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Opéra : Dans la colonie pénitentiaire de Philip Glass à l’Athénée

Jeudi 8 avril 2010

Après “The Rake’s progress” d’Igor Stravinsky en novembre dernier, le théâtre de l’Athénée propose un autre opéra au livret littéraire : “Dans la colonie pénitentiaire” est une nouvelle de Franz Kafka, mise en musique par le grand Philip Glass et interprété par leQuintette à cordes de l’Opéra national de Lyon. Le résultat est un vrai spectacle total, d’une grande qualité musicale, avec danse, jeu, et une mise en scène convaincante signée Richard Brunel.

Réfléchir sur discipline est à la mode. Hier soir la machine de torture de la colonie pénitentiaire  imaginée par Franz Kafka en 1914 s’est déplacée du musée d’Orsay où elle trône dans l’exposition “Crime et Châtiment”, pour se mettre en mouvement au son des vents polyphoniques de Philip Glass. Et Robert Badinter, à l’origine de l’exposition à Orsay était dans la salle du théâtre Louis Jouvet pour assister à  la première de cette métamorphose. Gommant le fantatsique de l’inquiétante et étrange nouvelle de Kafka pour en donner une lecture proprement politique Glass, Brunel et le librettiste Rudolph Wurlitzer ont mis l’accent sur la neutralité coupable du visiteur de la colonie pénitentiaire. Respectant le tragique “en temps réel” de la nouvelle, l’opéra de chambre recentre la tension sur la cauchemardesque machine de punition inscrivant à la herse et dans le dos de condamnés qui ne savent pas qu’ils ont été jugés ni pourquoi le motif de leur punition. Faisant le lien entre le système de surveillance (les fameuses “sangles” qui tiennent les membres des suppliciés pendant les heures) et le système de biopouvoir totalisant (qui a prise directement sur les corps), cette machine donne à l’injustice l’idéologie (selon Hannah Arendt étymologiquement : la logique d’une idée) qui convient pour que tous l’acceptent même si plus personne ne festoie au spectacle de la machine en marche, comme cela a pu être le cas dans des temps barbares et passés.

En marche la machine de l’opéra l’est tout au long des 16 tableaux composés par Glass: l’orchestre d’instruments à vents se déplace et la machine se construit peu à peu dans une tension presque intenable et envahit toute la scène. Des lambeaux de peau viennent à peine s’interposer entre la torture et le spectateur pour mieux le laisser imaginer la cruauté. Et pourtant, que la cruauté est belle dans ce mouvement inexorable! la musique tonale de Glass, les scènes de danse entre les victimes et les bourreaux, les tours et détours mesurés de la machine, l’anglais si propre des colonisateurs et du visiteur et même le sang final se répandant en volutes viennent envoûter et fasciner le spectateur. Seuls quelques cris et des bruits de radio viennent le déloger de cette douce torpeur au cœur des ténèbres. Les deux voix d’hommes qui se répondent, celle chaude et grave de l’officier et son souci de préservation de la “tradition” (Stephen Owen) et celle plus haute et étonnée du visiteur immaculé qui prend calmement ses notes (Michael Smallwood) participent de cette inquiétante étrangeté du beau là où l’on attend le bruit et la fureur.

On ne peut que saluer bien bas toute l’équipe de cette colonie pénitentiaire pour la qualité exceptionnelle du spectacle, et la gêne qu’elle parvient à créer. Une gêne qui pousse celui qui ne peut pas fuir à longuement réfléchir.

“Dans la Colonie pénitentiaire”, de Philip Glass, livret de Rudolph Wurlitzer d’après la nouvelle de Franz Kafka, mise en scène Richard Brunel, direction du Quintette à cordes de l’Opéra national de Lyon : Philippe Forget, scénographie Anouk Dell’Aiera, avec Stephen Owen, Michael Smallwood, Nicolas Henault, Mathieu Morin-Lebot, Gérald Robert-Tissot, jusqu’au 17 avril, mercredi, jeudi, samedi, 20h, mardi 13 avril, 19h, dimanche 11 avril, 16h, Théâtre de l’Athénée-Louis Jouvet, 7 rue Boudreau, Paris 9e, m° Opéra, 40 € à 18 € (TR dont moins de 30 ans, 31 € à 14 € e le jour même, de 20 € à 9 €).

Crédit photo : Jean-Louis Fernandez.

Le Montana

Vendredi 3 juillet 2009

Jouxtant le “café de Flore” et situé en face du “Bilboquet”, le bar/Club parmi les plus branchés et les plus selects de la capitale, le Montana a ouvert  cette année, suscitant convoitises et enthousiasme.  La porte est une des mieux gardées de Paris, alors intulie de vouloir entrer si vous ne connaissez pas un ami qui y brûle ses nuits.

Très excités de savoir que  la semaine de l’ouverture, Kate Moss allait y boire un verre tous les soirs, les plus jeunes  voient le Montana comme un avatar chic et propre du  “Baron” (puisque le propriétaire est le même: André) mais à Saint-Germain-des-Près. Les moins jeunes espèrent que cette nouvelle énergie redonnera à  la rue Saint-Benoît son titre de ” la rue du jazz à Saint Germain des Près” et imaginent bien Hemingway en train d’y boire un verre.

Comme de nombreux clubs parisiens où il faut être vu, le Montana est un petit espace qui ne contient pas plus d’une quarantaine de personnes.  La foulee st assez mélangée, d’âges et mises diverses, et les femme en général très minces, belles et élégantes.

L’étage est celui du bar et des cocktails, au décor feutré, tables et moquette noires, arabesques blanches art nouveau sur des miroirs sombres, et peu de lumière, où il recommandé de  prendre cet été une piscine de Veuve Cliquot ou éventuellement une piscine pêche. C’est en bas des marches que les habitués dansent dans un décor métallisé.

Le Montana, 28 rue Saint- Benoit, Paris 6e, m° Saint-Germain-des-près

Les montagnes escarpées du nouveau monde

Dimanche 5 avril 2009

New-York calmement et si longtemps est vraiment une expérience très étrange. Je crois que je n’ai jamais été aussi posée et aussi sage depuis le lycée, et pourtant… Au long fleuve tranquille des journées passées devant mon ordinateur et des soirées à lire des vieux rabats-joie sur la sécularisation et le christianisme, des pics vifs de vie viennent me griser. Ces derniers jours j’ai eu le temps d’être follement gravement amoureuse, et d’un instant à l’autre de sauter dans un taxi pour retrouver un “date” assez platonique mais tendre, tout en parlant avec Paris dans la voiture où un homme que j’ai vraiment aimé m’a demandé en mariage “out of the blue” trois ans après. J’ai dîné avec un couple improbable et touchant : lui japonais chrétien, elle juive française avec l’accent du sud dans ma langue, elle ancienne enfant cachée et psy, et lui travaillant dans les assurances. Ils se parlent en anglais, aiment cecilia bartoli, se sont rencontrés sur une île où l’on médite sans électricité et s’aiment depuis des années. Le moment le plus mignon a été quand elle a voulu m’apprendre à remercier en japonais pour le dîner divin et m’a dit de dire “toda raba”… J’ai aussi réussi à être malade, à me réveiller dans des sursauts d’angoisse à 4 heures du matin, à me mépriser de travailler lentement, ce qui n’est pas mon habitude, à me laisser impliquer dans les histoires sentimentales compliquées de trois amis (objectivement, il faut soit que j’arrête de donner des conseils de coeur vu ma situation déplorable, soit que je fasse carrière comme journaliste à cosmo), je me suis mise à cuisiner, j’ai bu du champagne tous les soirs, à la maison et dans des bars branchés du lower east-side et du west-village. J’ai fait la queue pour l’ouverture du très vulgaire “top-shop” de Soho (yaelestunemidinette.com). J’ai essayé des perruques. je suis allée voir Rigoletto qui est vraiment un opéra parfait, aussi loin soit-il de ma sensibilité et j’ai adoré DANSER. J’en sors et c’est fou comme c’est bon, sans aucun “paradis artificiel” et même sans alcool (mais peut-être étais-je shootée aux antibiotiques) de bouger, de sentir son corps et d’y prendre du plaisir. J’aime cela depuis l’enfance et ne le fais pas assez, le tango étant vraiment une discipline. Bref, si je n’arrive pas à briser la cage de verre, au moins avec le recul, je pourrai dire que 1) j’ai vraiment essayé d’être heureuse à la Pascal en restant en repos dans une chambre 2)Que j’ai vu pas mal de morceaux étrange d’un new-york éviscéré par la crise 3) Que j’ai peut-être failli m’oublier dans tout ça.