Sur la couverture, le chanteur apparaît comme “Le Voyageur contemplant une mer de nuages” de Caspar David Friedrich, peintre romantique allemand auquel Choisy consacre un joli titre dans ce nouvel opus. Visuel avant tout, comme une grande étendue d’eau froide, le disque “Rivière de plumes” a des accents de film viscontien transposés en tonalités minérales (“Des flocons dans l’eau”) et qui parfois s’emballe pour devenir western (“Une rose en sémaphore”). Les mots doux-amers, témoignant de l’amour de Louis-Ronan Choisy pour Leonard Cohen, viennent grever l’infini musical d’une blessure nostalgique (“Quand j’irai voir Dieu”, “Le mépris”, “La rencontre”). De Grands horizons et une étendue de neige ouvrent donc le flot de cette “Rivière de plumes”. Mais comme les cailloux rebondissent sur la surface de l’eau bleue en ricochets, la gravité fait du trampoline sur le son résolument pop de certaines chansons (“Copenhague”, “20 000 lieues sous les neiges”). Une ballade mi-aquatique, mi-aérienne, qui apaise et fait sourire.
Louis-Ronan Choisy sera en concert au New Morning, le 26 avril 2010 à Paris.
Plus d’infos et de musique sur le myspace de l’artiste.
Louis-Ronan Choisy, “Rivière de plumes”, Bonzaï, sortie le 26 avril 2010 en digital et le 9 mai 2010 en CD, inclut la BO du film “Le Refuge” de François Ozon.
Alors qu’elle vient de sortir son quatrième album, “Rêve général(e)” (Branco Music, voir notre article). Agnès Bihl était sur la scène de l’Européen pour quatre concerts exceptionnels. La boîte à sorties a eu la chance d’entendre le denier où la salle bondée s’est levée comme un seul homme pour une standing ovation bien méritée. Agnès Bihl est en tournée au Quebec à la fin du mois de février, mais elle revient en Europe en mars !
Après une première partie romantique assurée par la jolie et talentueuse pianiste d’Agnès Bihl, la blonde charismatique est entrée en scène, dans une robe sur pantalon de cuir qui laissait apercevoir son joli décolleté.
Accompagnée par ses trois musiciens, Bihl a laisser couler sa voix gouailleuse dont les accents rappellent souvent le coupant belge de Brel. Le concert était composé principalement de titre de son dernier album, selon une progression qui allait du plus personnel et anecdotique au plus politique et engagé pour culminer, en un énième rappel, dans le “No Flouze blues” slammé par Bihl a capella. Comme Agnès Bihl a voulu faire plus souriant qu’auparavant avec “Rêve générale(e)”, les premières chansons décrivent le parcours du combattant de la célibataire trentenaire : l’amant marié ou se mariant (“A ton mariage”), les hommes qui ne savent pas ce qu’ils veulent, et les rêves de romance (“C’est encore loin l’amour?”) pavent son quotidien. Et quand la femme veut se faire prédatrice, elle est souvent découragée : même l’intello aux yeux verts est en dessous de tout, pensant que cunnilingus est un empereur romain. Du féminisme light à la sex and the city on passe très vite avec Bihl à un vrai engagement politique.
Et l’on jubile lors de sa dénonciation pleine d’humour de l’électeur moyen FN : celui qui accepte les étrangers mais seulement dans l’équipe de France pendant la coupe du monde, qui trouve que porter le voile c’est être trop croyant pour être bien catholique, mais qui n’hésite pas à reléguer sa femme à la cuisine (“Quand on voit c’qu’on voit). Et l’on frémit en entendant le plaidoyer d’une petite fille qui demande à son papa dans ses mots de ne plus la violer (“Touche pas à mon corps”). L’on se sent affreusement honteux de sa propre indifférence à la misère en écoutant le “SDF tango”. Puis l’on entonne avec plaisir “De bouche à Oreille” en ayant un peu l’impression que la solidarité peut encore être révolutionnaire.
Agnès Bihl est une très grande de la chanson. Ses textes sont vraiment très impressionnants : à la fois puissant et extrêmement fin. aie compositrice de chanson réaliste, elle nous plonge dans des petites saynètes qui contiennent des mondes entiers : les contradictions tendres d’une fille de “Treize ans”, comme le dernier amour flamboyant de “Mamie cheveux mauves” qui ne s’est toujours pas résigner à renoncer à “remplir d’étoiles / Un corps qui tremble et tomber mort”, comme le chantait si justement Brel.D”ailleurs, la “Véro” de Bihl n’est-elle pas une “Jeff” au féminin?
Et puis la générosité naturelle d’Agnès Bihl emplit la salle et l’entendre sur scène est une grande expérience de sensibilité et d’empathie. Elle donne le maximum à son public et le bouleverse, et l’on sort le sourire aux lèvres en pensant très fort : “Merci madame Bihl, merci pour l’émotion, pour vos batailles, et pour toute cette nostalgie aussi cque vous savez si bien transmettre”. Et c’est encore un peu hébété qu’on tombe sur elle dans le hall de l’Européen. La femme de scène à peine fatiguée malgré les quatre rappels est déjà prête à dédicacer ses Cds et rencontrer son public.
Agnès Bihl, « Rêve générale(e) » (Branco Music), sortie le 1er février 2010, 13 euros env.
Titre « De bouches à oreilles » téléchargeable gratuitement en se montrant solidaire avec la lutte contre le réchauffement climatique.
Hier soir, la chanteur Pascal Sangla se produisait avec ses musiciens sur la scène de l’Européen. La boîte à sorties y était et s’est offert une “petite pause” de très bonne musique et de fou rire.
Accompagné par son bassiste et son excellent batteur, Pascal Sangla a charmé son public de l’Européen. Son premier disque “Une petite pause” vient de sortir et pourtant la salle est déjà pleine. Et prête à s’exclamer à chacune des pitreries du chanteur, extrêmement spirituel et charismatique. Sur scène, trois types de chansons : les chansons mélancoliques d’aaaamoureux sur jolie mélodie au piano (“141”, “si elle a un problème”) et les chansons qui se moquent des gens (“les papillons blancs” à hurler de rire sur les faux dépressifs, ou encore une parodie en chapeau d’une ballade moyenâgeuse où le Prince et la Bergère ne se voient pas, lui trop myope, elle occupée à tuer un pou. Commentaire :”Comment, vous n’aimez pas le Fôoolk?”). Mais les plus originales sont les chansons “Pfffouit” (geste de Pascal évoquant une patate s’affaissant sur un canapé) : normal, non? qu’un album qui s’appelle “une petite pause” nous enjoigne à nous détendre “assis par terre !
Sur scène, campé derrière son piano, Pascal Sangla est juste époustouflant. Ses doigts se baladent sur le clavier, changeant de ton ou de registre avec une vitesse foudroyante. Et ses compères suivent ce très très grand pianiste pour nous offrir une musique à la composition riche et subtile et dont l’interprétation touche à la maestria. Manquent seulement une voix qui sache toujours où poser ses ailes de papillon, et SURTOUT, des textes. Ceux-ci semblent vraiment en-deçà de la musique et risquent de classer Sangla parmi les sous-Bénabar, alors que son univers poétique et musical est bien trop riche pour cela.
Un immense pianiste, un homme de scène énergique et un chanteur heureux à suivre absolument.
Après avoir triomphé avec son deuxième disque “Rio Baril”, collaboré au dernier album de Clarika “Moi en Mieux”, et après nous avoir offert ses fantaisies littéraires à deux avec l’auteur Arnaud Catherine, Florent Marchet présente “La fiancée”, alias Claire. Casque d’ébène et une voix aussi précise que fragile pour les mots précieux de Marchet, bref un petit côté Frégé/Biolay, en mieux, parce que la fiancée, elle n’a pas fait la star’ Ac.
Les songs de la Fiancée devraient sortir sur des EP de quatre titres au fur et à mesure qu’elle prête son timbre de sirène aux notes de Florent Marchet. Les quatre premiers son déjà sur son myspace et à découvrir avant qu’elle soir mariée.
“La veilleuse” est absolument parfaite pour faire de beaux rêves, tandis que l'”Emploi du moi” a un petit France Gall paumée très frais. Plus gaillarde, la chanson “Tigre Mercenaire” rappelle un peu les croisades amoureuses de Barbara, choeurs en plus, tout comme “Cette autre” qui rappelle les années 1970, et le joli thème littéraire du double.