” aura lieu dans la salle de lecture de la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (24, rue Pavée Paris 4e) sous la direction du professeur d’Histoire américain Jeffrey H. Jackson (entrée libre).

Crédits photo : BHVP / G. Leyris

Crédits photo : BHVP / G. Leyris

Paris inondé 1910“, jusqu’au 28 mars 2010, mar-dim 13h-19h, nocturne le jeudi jusqu’à 21h, Galerie des bibliothèques, 22, rue Malher Paris 4e, M° Saint-Paul, 4 euros (TR 2 euros).

– Le pavillon d’eau pose également la question de “La grande crue de 1910 et aujourd’hui ?”, montrant quelles mesures de protection ont été mises en places contre les débordements de la Seine au XX e siècle.
“La grande crue de 1910 et aujourd’hui ?”, jusqu’au 17 avril, Pavillon de l’eau, 77 avenue de Versailles , Paris 16e, RER C Javel ou m° Pont Mirabeau, lun-ven 10h-18h, sam jusqu’à 19h.

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– Enfin, le Louvre des Antiquaires propose de parcourir les divers quartiers de Paris inondés, d’après les photographies d’époques réunies dès janvier 1910 par le Journal des Débats, grand quotidien conservateur né pendant la révolution et disparu après la Seconde Guerre.
“C’était il y a 100 ans… La grande crue de 1910, Paris inondé vu par le Journal des Débats”, jusqu’au 7 mars, Louvre des Antiquaires, salle d’exposition 1ier étage, mar-dim 11h-19h, 2 Place du Palais Royal, Paris 1ier, M° Palais Royal, entrée libre.

La jeune création éclate au 104

Jeudi 5 novembre 2009

Héritière de “Jeune peinture” créée par Paul Rebeyrolle en 1949, “Jeune création” est une association d’artistes qui soutient et promeut de nouveaux talents qu’elle sélectionne… et les expose une fois par an. Cette année 60 artistes internationaux sont à découvrir au 104, avant le 8 novembre.

jeune création 104 photo exclusive

Ghyslain Bertholon, Deupatosaurus

Démocratique (les dossiers candidats sont élus lors d’un vote à main levée), mais néanmoins exigeante (seuls 6 % des candidats sont retenus), internationale, dynamique et privilégiant des supports inventifs (installations,  mais aussi sculptures, peintures et dessins à prix abordables et proposant cette année dans la “black box” de découvrir des vidéos) la jeune création menée d’une main de maître par sa jeune commissaire Lorraine Hussenot, “Jeune création” a tout pour plaire. Les artistes sont souvent présents devant leurs œuvres et ne demandent qu’à en parler.

On est accueilli par un sympathique dinosaure, le Deuptaurus de Ghislain Bertholon et découvre dans les entrailles des anciennes écuries du 104 de nombreux jeunes talents, notamment venus d’Europe de l’Est (la tchèque Markete Koreckova, ou la polonaise Agata Nowosielska).

Marketa Koreckova, 3 fois à propos de l'amour

Marketa Koreckova, 3 fois à propos de l'amour

Parmi nos coups de cœur :

– le happening du suisse Enrico Centonze qui a recouvert la place du Bundestag de Berlin de 150 drapeaux dorés en 1 heure.

Jeune création 2009 104 Enrico Centonze

– la réflexion studieuse d’Arnaud Bergeret sur la reproduction de l’œuvre (l’atiste a recopié lui-même à la main tout un volume de Artpress, sans les images  dans “Ca va être long et difficile”, 2008).

bergeret Jeune création 2009

– la tente lumineuse et méditative de la coréenne Taegon Kim.

Taegon Kim Jeune création 2009 104

– et le remake Tinguely /Saint Phalle joué par les lyonnais Fabien Villon et Christel Montury lorsqu’ils entrecroisent leurs oeuvres (respectivement Axis Mundi, une compression de phares de voitures, et Monstrum, qui réfléchit sur l’effet de photoshop sur le corps des femmes).

Jeune création 2009 104

Christel Montury, Monstrum

Des happenings sont prévus lors de cette édition 2009 de “Jeune création”, avec notamment une performance de la “spécialiste du déséquilibre in situ”, Sarah Trouche, un show de la compagnie THEL Danse de Gabriel Hernandez, et une présentation du travail de 6 artistes par la commissaire, Lorraine Hussenot. Pour voir l’ensemble du programme, cliquez ici.

Sarah Trouche

Sarah Trouche

Sur une idée de l’invité spécial de Jeune Création, le public pourra lui-même participer à l’Art, en métamorphosant certaines pièces du projet de l’artiste, “Defacing project”.

Pablo Gonzales Trejo, Defacing project

Pablo Gonzales Trejo, Defacing project

Deux prix remis par un jury constitué d’artistes, de galeristes et de philosophes, doivent être remis : le prix jeunes création et le prix Boesner, et avec eux, une aide financière à la création.

Jeune création 2009, jusqu’au 8 novembre, 11h-20h, nocturnes vendredi et samedi jusqu’à 23h, 104, 104 rue d’Aubervilliers/ 5 rue Curial, Paris 19e, m° Stalingrad ou Riquet, 5 euros (TR. 3 euros).

Le + :  Très bien fait, le site de l’évènement met vraiment en valeurs les artistes.

Expo Benjamin Fondane au Mémorial de la Shoah

Vendredi 30 octobre 2009

A l’occasion d’une belle exposition littéraire et dont l’entrée et libre, le mémorial de la Shoah invite à découvrir le monde de Benjamin Fondane, poète et philosophe roumain arrivé à Paris au début des années 1920, très actif dans les milieux d’avant-garde, aux marges du surréalisme, et dont la préface en prose au recueil “L’exode”  (1942) pourrait servir de testament à tout poète juif assassiné.

Un livre n’est pas seulement une attitude, c’est une preuve d’amour.”
“Toute activité humaine, et fût-ce celle du commerce, est un cercle artificiel que l’on a tracé autour de soi, avec le ferme dessein de ne pas le franchir. Oui l’anarchie est chose réelle, mais non point ‘naturelle’ à l’homme pressé qu’il est de trouver au plus vite un cercle et de s’y tenir.”
B.F.

Dans une petite rue près de la place monge, à deux pas de la maison où habitait Hemingway, on trouve une plaque dédiée à Benjamin Fondane, déporté depuis son appartement qu’il n’a pas voulu quitter et assassiné à Auschwitz avec sa sœur.  Jusqu’à aujourd’hui le public parisien a peu entendu parler de Fondane, dont l”héritage est gardé par une  société d’étude réunissant derrière sa biographe, Monique Jutrin, un cercle de mordus de sa poésie “irrésignée”. Que ces fans érudits permettent à un large public de découvrir son œuvre et sa vie est donc une grande et bonne nouvelle.

Portrait de Benjamin Fondane par Man Ray

Portrait de Benjamin Fondane par Man Ray

Benjamin Wechsler (c’est son nom originel) émigre volontairement de Jassy (Moldavie) vers Paris où il arrive en 1923, à l’âge de 25 ans, avec un nom de plume Fundoianu (nom d’un domaine proche du lieu où habitaient ses grands-parents) qu’il francise en « Fondane ». Il a déjà commencé à publier des poèmes  dès l’âge de 14 ans, et a fondé en Roumanie le théâtre Insula avec sa sœur actrice et son beau-frère qui deviendra plus tard le directeur du Théâtre des Champs-Elysées. Il est envoyé en France comme correspondant de la revue roumaine Integral.

Fondane aime la langue française avec violence et consacre à la fin de sa vie deux essais aux poètes Rimbaud et Baudelaire. Fasciné par la capitale française, il dit n’avoir pas écrit un seul poème lors de ses quatre premières années à Paris. L’émigré roumain fréquente les avant-gardes dadas (et a laissé une correspondance avec Tristan Tzara) et surréalistes; mais ces derniers le déçoivent et il demeure proche de surréalistes marginaux comme le photographe Man Ray qui illustre ses ciné-poèmes, le poète Joë Bousquet, et le peintre Victor Brauner, un autre exilé roumain .

On peut découvrir le superbe portrait de Fondane par Brauner à l’epxosition du mémorial :

Touche à tout génial, Benjamin Fondane travaille pour les studios Paramount comme scénariste et participe au film de Kirsanoff  tiré d’un roman de Ramuz : “Rapt”. Lors de son deuxième voyage en Argentine, en 1936, sur une invitation de Victoria Ocampo, il réalise son propre film : “Tararira”.

Si Fondane est aujourd’hui principalement connu comme un poète ayant transposé la figure d’Ulysse à l’errance juive à travers ses recueils”Ulysse” (1933), “Titanic” (1937), “Le mal des fantômes” et “L’exode” (tous deux posthumes), il a aussi été philosophe. En tant que disciple de Léon Chestov, Fondane s’est posé la question omniprésente des dangers de la raison et du “désenchantement du monde”, ce qu’il a évoqué dans ses essais, “L’homme devant l’histoire”, “La conscience malheureuse”, “Le lundi existentiel et le dimanche de l’histoire”, et “Baudelaire ou l’experience du gouffre” où Fondane dévoile la “soudaine vision que (ses) convictions les plus fermes, les plus assurées – étaient sans fondement et qu’il fallait, sans le pouvoir cependant, renoncer à elles, qu’on était soumis à une espèce d’envoûtement et que le monde est inexplicable sans l’hypothèse de cet envoûtement”.

Non contente de familiariser son public avec l’oeuvre de Fondane, l’exposition permet de mieux connaître les cercles dans lesquels il évoluait, et tout visiteur féru d’histoire intellectuelle et artistique de l’Entre-deux-guerre se trouve en terrain familier.

Benjamin Fondane, poète, essayiste, cinéaste et philosophe“, jusqu’au 31 janvier, Mémorial de la Shoah, tljs sauf samedi 10h-18h, 17, rue Geoffroy l’Asnier, Paris 4e, m° Saint-Paul ou Pont Marie, entrée livre. Visites guidées gratuites les 5 novembre, 19 novembre, et 17 décembre à 19h30.

Une journée de lectures de poèmes de Fondane par Daniel Mesguich en présence de l’immense Claude Vigée est prévue le 3 décembre. Réservez vos places en ligne.

A la librairie du musée, foncez acheter la version Verdier poche du recueil “Le mal des fantômes” (qui contient aussi Ulysse et l’exode) et est préfacée par Henri Meschonnic.

Enfin, à partir du 10 novembre, le mémorial propose une exposition sur Hélène Berr.

“Oui, j’ai été un homme comme les autres hommes,
nourri de pain, de rêve, de désespoir. Eh oui,
j’ai aimé, j’ai pleuré, j’ai haï, j’ai souffert,
j’ai acheté des fleurs et je n’ai pas toujours
payé mon terme.

[…]

J’ai lu comme vous tous les journaux tous les bouquins,
et je n’ai rien compris au monde
et je n’ai rien compris à l’homme,
bien qu’il me soit souvent arrivé d’affirmer le contraire.
Et quand la mort, la mort est venue, peut-être
ai-je prétendu savoir ce qu’elle était mais vrai,
je puis vous le dire à cette heure,
elle est entrée toute en mes yeux étonnés,
étonnés de si peu comprendre –
¬avez-vous mieux compris que moi?

Et pourtant, non!
je n’étais pas un homme comme vous.
Vous n’êtes pas nés sur les routes,
personne n’a jeté à l’égout vos petits
comme des chats encore sans yeux,
vous n’avez pas erré de cité en cité
traqués par les polices,
vous n’avez pas connu les désastres à l’aube,
les wagons de bestiaux
et le sanglot amer de l’humiliation,
accusés d’un délit que vous n’avez pas fait,
d’un meurtre dont il manque encore le cadavre,
changeant de nom et de visage,
pour ne pas emporter un nom qu’on a hué
un visage qui avait servi à tout le monde
de crachoir!

Un jour viendra, sans doute, quand le poème lu
se trouvera devant vos yeux. Il ne demande
rien! Oubliez-le, oubliez-le! Ce n’est
qu’un cri, qu’on ne peut pas mettre dans un poème
parfait, avais-je donc le temps de le finir?
Mais quand vous foulerez ce bouquet d’orties
qui avait été moi, dans un autre siècle,
en une histoire qui vous sera périmée,
souvenez-vous seulement que j’étais innocent
et que, tout comme vous, mortels de ce jour-là,
j’avais eu, moi aussi, un visage marqué
par la colère, par la pitié et la joie,

un visage d’homme, tout simplement!”

Préface en Prose, 1942

le monument Soulages à Beaubourg

Jeudi 15 octobre 2009

Mardi, le centre pompidou vernissait sa grande rétrospective sur plus de 60 ans du travail de Pierre Soulages en présence du maître qui a lui même scénographié la naissance, en 1979, de l'”outre-noir”, cette lumière créée par l’œuvre, et l’artiste et le spectateurs, communiant dans la fascination pour la mère de toutes les valeurs.

“J’estime que cette couleur violente incite à l’intériorisation. Mon instrument n’était plus le noir, mais cette lumière secrète venue du noir. D’autant plus intense dans ses effets qu’elle émane de la plus grande absence de lumière”.

En cents toiles l’exposition “Soulages, peintre du noir et de la lumière”,  revient sur soixante ans de peinture d’un des plus grands peintres abstraits français. Elle commence classiquement et chronologiquement, et nous présente des œuvres moins connues de Soulages. Sans titre, elles sont toujours nommées par leur date de création et leurs dimensions.

Parmi les premières oeuvres, les plus étonnantes sont l’affiche pour la première exposition d’art abstrait  en Allemagne “Grosse Asutellung Französischer Abstrakter Malerei” où l’une des peintures au brous de noix de est reproduite. Cette technique, inventée par Soulages, donne des couleurs chaudes aux dessins et à la grande toile conservée où l’artiste l’utilise. On découvre également ses décors de théâtre et ses superbes goudrons sur des plaques de verres déjà écornées, abîmées, éclatées (fin des années 1940).

Classiques et très connus, les tableaux aux grandes dimensions des années 1960 donnent du relief à la peinture noir par des grands coups de pinceaux de couleurs. Ceux de la fin de la décennie interrogent le contraste entre le noir e tle blanc, et comment la lumière perce la toile, dans la tension des deux valeurs et selon l’épaisseur que Soulages donne à son noir (l’artiste épaissit parfois la pâte jusqu’à la rendre sculpture de Vinyle).

Puis le visiteur tombe sur une salle aux murs noirs. Trois toiles entièrement noires datant des années 1990 y sont présentée  loin du mur, suspendues au sol et au plafond par des fils de plombs. Soulages a décidé de nous faire entrer dans l’expérience de ce qu’il appelle l'”outre-noir” par des toiles plus tardives et non par l’origine. Toute la deuxième moitié de l’exposition quitte alors le chronologique pour se transmuer en ballet de noir. Des toiles uniques d’abord, où la lumière est finement sculptée dans le noir, puis après une petite salle où l’on peut voir un documentaire sur l’artiste, à la veille de son 90 ème anniversaire et où l’on comprend quelle solitude, quelle introspection et quelle technique également il a fallu à Soulages pour travailler depuis 30 ans sur la lumière venue du noir (il créé ses propres outils), l’on rencontre dans la dernière grande  salle les “polyptiques”, où l’éclat de la lumière noire est encore renforcé par le contraste de traits graphiques que suggère la juxtaposition de plusieurs toiles côte à côte où l’une en dessous de l’autre.

Soulages était lui-même présent lors du vernissage presse de l’exposition, mardi dernier, et répondait avec son  sérieux et sa générosité habituels aux questions des journalistes. Mais aussi claires soient sa conception de la lumière pas forcément sacrée qui se dégage du noir, et sa vision du travail en commun de l’artiste, de l’œuvre et du spectateur pour produire l’impression, même le maître n’explique pas la puissance de ses toiles. Ceux et celles qui vont à cette rétrospective seront déçues de ne pas mieux comprendre l’art abstrait de Soulages. Il n’y a pas ou peu d’explications, juste quelques citations de l’artiste, et surtout les œuvres. Mais y a t-il quelque chose à comprendre? Peut-être pas. Le charme des peintures  opère et c’est tout ce qu’il faut percevoir. On sort de l’exposition à la fois admiratif, méditatif, et apaisé.

Soulages, peintre du noir et de la lumière“, Centre Pompidou, du 14 octobre 2009 au 8 mars 2010 , de 11h00 – 21h00 jusqu’à 23 h le jeudi, fermé le mardi, et le 1er mai, Tarif plein 12€ ou 10€ selon période / tarif réduit 9€ ou 8 € selon période
Valable le jour même pour une entrée dans tous les espaces d’exposition

L’âge d’or hollandais à la Pinacothèque

Mercredi 7 octobre 2009

Pour fêter sa troisième année, la Pinacothèque de Paris a dévalisé le Rijksmuseum. L’occasion de se goberger de toiles de Rembrandt, mais aussi de découvrir d’autres peintres du XVII e siècle hollandais et d’en apprendre plus sur la vie quotidienne dans la République batave.

rembrandt-Salomé-Rijksmuseum

rembrandt-Salomé-Rijksmuseum

Etirée sur deux étages, l’exposition « l’âge d’or hollandais » est un des moments forts de cette rentrée2009. Le début de l’exposition est l’occasion pour ceux et celles qui le souhaitent d’en savoir plus sur le quotidien du citoyen néerlandais du XVII e siècle. L’exposition souligne la tolérance de la République Pays-Bas (sauf à l’égard des catholiques) qui a lui a valu une forte immigration après la Réforme. Divers groupes protestants et juifs cohabitaient donc allégrement dans un pays déjà très urbain et très commerçant. On découvre de beaux objets de la vie de tous les jours : de fins gobelets de verre, des chandeliers, des nappes qui ressemblent à des tapis, et une tablette sertie de nacre créée par Dieck van Rijswijck…

Paulus Potter- chevaux

Paulus Potter- chevaux

De très belles esquisses de chevaux signées Paulus von Potter sont aussi présentées. On peut également voir quelques placides paysages hollandais, peints notamment par Jacob van Ruisdael, mais aussi  par son oncle, Salomon. En descendant les escaliers on se retrouve plongé dans l’atmosphère urbaine des multiples villes marchandes de Hollande, et un petit morceau de l’exposition nous rappelle tout de même que la république était aussi un empire colonial.

Enfin, les chefs d’œuvres sont exposés en bout de course, toujours juxtaposés de manière thématique à côté de tableaux moins grandioses, de Franz Hals, Adrian van Ostade, et Emmanuel de Witte, mais qui témoignent de scènes de la vie quotidienne de l’époque.

Rembrant-Portrait de son fil- Rijksmuseum

Rembrant-Portrait de son fil- Rijksmuseum

Les amateurs de Rembrandt ne seront pas déçus, puisque la pinacothèque expose plusieurs toiles du maître, toutes venues du Rijksmuseum. Le portrait de son fils, Titus, est toujours aussi bouleversant (1666), sa « Salomé » (1640) majestueuse, et « Le reniement de Saint Pierre » (1660) pétri d’une grâce profonde et obscure.

La dernière partie de l’exposition montre la « Lettre d’amour » (1669) de Vermeer  aux côtés d’autres scènes d’intérieur.

Vermeer-Lettre damour-Rijksmuseum

Vermeer-Lettre d'amour-Rijksmuseum

Un beau voyage dans le temps et vers un pays à la fois si proche et si exotique.

Jusqu’au 7 février 2009, Pinacothèque de Paris, 28, place de la Madeleine, Paris 8e, m° madeleine, tljrs 10h30-18h, nocturnes tous les premiers mercredis du mois jusqu’à 21h00, 7 à 9 euros.

Titien, Tintoret, Véronèse au Louvre : Rivalités sans rivet au Louvre

Mercredi 16 septembre 2009

La grande exposition de la rentrée au Louvre porte sur la seconde moitié du XVI siècle vénitien et se propose de nous montrer combien la rivalité entre le maître incontesté, Le Titien, et les deux étoiles montantes, Véronèse et Le Tintoret, a contribué à l’éclat des arts lagunaires. Une débauche de grandes toiles venues du monde entier, mais extrêmement mal présentées. Début jeudi 17 septembre.

NOTE : VISUELS A VENIR

«Quand la nature créé un homme éminent en un domaine, elle ne le crée généralement pas seul, mais lui suscite en même temps un rival, afin qu’ils puissent profiter mutuellement de leurs talents et de leur émulation »

Vasari, La vie des meilleurs peintres sculpteurs et architectes, 1568

A partir de demain, 86 toiles des grands vénitiens Titien, Tintoret, et Véronèse, mais aussi Bassano, Palma Le Jeune, et Sustris envahissent le Hall Napoléon du Louvre. Venus des plus grands musées des cinq coins du monde (Boston où l’exposition a originellement été montée, Venise bien sûr, Madrid, St Petersbourg, Washington, Chicago, New-York, Vienne, Berlin, et Rotterdam) et de France (Douai, Bordeaux, Rennes), ces chefs d’œuvres doivent être vus et revus. Oui, mais pas n’importe comment. Et le problème est que le commissaire de l’exposition ne semble pas vraiment avoir pensé à la construire.

L’exposition est brouillonne D’une part elle intègre dans les pointillés de son titre, « Titien, Tintoret, Véronèse… », d’autres artistes de la même époque, comme Bassano, qu’elle expose un peu au hasard. et sans expliquer pourquoi. Dès l’entrée, le thème central de la rivalité est annoncé avec zoom sur  LeTitien, LeTintoret et Bassano au premier plan d’une des toiles majeures du Louvre : Les Noces de Cana de Véronèse (que personne n’a d’ailleurs pris la peine de déplacer du département de la Renaissance Italienne du Louvre au Hall Napoléon). Mais de cette rivalité l’on n’apprend rien, si ce n’est que le Tintoret a triché pour obtenir la charge de peindre l’époustouflante Scuola di San Rocco à Venise lors d’un concours « républicain » en 1564. On a beau nous dire et nous répéter dans les textes qui commentent les œuvres qu’une rivalité saine pousse vers le haut, l’agencement même des toiles n’exprime rien de la compétition des maîtres. Et les surtitres, tous signés par le grand Vasari ne sont d’aucun secours. Quant aux influences, elles apparaissent  vaguement une fois, à travers un accrochage qui encourage à penser que pour peindre sa Lucrèce, (1580) Tintoret s’est inspiré de celle du Titien (1571).

Quant aux grands mots de l’histoire de l’art invoqués comme le maniérisme ou « l’impressionnisme » des dernières toiles de Véronèse, ils ne sont ni expliqués, ni illustrés : on pourrait presque passer à côté du sublime Christ au jardin des oliviers, une des premières œuvres peintes en petite touches vers 1560 par Titien., sans la voir .On regrette  alors amèrement la première grande salle du Prado qui énonce clairement comment la grandeur du Titien vient de son ingéniosité à intégrer la perspective dans ses toiles.

En fait, le vrai problème de l’exposition est qu’elle ne choisit pas vraiment entre un message chronologique et un message thématique. Dans la première salle, elle commence par le chronologique pour nous montrer que, si la première moitié du XVI e siècle vénitien a longuement été traitée – notamment à travers l’exposition « Bellini, Titien, Giorgione », à Vienne et Washington en 2006 – les années 1550-1580 n’en sont pas moins foudroyantes. Puis la suite de l’exposition est thématique mais selon des thèmes mal choisis et vagues : « la femme désirée », « Entre sacré et profane », « Portraits de représentation ». Tant et si bien que l’expo-labyrinthe commence et finit par deux versions similaires de Danae des années 1560 signée Titien. Non seulement on a l’impression de tourner ne rond, mais on sort de l’exposition plus désorienté qu’on y est entré.

Des informations fausses sont mêmes suggérées, notamment dans la thématique « Nocturne sacrée » qui se propose de montrer que le côté nuageux et sombre des paysages religieux vénitiens du Tintoret, Véronèse et du Titien est lié au climat spirituel particulier de la Contre-réforme, préconisant une spiritualité individuelle dans l’obscurité. Or dans la section, un Transport du Christ de Veronèse datant de 1520 est accroché. 1520, c’est-à-dire seulement 21 ans avant l’excommunication de Luther et 22 ans avant le concile de Trente !

Bref, si la grande exposition de la rentrée du Louvre tient ses promesses sur la qualité des toiles, il est bien dommage que leur accrochage ne suive aucune logique historique ou simplement pédagogique. A voir en essayant de comprendre par soi-même, comment Véronèse et le Tintoret ont tenté de percer sous l’influence et aussi dans l’ombre du peintre officiel de la République et également plébiscité par Charles V : Le Titien.

A noter :

-Une salle spéciale des collections permanentes du musée est mise au service d’une expérience interactive où vous pouvez entrer dans La Vierge au lapin du Titien (Aile Richelieu, 2 e étage, salle 17).

– Un cycle de conférence a lieu à l’auditorium sur « Peindre à Venise au XVIe siècle », chaque lundi à 18h30, avec pour la séance inaugurale de Michel Hochmann (EPHE) un exposé sur les styles et techniques du Titien, du Tintoret et de Véronèse, le 28 septembre.

« Titien, Tintoret, Véronèse… Rivalités à Venise », du 17 septembre au 4 janvier, Musée du Louvre, Hall Napoléon, de 9 h à 18 h et jusqu’à 20 h le samedi, nocturnes jusqu’à 22 h les mercredi et vendredi, Tarif pou

Joseph Roth, les années parisiennes d’un juif austro-hongrois

Mardi 21 juillet 2009

Jusqu’au 4 octobre, le Musée d’art et d’histoire et du Judaïsme présente la vie de l’auteur autrichien Joseph Roth pendant ses années d’exil, de l’arrivée des nazis au pouvoir jusqu’à sa mort, dans l’alcool et à Paris en 1939.

Né à Brody (Galicie et à l’époque appartenant à l’Empire Austro-Hongrois), d’une mère juive de l'”est” et d’un père devenu fou dans son enfance et auquel il a inventé mille vies, Joseph Roth part pour Vienne où sa mère le rejoint lors de la déclaration de la Première Guerre. Il vit dans la pauvreté et poursuit des études de Germanistique. Il assiste à l’enterrement de l’Empereur François-Joseph, en 1916, et est envoyé sur le front russe. De retour à Vienne, il abandonne son doctorat pour survivre de la plume de journaliste. Au café Herrenhof, il côtoie Hermann Broch, Franz Werfel, Milena Jesenska…En 1923 Roth déménage à Berlin, où il devient journaliste auprès de la Frankfurter Zeitung ; en 1925, il devient correspondant du journal à Paris. Ses articles sont caustiques et précis. Si la “Toile d’araignée” (1923) est son premier roman, le succès arrive  “La marche Radetsky”, en 1932, une fresque en l’honneur du défunt empire Austro-hongrois. L’on apprend au MAHJ que le critique de la Nouvelle Revue Française, Frédéric Bertaux, préférait le roman au col amidonné de Roth sur le “K und K” à la fresque ironique de Robert Musil, “L’Homme sans qualités”.  Juif dans l’Allemagne de 1933, Roth doit quitter l’Allemagne et oscille entre Paris, Amsterdam, et Ostende.

C’est sur ces années d’exil que l’exposition du MAHJ se concentre, dépeignant la vie de Roth d’hôtel en hôtel, reconstituant son café préféré, le “Tournon”, donnant à entendre son dernier roman, “La légende du Saint buveur”, insistant largement sur l’engagement politique du début des années 1930 contre le nazisme, et présentant ses amis dont les auteurs Stefan Zweig, Soma Morgenstern, Stefan Fingal, le sculpteur Joseph Constantinovksy .

Créée en Autriche par le directeur du Literaturhaus de Vienne, Heinz Lunzer, l’expo “Joseph Roth, L’exil à Paris” permet d’imaginer la vie de l’auteur à travers des extraits de sa riche correspondance. Des éditions originales de ses livres en VF permettent de comprendre comment Roth a été traduit tôt par Blanche Gidon, et comment le public a Français a très vite pu le lire.  L’amour de l’auteur pour la monarchie est évoqué en même temps que ses prises de positions politiques contre le nazisme : “L’écrivain a pour devoir comme tout un chacun de s’engager contre l’inhumanité du monde actuel”, estimait Roth, dès 1934. Mais, transformant l’écrivain-Arlequin en intellectuel engagé, l’exposition manque certaines ambiguïtés absolument fascinantes chez le personnage,  et passe peut-être à côté de sa folie.  Elle évoque à peine son spectaculaire enterrement, où personne ne savait vraiment s’il s’était converti ou pas, si bien que deux services religieux ont eu lieu : un juif et un chrétien.


LA MARCHE DE RADETZKY – Concert Nouvel An 2002
par Koloborder

Joseph Roth, L’exil à Paris, 1933-1939“, jusqu’au 4 octobre, MAHJ, Hôtel de Saint-Aignan, 71, rue du Temple, Paris 3e, m° Rambuteau ou Hôtel de ville,  lun-ven 11h-18h, dim 10h-18h, 6.80 euros (TR : 4,50 euros).

roth-mahj

A noter : Jeudi 24 et vendredi 25 septembre, un colloque international sur  l’exil de Joseph Roth aura lieu  au musée.  Programme ici.

Pour en Savoir plus :

BRONSTEIN, David, Joseph Roth, Biographie, Paris: Seuil, 1994.

MORGENSTERN, Soma, Fuite et fin de Joseph Roth, Paris : Liana Levi, 2003.

TRAVERSO, Enzo, La pensée dispersée, figures de l’exil judéo-allemand, Ed Leo Scheer, 2004