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Une grande lueur à l’Est : les promesses du Passé à Beaubourg

Vendredi 16 avril 2010

Disposant de la plus grande collection d’art moderne et contemporain d’Europe (plus de 60 000 pièces), le Centre Pompidou a acquis notamment depuis 2005 de nombreuses oeuvres d’artistes d’Europe de l’Est à l’ère soviétique. Une partie de ces collections est présentée de ma nière originale et discontinue jusqu’au 19 juillet à l’espace 315 et permet de découvrir tout un monde à la fois si proche et si lointain.

« À nous, comme à chaque génération précédente, fut accordée une faible force messianique sur laquelle le passé fait valoir une prétention. » Walter Benjamin

“Les promesses du passé” titre son titre des “Thèses sur le concept d’Histoire” de Walter Benjamin. La commissaire de l’exposition, Christine Marcel, et son interlocutrice principale dans la conceptualisation de l’évènement, la directrice du musée d’Art Moderne de Varsovie, Joanna Mytkowska, ont voulu signaler par ce titre qu’elles remettaient en cause l’idée de conitnuum historique, y compris en Histoire de l’art. Elles suggèrent ainsi que les artistes se font “pêcheurs de perles”, en constante création de ruines révolutionnaires, sinon messianiques. C’est donc thématiquement que l’exposition se déploie en étoile et selon la forme d’une sculpture en béton signée Monika Sosnowska. Cette architecture massive jure habilement avec les murs transparents de la galerie Sud.

Le visiteur parcourt alors l’espace selon 7 thématiques qui lui présentent environ 160 oeuvres .
Au-delà des utopies modernistes” s’ouvre sur une photo provoquante et drôle du polonais Cezary Bodzianowski (“Rainbow, Bathroom, Lodz”, 1995). Alexander Uguay (Kazakhstan) présente un film de 2004 ironisant sur la nostalgie de l’ère soviétique. Et l’on découvre que Tirana (Albanie) est un centre d’art contemporain très important avec sa biennale, et que l’un des plus grands artistes albanais n’est autre que le maire de la capitale : Edi Rama.
Fantasmes de totalité” présente notamment les suberbes voyages dans le temps que réalise le photographe hongrois Miklos Erdely, opérant par l’art une révision nostalgique sur les moments heureux et échappés.
Anti-art” révèle à l’Ouest que les artistes de l’Est ont commencé à remettre en cause dès la fin des années 1950 le statut de l’art, notamment à Zagreb, autour du groupe “Gorgona”, et montre les “anti-happenings” du dada slovaque Jullius Koller.
Geste micro-politique, geste poétique” montre notamment le travail du contemporain Roman Ondak (Slovaquie) dont l’oeuvre la plus connue “Mesuring the universe” (2007) a consisté à demander à des gardiens de musée de noter la taille et le nom des visiteurs, afin de confronter cette réalité de chacun à la monumentalité conservatrice des institutions.

Féminin-féministe“, pose la question du genre et nous rappelle que si l’URSS a souvent semblé en avance sur l’Ouest sur la question des femmes, les artistes est-européennes se sont posées, tout comme leurs consoeurs occidentales les mêmes questions confrontant l’apperence et l’intime. Ainsi, quand la croate Sanja Ivekovic pose un bas sur son visage pour le couper au ciseau (“Journal”, 1976, elle oscille entre la violence d’une Nikki de Saint Phalle et le questionnement en mouvement d’une Rebecca Horn se transformant en animal mythique : la Licorne.
Espace public-espace privé” permet, entres autres de découvrir l’artiste mythique et hongrois Tibor Hajas (qui a fait de la prison et est mort à 35 ans dans un accident de voiture), à travers “Tortures de surface” (1978). Il s’agit d’une série de photos aux négatifs brûlés, et qui fait écho à un texte-manifeste. En parallèle, le visteur peut à nouveau voir le travail d’un roumain assez connu des Français puisqu’il habite désormais en France: Mircea Cantor, qui travaille sur le rapport entre le local et le global. Ici, on peut voire “Shadow for a while” (2007), documentaire  sur un drapeau qui brûle.

Enfin, on découvre la performance radicale du célébre caricaturiste roumain, Dan Perjovschi, qui s’est fait tatouer le nom de son pays sur le bras après la chute du mur pour le faire retirer, dix ans après, et s’estimer “libéré de la Roumanie”.
Enfin, dans la dernière section, “L’utopie revisitée”, trône une vidéo de l’artiste israélienne Yaël Bartana, “Mur et tour” (2009, titre en polonais : Mur i Wiedza), un film de 30 minutes tourné à Varsovie et remettant en cause le sionisme à travers le plan éponyme qui prévoyait la construction de 57 kibboutz en 1957.

Au sortir de l’étoile de béton présentant ces oeuvres, le visiteur peut visiter un espace documentaire absolument époustouflant, qui présente d’abord le film émouvant du Lituanien Deimantas Narkevicius “La disparition d’une tribu”, les liens entre les galeries françaises et de l’Est notamment à travers l’influence de Daniel Buren, et enfin, un espace de projection qui ressemble à une cathédrale, et construit par le scultpteur slovène Tobias Putrih, à partir de cartons où l’on pouvait rouler les photos et toiles samizdat…

Le parcours discontinu fait donc faire des bonds dans le temps : des avant-gardes des années 1970 à leurs jeunes dauphins des années 2000, et leurs repercussions sur quelques grands noms de l’art “occidental”. Mais l’effacement des années 1980 et 1990 est troublant, puisque la guerre de Yougoslavie est passée sous silence et on envisage la chute du mur de Berlin qu’à travers des repercussions sismiques tardives. Même si l’on accepte que, tout particulièrement parmi les hommes, l’artiste se tient dans “une brèche dans le temps” et créé dans une temporalité discontinue, il semble que la promesse comme garantie de l’avenir devrait se bâtir sur une vision plus complète de ce passé oublié…
De nombreux artistes est-européens sont présents à Beaubourg pour présenter leurs oeuvres dans le cadre des “Promesses du passé”. Cliquez ici pour voir le programme des conférences et des rencontres.

Les promesses du passé“, jusqu’au 19 juillet 2010, Centre Pompidou, Galeries Sud, espace 315, de 11h00 – 21h00 jusqu’à 23 h le jeudi, fermé le mardi, et le 1er mai, Paris 4e, m° Rambuteau ou Hôtel de Ville, Tarif plein 12€ ou 10€ selon période / tarif réduit 9€ ou 8 € selon période.

Visuels:
1) Jullius Koller- Flying Cultural situation- 1983, collections du centre Pompidou

2) Cezary Bodzianowski- Rainbow, Bathroom, Lodz- 1995 Foksal Gallery Foundation/Monika Chojnicka

3)  Sanja Ivekovic- Journal- 1976

4) Yaël Bartana- Mur et tour- 2009

Le meilleur des mondes : A la découverte des collections du Mudam

Mardi 16 février 2010

Jusqu’au 23 mai, le Mudam (Musée d’Art Moderne Grand Duc Jean) montre une partie de son impressionnante collection d’art contemporain sous forme d’interrogation. Le meilleur des mondes dépeint par Huxley est-il le nôtre ? Les 90 artistes contemporains de l’exposition méritent un petit voyage dans la ville de Luxembourg. Surtout qu’au même moment le casino montre lui aussi une vingtaine de plasticiens contemporains autour du thème original et percutant de nos vies quotidiennes dans son exposition « everyday(s) ».

I. M. Pei Architect Design © Photo : Christian Aschman, 2009

Niché dans le parc des « Trois glands » et bâti en continuité avec les vestiges d’une forteresse du XVIII è siècle, le Mudam est l’un des trois musées d’Europe (avec la pyramide du Louvre et le Deutsches Historisches Museum de Berlin) à avoir été construit par l’immense Ieoh Ming Pei. En Pierre de bourgogne et avec d’immenses espaces en verre laissant filtrer des tombereaux de lumière, il est un écrin parfait pour les 423 œuvres de la collection réunie depuis 1996 au sein du Fonds Culturel National, devenu la Fondation Mudam. Le nouveau directeur du Mudam, Enrico Lunghi, qui a pris le relais de Marie-Claude Beaud en janvier dernier, a décidé de montrer dans l’exposition « le meilleur des mondes » comment la collection du Mudam est « une collection engagée dans le monde ». Suivant le fil rouge de l’illustre distopie écrite par Aldous Huxley en 1932, il propose une sélection de110 œuvres (90 artistes)selon 4 thèmes différents et qui racontent 4 histoires totalement ouvertes à l’interprétation du visiteur. Celui-ci est cependant guidé dans chaque thème par une phrase d’exergue, tirée du livre de Huxley.

A l’entrée du musée, le prologue illuminé de Sylvie Blocher doit mettre en parallèle ce chant politique qu’est l’Internationale et ce chant supposément ludique qu’est le cri des 7 nains de Disney (Hey ho hey ho).

Sylvie Blocher, Men in Pink, 2001, © Photogramme : Sylvie Blocher

« De nos territoires » présente à travers le regard de divers artistes nos contrées imaginaires. Certaines sont de violents champs de batailles (superbe plateau de Jan Fabre), des contrées interdites (les dessins de lieux interdits à la photographie d’Alexandra Croitoru), des interrogations sur la langue comme lieu des images (installation de Pierre Bismuth autour du Livre de la Jungle), ou des labyrinthes interdits (salle dans le noir où des fils barrant le passage sont visibles aux rayons ultraviolets de Claude Levêque).

Jan Fabre, Strategieveld (de Slag bij Gulliver), 1998, © Photo : Christian Mosar

Ne manquez surtout pas la poétique fontaine baroque d’encre chinoise imaginée par Su Mai Tse pour lier des époques  et des contrées que tout éloigne.

« De nos visages » présente une image humaine étrangement inquiétante. Dans « Beijing Holiday », Edgar Honetschläger ballade une poupée de Madame Tchang Kaï-Check en reprenant plan par plan le film Vacances romaines de William Wyler. Quelques clichés récents de Cindy Sherman font grimacer de fascination tandis-que les portraits glacés des femmes vues par Katrin Freisäger semblent désincarnées. D’autres grands noms de la photo sont présents dans cette galerie de portraits distordus, parmi lesquels Thomas Struth, Nan Goldin et Gilbert & George. La thématique se clôture par une série de portraits vidéo de Marina Abramovic.

Cindy Sherman, Untitled # 318 (Mask), 1996, © Photo : Christof Weber

« De nos artifices » interroge notre rapport à la nature. Une grande installation de Kim Sooja fait voler la soie délicate de tissus de Corée. Des photos de Gusrky, Günter Förg, et Thomas Ruff dépeignent nos architectures et nos créations en astres ou désastres, tandis que Bruno Baltzer montre un fête foraine fantôme dans la ville de Luxembourg. La thématique se ferme sur une analogie toute baudrillardienne de Claude Levêque entre Auschwitz et Disneyland.

Enfin, au sous-sol, « De nos vies intérieures, de nos rêves, et de nos cauchemars » ouvre la porte vers un univers neo-surréaliste absolument stupéfiant. La traversée de ce sous-sol se fait comme dans un rêve et on laisse lentement son inconscient entrer en résonance avec la gigantesque sculpture de Tony Craigg, avec les Polders de Tatiana Trouvé et sous forme de rire un peu jaune,  avec les poèmes criant leur inanité en néons de Maurizio Nannucci, avec le faux film gore sur le monde l’art du luxembourgeois Antoine Plum (réalisé pour la biennale de Venise en 2005).

Maurizio Nannucci,The Missing Poem is the Poem, 1969, © Photo : Roman Mensing / www.artdoc.de

Pour ceux et celles qui ne connaissent pas encore le Mudam, l’exposition « le meilleur des mondes » est l’occasion d’aller découvrir le bâtiment de Pei, sa lumière, et aussi les pièces permanentes du musée : la chapelle pas très orthodoxe et totalement neo gothique de Wim Delvoye, ainsi que le portrait du Grand Duc du Luxembourg par Stephan Balkenhol.

Le Mudam propose également des projections sur grand écran d’artistes des collections dans le cadre du cinémudam.

Et 6 artistes viendront parler dans l’enceinte du musée ce printemps (KimSooja, jan fabre, Chad McCail, Gusrky et Ruff & Becher). Plus d’infos ici.

Danica Phelps

Enfin, en ville, le Casino de Luxembourg est un forum d’art qui vernit en même temps que le Mudam et son exposition « everyday(s) » permet de découvrir – en pleine réflexion sur le quotidien -une vingtaine de jeunes artistes. Parmi eux : Valerie Mrejen que nous ne présentons plus au public français, les vidéastes David Bestué & Marc Vives, qui déforment avec humour tous les gestes du quotidien dans leur appartement de Barcelone, Bruno Baltzer (aussi présent au Mudam) qui photographie avec une violence toute œdipienne son père debout dans une piscine vide et qui se remplit au fur et à mesure que les clichés sont pris, et enfin Danica Phelps dont le journal intime explose en esquisses reproduites après ventes et qui interpelle sur l’intime, la reproduction, et l’argent.

« Le meilleur des mondes. Du point de vue de la collection Mudam », jusqu’au 3 mai 2010, Mudam (Musée du Luxembourg, Musée d’Art Moderne Grand Duc Jean , 3 Park Draï Eechelen, L-99, Luxembourg, TGV gare du Nord-Luxembourg (un peu plus de deux heures), mer-ven, 11h-20h, sa-lun 11h-18h, fermé le mardi,5 euros (TR 3 euros), infos : +352 45 37 85-960.

« Everyday(s) », jusqu’au 11 avril 2010, Casino Luxembourg, 41, rue Notre Dame, L-2015, Lun, mer, ven, 11 h 00 – 19 h 00, Jeu, 11 h 00 – 20 h 00, Sam-dim, 11 h 00 – 18 h 00, 4 euros (TR 3 euros), infos : +352 22 50-455.

La jeune création éclate au 104

Jeudi 5 novembre 2009

Héritière de “Jeune peinture” créée par Paul Rebeyrolle en 1949, “Jeune création” est une association d’artistes qui soutient et promeut de nouveaux talents qu’elle sélectionne… et les expose une fois par an. Cette année 60 artistes internationaux sont à découvrir au 104, avant le 8 novembre.

jeune création 104 photo exclusive

Ghyslain Bertholon, Deupatosaurus

Démocratique (les dossiers candidats sont élus lors d’un vote à main levée), mais néanmoins exigeante (seuls 6 % des candidats sont retenus), internationale, dynamique et privilégiant des supports inventifs (installations,  mais aussi sculptures, peintures et dessins à prix abordables et proposant cette année dans la “black box” de découvrir des vidéos) la jeune création menée d’une main de maître par sa jeune commissaire Lorraine Hussenot, “Jeune création” a tout pour plaire. Les artistes sont souvent présents devant leurs œuvres et ne demandent qu’à en parler.

On est accueilli par un sympathique dinosaure, le Deuptaurus de Ghislain Bertholon et découvre dans les entrailles des anciennes écuries du 104 de nombreux jeunes talents, notamment venus d’Europe de l’Est (la tchèque Markete Koreckova, ou la polonaise Agata Nowosielska).

Marketa Koreckova, 3 fois à propos de l'amour

Marketa Koreckova, 3 fois à propos de l'amour

Parmi nos coups de cœur :

– le happening du suisse Enrico Centonze qui a recouvert la place du Bundestag de Berlin de 150 drapeaux dorés en 1 heure.

Jeune création 2009 104 Enrico Centonze

– la réflexion studieuse d’Arnaud Bergeret sur la reproduction de l’œuvre (l’atiste a recopié lui-même à la main tout un volume de Artpress, sans les images  dans “Ca va être long et difficile”, 2008).

bergeret Jeune création 2009

– la tente lumineuse et méditative de la coréenne Taegon Kim.

Taegon Kim Jeune création 2009 104

– et le remake Tinguely /Saint Phalle joué par les lyonnais Fabien Villon et Christel Montury lorsqu’ils entrecroisent leurs oeuvres (respectivement Axis Mundi, une compression de phares de voitures, et Monstrum, qui réfléchit sur l’effet de photoshop sur le corps des femmes).

Jeune création 2009 104

Christel Montury, Monstrum

Des happenings sont prévus lors de cette édition 2009 de “Jeune création”, avec notamment une performance de la “spécialiste du déséquilibre in situ”, Sarah Trouche, un show de la compagnie THEL Danse de Gabriel Hernandez, et une présentation du travail de 6 artistes par la commissaire, Lorraine Hussenot. Pour voir l’ensemble du programme, cliquez ici.

Sarah Trouche

Sarah Trouche

Sur une idée de l’invité spécial de Jeune Création, le public pourra lui-même participer à l’Art, en métamorphosant certaines pièces du projet de l’artiste, “Defacing project”.

Pablo Gonzales Trejo, Defacing project

Pablo Gonzales Trejo, Defacing project

Deux prix remis par un jury constitué d’artistes, de galeristes et de philosophes, doivent être remis : le prix jeunes création et le prix Boesner, et avec eux, une aide financière à la création.

Jeune création 2009, jusqu’au 8 novembre, 11h-20h, nocturnes vendredi et samedi jusqu’à 23h, 104, 104 rue d’Aubervilliers/ 5 rue Curial, Paris 19e, m° Stalingrad ou Riquet, 5 euros (TR. 3 euros).

Le + :  Très bien fait, le site de l’évènement met vraiment en valeurs les artistes.

Art en Capital au Grand Palais

Jeudi 5 novembre 2009

Jusqu’au 9 novembre, Art en Capital relaie la FIAC sous la verrière du Grand Palais. Un rassemblement d’artistes contemporains qui ne font pas toujours de l’art contemporain…

Art en Capital tapis, ambiance, photo exclusive

Parmi les 4 sections d’artistes contemporains réunies dans cette exposition, aux côtés des artistes français, des Comparaisons, et des dessins  figure le célèbre Salon des indépendants, qui existe depuis 1848 et qui a permis à d’immenses maîtres de Van Gogh à , où les impressionnistes se sont illustrés dans les années 1880 et où le critique Louis de Vauxcelles a donné leur nom aux “fauvistes” (Matisse, Vlaminck, Van Dongen Marquet) en 1905.

Art en Capital 2009 Grand palais photo exclusive

Et pourtant au dessus de morceaux de tapis aux couleurs flashantes et discordantes, entassés sur des panneaux très resserrées, les oeuvres (presque toutes des peintures et des dessins) données à voir sont plutôt décevantes.

On ira donc plutôt voir du côté des pavillons internationaux, les dessins du japonais Solère.

Paris Art en Capital Solère Japon

Et du côté des artistes français les peintures très “garoustiennes” et primées par la médaille d’or d’honneur 2008 de la peinture de Yves Degorre.

Art en Capital paris Grand Palais photo exclusive Yves Degorre

Mais cet Art en Capital 2009 est bien décevant, et ne dégage aucune énergie, ni aucune créativité. Si vous cherchez du nouveau, en cette fin de semaine à Paris, allez plutôt voir du côté du 104 et de la “Jeune création”.

Art en Capital, jusqu’au 9 novembre, Grand Palais, 11h-19h30, nocturne jusqu’à 22h jeudi 5, et fermeture à 16h lundi 9, 10 euros (TR. 6 euros).

Expo : Jean-Jacques Lebel à Maison Rouge

Samedi 24 octobre 2009

La fondation Antoine de Galbert vernit ce soir jusqu’à 19h une exposition consacré à un touche à tout ultra savant et très doué. Plasticien protéiforme, Jean-Jacques Lebel prône une révolution individuelle, ce qui ne l’empêche pas de  montrer autour et dans ses compositions  l’immense palimpseste qui les a inspirées.

Jean-Jacques Lebel est  un plasticien qui travaille sur de nombreux supports : tableaux, photos, vidéos, installations, et sculptures. Des happenings l’ont également rendu célèbre dans les années 1960, notamment lors du festival Polyphonix. L’exposition “Soulèvements” met en lumière un touche-à-tout de génie, qui prône une révolution partant de l’individu et se met en scène dans les objets d’art qu’il a collectionnés, si bien qu’on a souvent l’impression d’être devant une grande vitrine multi-référentielle qui fait penser au bureau d’André Masson.

Pour Jean-Jacques Lebel ” toute exposition est une barricade”, si bien qu’il est logique d’entrer  dans “Soulèvements” par un long couloir  dédié aux barricades révolutionnaires. Au plafond de ce couloir, Lebel a suspendu une sculpture de marteaux et de sacs à main. Sur les murs de cette section consacrée à l’art de la barricade, on trouve de nombreuses références à la Commune de Paris et à Mai 68. Et sur les murs, on peut voir des œuvres aussi rares et précieuses qu’un autoportrait de Louise Michel, ou une gravure consacrée à la Commune signée Gustave Doré. Après avoir passé une grande vitrine où des Mickey pop siègent aux côtés de sculptures africaines, on entre dans le panthéon de Lebel. La “poésie visuelle” qui a inspiré l’artiste comprend aussi bien des artistes dada et surréalistes (Duchamp, Picabia, Ghérasim Luca..), que de grands poètes (Hugo, Rimbaud, Baudelaire, dont on peut voir deux esquisses, Apollinaire…), ou encore de superbes masques africains qui ont inspiré à Lebel son art de la métamorphose. A côté d’une statue de la liberté qui tient des tables sur lesquelles est gravé “Rose Selavy”, l’installation “Les avatars de venus” transmue sur quatre  écrans un chef d’œuvre classique de l’histoire de l’art représentant la déesse en un autre. Il y a un mystère dans le passé et se positionner par rapport à ce mystère permet la création. La section l'”énigme”  tourne autour de ce mystère quand elle place le visiteur face à un superbe double portrait de Füsssli, puis face à un Brauner. Elle le prépare doucement à se confronter à la deuxième installation de Lebel : un grand mur fait de douilles d’obus sculptées (souvent dans un style art nouveau) par les poilus de la Première Guerre.

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La salle suivante propose une porte que l’on peur ouvrir ou non et qui semble donner sur une chose belle et dangereuse. A côté de cette porte mystère, de belles gravures de George Grosz et de Abel Pinay, font office de vestibule à la déclaration d’amour de Lebel pour Dada. Dans “Dada soulève tout”, on trouve une reproduction du fameux cliché signé par Man Ray du groupe fondé par Tristan Tzara (1921). Après cette longue page d’histoire, ce sont les années 1960 que Lebel a vécues et auxquelles il a participées qui sont évoquées, notamment à travers des photos des happenings qu’il a organisés : “L’enterrement de la chose”, “120 minutes dédiées au divin marquis”, ou encore, “Déchirex”.

La salle suivante montre les carnets de notes très colorés et emplis de collages de l’artiste. Elle ouvre sur la gauche sur sa troisième grande installation : un hommage à Deleuze et Guattari et à leur concept de rhizome. Elle avait été exposée en 1994, lors de l’hommage “Hors limites”. Autour de cette grande voiture revue et corrigée pour évoquer le rhizome, on trouve des œuvres de contemporains et collègues de Lebel : Erro, Carmen Calvo, Takis, Jonas Mekas (qui a réalisé le portrait de Lebel), Nam June Paik, Jean Tinguely, Alain Fleischer, Yoko Ono, Asger Jorn, Jacques Monory et bien d’autres …

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La quatrième grande installation de Lebel est une réflexion sur Eros que l’artiste présente après Parménide comme “le premier de tous le dieux, celui qui fut songé”. Le “reliquaire pour le culte de Venus” de Lebel juxtapose des photos de belles femmes dénudées patiemments encadrées dans du bois visible. Leur agencement laisse lire le mot : “Nu”.

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Enfin, au sous-sol de la maison rouge, Lebel rend hommage au poète et dramaturge Antonin Artaud. Des clichés du Momo interné à l’hôpital psychiatrique de Rodez sont accrochés aux murs et Lebel a reproduit l’installation qu’il avait proposée à Düsseldorf en 2000, lors d’un hommage à Artaud : la chambre de l’hôpital d’Artaud est reproduite. L’on peut voir la machine à électrochocs et on peut entendre l’auteur dire son texte “Les malades et les médecins”.

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Extrêmement référentielle, l’expo “Soulèvements” invite à voir des objets rares et à  (re)découvrir un révolutionnaire de génie. A voir d’urgence.

“Jean-Jacques Lebel, Soulèvements”, jusqu’au 17 janvier 2010, Maison Rouge, Fondation Antoine de Galbert, 10 bd de la Bastille, Paris 10e, m° Bastille, Quai de la râpée, 7 euros (TR 5 euros).

Vernissage samedi 24 octobre 14h-19h.

La slick est bien le off le plus in de la FIAC

Vendredi 23 octobre 2009

Pour sa 4ème édition, la Slick s’expose au 104, rue d’Aubervilliers. Une bouffée d’énergie et d’art vivant en 61 galeries,  après les œuvres de musée montrées dans les longs corridors de la FIAC. Sooo chic, la Slick a même son valet parking!

La foire off la plus in de la FIAC se mérite. Très loin du cœur de Paris, elle s’est installée cette année dans les bâtiments rutilants du 104, rue d’Aubervilliers. On est accueilli par une sculpture monumentale d’Ugo Rondinone “How does it feel”, devant lesquels des artistes esquissent la jolie façade de la halle centrale, confortablement installés dans des chaises longues.

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A l’étage, des galeries de renom et hyper branchées (Studio 55, Galerie W, Polaris, Marion Meyer, Dix 9…)  s’étalent elles aussi confortablement dans un espace blanc immaculé. Les inclusions de peluches colorées de Alberto Verajano sont présentes à la fois sur le stand de la Galerie W et du studio 55.

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On notera également les architectures réalistes et parfois en 3D de Evol à la Wilde Gallery de Berlin

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La révérence mode de NSG à Mondrian à la Cynthia Corbett Galleryslick-nsg

Les dessins de John Casey à la Galerie Polaris

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Et enfin, l’installation sonore et perlée de Frédéric Lecomte en hommage au collier de sa mère chez Pascal Vanhoecke.

Au rez-de jardin, les deux ailes d’exposition laissent moins d’espace aux autres galeries et il est agréable de s’enfoncer dans leur enchevêtrement comme dans le ventre vivant d’une ville imaginée par des artistes.

Les réflexions historiques et toutes en superposition de Julia Winter à la galerie hongroise Lena & Roselly sont notre coup de cœur de cette Slick 2009.

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Remarquables égalements sont les enfants mi-Dickens, mi- Murillo de Dran à la Galerie GHP de Toulouse

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L’installation nominée par la Slick 2009 de Eric Sep à la galerie Gist d’Amsterdam

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Ainsi que les toiles très couture de Kate Lyddon à la galerie d’Ys de Bruxelles.

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De nombreux happenings et conférences ont lieu ce week-end à la Slick.

Ce soir, ne manquez pas la présentation du mouvement perversioniste par un de ses membres éminents, Luis Nieto.

Samedi, à 14h, le plasticien lauréat du prix Marcel Duchamp Philippe Mayaux parlera des rapports entre Art et gastronomie et à 19h, le vidéaste Ultra violet projette son “Last supper” (1972)

Dimanche, à 14h, c’est au tour d’un autre grand plasticien français, Fabrice Hyber de prendre la parole pour un débat sur les rapports entre Art et argent avec le commissaire priseur David Nordmann et l’économiste Laurent Noël. 18h, le commissaire priseur Pierre Cornette de Saint Cyr parlera avec l’artiste Fred Forest d’art sur la toile.

Tout au long du week-end, les artistes Romina de Novellis, David Miguel, Lorena Diaz, et Emeka Udemba (entre autres) proposeront des performances. Pour voir l’intégralité du programme cliquez ici.

Enfin, la Slick tranforme ce week-end le Point FMR en petit Berlin, avec chaque soir des sets de Djs venus d’Outre-Rhin.

Ce soir, à partir de 20h Guido Moebius & Holger Hillel seront aux platines.

Samedi, à partir de 19h ce sont Vicky Banjo et sa performance burlesque, puis DJ Danel irkin revisitant la neue welle qui vous feront bouger.

Et dimanche, à 14h, dix personnalités berlinoise racontent leur ville, à 15h30 Felicia Atckinson propos eune performance, à 17h Caroline Villain chante du Schubert, et à 18h, place au one woman show de Miss Higgins DJY.

Slick, 104, rue d’Aubervilliers, Paris 19e, m° Stalingrad, Riquet ou Crimée, 10 euros (TR 7 euros).

Vendredi 23 –  de 11 à 20 heures
Samedi 24
–  de 11 à 22 heures
Dimanche 25
–  de 11 à 20 heures
Lundi 26
–  de 11 à 17 heures

Le Point FMR, Quai de Valmy, Paris 10e, m° Jaurès ou Stalingrad.

L’Armory au mouroir

Vendredi 6 mars 2009

En ce moment, New-York devrait vivre au rythme endiablé de l’Armory Show, la foire annuelle d’art contemporain. Mais, effet de crise, panne d’inspiration ou flemme de traîner de belles pièces, les galeries et leurs galeristes offraient un spectacle désolant aux quelques visiteurs qui se sont risqués sur les bords de la rivière Hudson hier soir.

L’Armory show est la foire d’art contemporain de New-York. Hier était le premier jour d’ouverture de l’exposition au grand public. Les galeries déploient leurs trésors sur les bords de l’Hudson River, tout à l’ouest de Manhattan, à la hauteur de la 55 e rue.

Malgré ses airs de hangar à rave, le lieu de la foire respire la petite mort d’ennui devant un bon vieux (et médiocre) Picasso. Plus d’une centaine de grandes galeries internationales sont pourtant réunies dans cet évènement, qui, depuis sa création en 1999, est censé être une vitrine mondiale de l’art moderne et contemporain.

L’étage (Pier 92) réunit les plus grands galeristes (Malborough, Daniel Templon, Leonard Hutton) et regroupe des œuvres déjà classiques. On y trouve effectivement des Basquiat et des Sam Francis de qualité. Ainsi que quelques notables Stella, Wesselmann, et Manolo Valdes. Engoncés dans leurs costumes très bien coupés, les exposants et leurs rares publics font la gueule des grands blasés dans des fauteuils confortables. C’est pourtant la partie la plus intéressante de l’exposition.

Après avoir descendu en bon ordre un escalier croulant en féraille le visiteur atteint Pier 94 et la vaste panoplie des galeries qui devraient montrer du sang et des images neuves. Le grand héros de la section est l’artiste ouest-africain(Ghana et Nigéria) El Anatsui et ses grandes tapisseries minutieuses faites des débris brillants de nos civilisations. Sauf qu’on le connaît déjà bien en France depuis l’exposition à Beaubourg « Africa Remix » et qu’il a déjà été encensé à la biennale de Venise, il y a deux ans et par le New-York Times. Il donne le ton du reste des œuvres, qu’elles soient américaines ou de nouvelle vague asiatique : néo-pops, légèrement artisanales, et volontiers en deux dimensions ou simili (très peu d’installations, et quasiment pas de vidéos). En résumé : pas de vagues, sinon juste à l’âme infertile.

L’œuvre de Mounir Fatmi, bien nommée « Keeping Faith » et pastichant sans humour les chaises électriques de Andy Warhol à grands renforts de cassettes vidéos recyclées est probablement le fin mot de ce show bien amer.

Pour faire bonne mesure et contre mauvaise volonté bon œil, notons tout de même que de nombreuses photos très classiques signés André Kertesz, Diane Arbus ou Annie Leibovitz (notamment chez Howard Greenberg). Et les clichés de vieilles dames californiennes touchantes de Katy Graman chez Greenberg van Doren.

Et puisque c’est la tradition, voici le top 3 (classique) d’en3mots

– L’hommage icônesque de Mimmo Paladino au cinéaste russe André Tarkovski chez Alan Cristea

– Un Anselm Kiefer kabbalistique de toute beauté à la Galerie Thomas

– Et un Rauschenberg tardif (1998) représentant un universitaire face à la fin du monde chez Pace Wildenstein.

Le programme des conférences du « open forum », très orienté « marché » est à l’avenant du reste de la foire.

Bref, courons voir les off, ce week-end, la Volta, Art Now Fair, Fountain New York, PooL, Bridge Art Fair, Pulse et Scope New York (infos ici) en espérant que cette crise puisse inspirer autant de belles choses que la grande dépression des années 1930 à laquelle elle est si souvent comparée.

Armory Show, jusqu’au 7 mars, midi- 20h (19h samedi), Pier 92 &94, 12 av at 55th street, New-York, 30 $ (étudiants 10 $).