Archive pour 8 novembre 2009

Une pétition pour revivifier la nuit parisienne

Dimanche 8 novembre 2009

Des professionnels de la nuit on lancé une pétitions sur la page facebook du groupe “Quand la nuit meurt en silence“. Plus de 6 000  personnes l’ont déjà signée.

Paris, ville morte ? Il est vrai qu’entre les lois anti-tabac et anti-bruit, ainsi que l’interdiction pour les établissements qui n’ont pas la licence “club” de faire danser leurs clients, les bénéfices des boîtes chutent. Et avec la fermeture de la Loco, la reconversion du Paris-Paris en bar-boîte jusqu’à deux heures du mat’ sous le nom de Scopitone, les clubbers n’ont pas beaucoup de motivation pour quitter leur nid douillet dans le froid de l’hiver. Et les insomniaques se regroupent dans des ancien bordels reconvertis en boîte où l’on passe des vieux tubes toujours agréables à écouter, mais pas particulièrement festifs (Baron, Roxane, et autres BC, New-York club etc…). Enfin, la douce mort du revival rock avec des jeunes groupes ados grattant leurs guitares dans des lieux qui leurs sont normalement interdits vers les onze heures du soir marque également un grand coup d’arrêt pour des bars comme le Motel, Les mécaniques ondulatoires ou le Truskel. Bref, reste le Rex…

ferme-la-nuitPour réagir afin que Paris ne devienne pas la ville où les gens dorment, Technopol (l’association au service de l’électro qui organise la Techno Parade et les Rendez Vous Electroniques), Plaqué Or (promotion d’artistes et organisateur de soirées) et My Electro Kitchen (disquaire et organisateur)ont écrit une lettre ouverte au ministère de la Culture et lancé une pétition demandant :
– que la législation soit clarifiée, rééquilibrée et remise en adéquation avec la réalité des pratiques culturelles et sociales;

– que les travaux d’isolation phonique des lieux de diffusion soient d’avantage soutenus par des aides publiques pour rendre leur mise en œuvre réaliste ;

– que soit prise en compte la voix du public des lieux de vie comme est prise en compte la voix des riverains;

– que soit envisagé un zonage des quartiers festifs pour que soit accordé un statut juridique à ces identités historiques;

– que soit réfléchie la mise à disposition de lieux ou de friches pour l’organisation d’événements ponctuels ou l’installation d’infrastructures pérennes;

– que soit réaffirmée en actes, et non seulement en paroles, l’importance pour la culture des lieux de diffusion de proximité;

– et que l’ensemble des acteurs institutionnels prennent conscience de l’importance de la vie nocturne (culturellement et économiquement) dans l’essence-même d’une capitale comme Paris et d’une région comme l’Ile-de-France.

De nombreux chanteurs et artistes ont déjà signé la pétition qui compte aujourd’hui 6 000 signataires.

Parallèlement, la mairie de Paris lance une opération de soutien au monde de la nuit via le site www.parisnightlife.fr. Lancement prévu le mercredi 18 novembre. La boîte à sortie s’y rend et vus tiendra au courant.

Sinon, ils restera toujours les cours de Tango et Salsa vers 16h30 pour danser…

La splendeur des Camondos au MAHJ

Dimanche 8 novembre 2009

Dans le cadre de la saison de la Turquie en France, le MAHJ consacre une exposition à la grande  famille  juive des Camondo. Immigrés d’Istanbul à Paris, les Camondo furent de grands banquiers, philanthropes et collectionneurs, actifs dans la création de l’Alliance Israélite d’Istanbul, ayant soutenu l’unification italienne, et ayant légué une grande partie de leurs collections d’art et leur superbe hôtel particulier de la rue Monceau à L’État Français. 5 générations d’une famille au moins aussi importante que les Rothschild et dont les derniers héritiers sont morts en déportation sont à découvrir jusqu’au 7 mars au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme.

Abraham Solomon et Nissim de Camondo

Abraham Solomon et Nissim de Camondo

Le grand destin des Camondo commence lorsque le patriarche, Abraham-Solomon devient le seul dirigeant de la banque Isaac Camondo et Cie, en 1832. la première partie de l’exposition se concentre sur la puissance de la famille Camondo à istambul au XIX e siècle. L’on découvre leurs livres de comptes écrits en ladino, leur action en faveur de la communauté juive, notamment l’appel aux Rothschild et aux Montefiore de Londres pour lutter contre les accusations de meurtres rituels prononcés à l’encontre des juifs de Damas et de Rhodes, ainsi que la fondation de l’Alliance israélite à Constantinople en 1863. Étant donné que des juifs étrangers ne sont pas censés s’impliquer dans la vie politique turque le sultan est obligé de limiter la marge de manœuvre des Camondo à Constantinople vers le milieu des années 1860. ceux-ci s’impliquent alors de plus en plus dans pour l’indépendance  italienne, financent certaines œuvres en Italie et sont remerciés par le roi Victor-Emmanuel II qui les anoblit. La famille émigre à Paris à la fin des années 1860 et Nissim de Camondo (le petit-fils d’Abraham-Solomon) acquiert les 61 et 63 avenue Monceau, que son fils, Moïse, transformera en l’hôtel particulier qui est encore l’un des plus beaux musées privées de Paris contenant l’une des plus belles collection de mobilier du XVIII e siècle.

Degas, Les repasseuses, 1884

Degas, Les repasseuses, 1884

Même si Abraham-Salomon est enterré à Constantinople à sa mort, en 1873, dès la fin des années 1860, c’est en France que continue l’épopée des Camondo. Et la plus large partie de l’exposition s’intéresse aux Camondo à Paris, au rôle des deux frères Abraham-Béhor et Nissim dans de grandes banques comme celle de Paris, des Pays-Bas, le Crédit immobilier et la banque Franco-tunisienne, à leur rôle dans le financement du Canal de Suez, et aux mécénats et collections d’Isaac de Camondo, compositeur et hommes à danseuses de l’opéra, qui s’éloigne du goût très “Belle époque” du reste de sa famille (Durant, Bréaud…) pour amasser une collection éblouissante. La commissaire de l’exposition, Anne Hélène Hoog a eu le génie de  rassembler au MAHJ cette collection éparpillée contre les vœux d’Isaac et qui comprend entre autres de nombreux Degas, dont “Les Repasseuses”, des Delacroix orientalistes flamboyants, la “Fille au chapeau de paille” de Renoir et l'”Atelier” de Corot, ainsi que ses pièces asiatiques désormais au Musée Guimet. La dernière partie de l’exposition montre tout l’attachement de la famille Camondo pour la France, avec  ce leg incroyable d’Isaac demeuré sans héritier au musée du Louvre la mort du neveu d’Isaac, Nissim au front en 1917, ainsi que les remerciements de cette République, qui dans sa forme vichyssoise a envoyé aux chambres à gaz les trois derniers Camondo : Béatrice, son mari, Léon Reinach, et leurs deux enfants, Bertrand et Fanny.

Isaac de Camondo (deuxième à gauche)

Isaac de Camondo (deuxième à gauche)

Que les derniers les Camondo aient péri pendant la Shoah est tristement célèbre. Moins connu et peut-être au moins aussi choquant est la manière dont l’État français a, encore après la guerre, dispersé les collections d’art d’Isaac de Camondo, contre la volonté du mécène qui avait même laissé de l’argent pour créer une aile au Louvre où ses collections devaient demeurer rassemblées.

Extrêmement fouillée, voguant entre deux continents, “La splendeur des Camondo” rassemble des trésors pour montrer le destin d’une famille. Jusqu’à sa scénographie limpide, son souci de nous faire écouter par exemple de la musique composée par Iseac et sa décoration du goût le plus raffiné, l’exposition est un modèle du genre.

La splendeur des Camondo, de Constantinople à Paris (1806-1945)“,  jusqu’au 7 mars 2010, MAHJ, Hôtel de Saint-Agan, 71, rue du Temple, Paris 3e, m° Rambuteau, Hôtel de Ville, lun-ven, 11h-18h, nocturne le mercredi j.q. 21h, 7 euros (TR: 4,50 euros).

Musée Nissim de Camondo

Musée Nissim de Camondo

Un parcours du paris des Camondo, avec des visites guidées du Musée Nissim de Camondo, du musée Guimet, du Musée d’Orsay et du Musée Carnavalet sont prévues dans le cadre de cette exposition.

De nombreux évènements autour des Camondo ont également lieu au MAHJ, dont  une conférence par les auteurs du livre qui ont inspiré l’exposition (Nora Seni et Sophie Le Tarnec), le lundi 7 décembre, à 19h30, et une découverte de l’univers musical d’Isaac dont vous pourrez entendre des compositions, le dimanche 29 novembre. Pour voir l’ensemble du programme, cliquez ici.

A l’origine, l’histoire vraie d’un ex-détenu qui s’improvise chef de chantier

Dimanche 8 novembre 2009

Xavier Giannolli, le réalisateur des “Corps impatients” (2003) et de “Quand j’étais chanteur” (2006) s’inspire d’une histoire surprenante et néanmoins vraie : un ancien détenu qui se fait passer pour un chef de chantier autoroutier. Il offre à François Cluzet l’un de ses plus beaux rôles et filme sans misérabilisme, la détresse d’une région industrielle désertée. Sortie le 11 novembre.

Philippe Miller (François Cluzet) est un escroc qui vit en volant du matériel de chantiers. Un jour, il tombe sur un chantier d’autoroute qui a du s’arrêter après que des scarabées ont été trouvés sur l’emplacement des travaux. Le projet de construction est tombé dans l’oubli de la grande firme qui la dirigeait, détruisant de nombreux postes et laissant la région dans une situation économique désastreuse. Un quiproquo laisse penser aux habitants que Miller est envoyé par la grande société de construction pour reprendre les travaux. Profitant de la situation pour toucher des pots de vins, et encouragé par la maire de la ville voisine du chantier (Emmanuelle Devos) et par la jeune Monika (la chanteuse Soko) qu’il débauche de son travail de serveuse de motel pour la prendre comme secrétaire, Miller sort peu à peu de sa solitude volontaire et  se laisse prendre au jeu. Enfin “quelqu’un”, comme il dit, il n’a dès lors plus qu’une idée en tête : mobiliser toutes les entreprises de la région et  finir le tronçon d’autoroute.

La fascination de Xavier Giannoli pour ce personnage hors du commun (qui a aujourd’hui à nouveau disparu dans la nature) est véritable, et cela se ressent. Ayant mené son enquête, notamment en demandant conseil au juge qui a instruit l’affaire Miller, Giannoli la transmue en festin visuel, où les bétonneuses dansent un ballet sous des éclairages de nuit envoûtants. Impeccable dans le rôle de l’ours qui dégèle peu à peu sous les coups de la tendresse bourgeoise d’Emmanuelle Devos et avec la sympathie que provoque chez lui la détresse de Soko et de son mari ( interprété par le nouveau jeune premier du cinéma français, Vincent Rottiers) François Cluzet donne le meilleur de lui-même pour suggérer les contradictions du personnage principal. Enfin, le passage rapide de Gérard Depardieu en escroc débonnaire est, comme d’habitude, foudroyant. Abordant sans misérabilisme la misère des régions industrielles dévastées ainsi que la petite vie grise de leurs habitants vaquant de petits boulots de serveurs en bordure de route en autres petits boulots agricoles, et se concentrant sur le mystère toujours évanescent des motivations de Philippe Miller pour rester, au lieu de fuit avec le magot qu’il a amassé grâce à la crédulité de ces chômeurs sans espoir, Xavier Giannoli signe un grand film.

“A l’origine”, Xavier Gianolli, avec François Cluzet, Emmanuel Devos, Soko, Vincent Rottiers et Gérard Depardieu, 2h10, sortie le 11 novembre 2009.

Yves Cusset, le philosophe de scène

Dimanche 8 novembre 2009

Philosophe jouant avec les mots, Yves Cusset propose au Théâtre de Ménilmontant un « solo philosophique juste pour rire », où mine de rien et en pyjama réjouissant, il entraîne son public à réfléchir sur l’être et le néant. Pour une fois que la philosophie fait rire, il serait dommage de sécher une heure de cours délicieuse.


« Le philosophe est aux questions ce que le psychopathe est aux crimes : un obsédé ».

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Dans une mise en scène de Gilles Berry, Yves Cusset, normalien, agrégé, et professeur de philosophie, apparaît dans un pyjama rouge flamboyant sur une scène jonchée de valises. Souffrant d’une maladie très répandue, le mal d’interrogation, il se propose de jouer avec les concepts et de tordre la langue, sans la tourner sept fois dans sa bouche, afin de guérir. Sur les conseils de son docteur, il devient donc philosophe sur scène, afin de régler les trois grandes questions l’empêchent de vivre (Qu’est ce que la mort ? Qu’est ce qu’exister ? L’amour est-il possible ?) et de repartir le cœur léger. Mais une interrogation menant à une autre, il est résolument difficile de mettre un point final au solo narcissique. A moins, de tout faire converger vers l’amour…

Dans le droit fil d’une tradition française un peu oubliée (Desproges, Devos…), Yves Cusset fait rire sans familiarités. Derrière les jeux de mots, les changements de voix et les grimaces de Clown, et par-delà les dérivés canins des questions sur l’existence, c’est un véritable cours de philosophie que livre le comédien. Diogène, Kant, Wittgenstein, et aussi Jacques Brel sont mobilisés pour résoudre l’énigme insupportable de l’existence. Il est bien agréable de rire de la mort, aussi bien que de l’amour et de voir des grandes figures hiératiques moquées et mimées avec tendresse. Le meilleur est pour la fin : l’on ressort du spectacle la tête pleine de questions, mais également armés d’humour pour se défendre du lourd poids de l’existence. Qui a dit que légèreté et philosophie ne pouvaient cohabiter en tempête sous un même crâne ?

Le texte de « Rien ne sert d’exister » est disponible aux éditions « Le jardin d’essai », avec un autre « solo philosophique juste pour rire » d’Yves Cusset, « Le remplaçant ».

« Rien ne sert d’exister », jusqu’au 29 novembre, Yves Cusset et la compagnie Un jour J’irai, Théâtre de Ménilmontant, 15, rue du retrait, Paris 20e, m° Gambetta, jeu-sam 19h30, dim, 16h, 12 à 18 euros. Durée du spectacle : 1h15.

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