Archive pour août 2009

Hystery Road

Lundi 31 août 2009

Inspiré par l’auteur américain Richard Brautigan, la lumière des tableaux de Edward Hopper, la mélancolie de Cassavetes, et trop de référence musicales pour qu’on puisse les citer, le premier roman de Arnaud Le Guilcher plonge profondément dans le désert d’un jeune homme qui loose son american way of life. Une belle trouvaille des éditions Stéphane Million.

Parti en aller simple sur les origines mythiques de son père soldat américain ayant libéré Paris, le jeune héros du livre quitte vite New-York pour s’enterrer dans des bleds du fin fond des Etats-Unis. Il s’offre la vie de « Dude » qui va avec : bière avec les potes, pas d’avenir et un boulot miteux dans un pressing tenus par un couple de vieux japonais. Jusqu’au jour où il rencontre la superbe Emma. Ils ne parlent pas beaucoup et passent si bien leur vie à l’horizontale qu’ils finissent par se marier. Ne croyant pas à son bonheur, le nouveau marié emmène sa femme en Greyhound par un beau mois d’octobre dans un club sur une plage désertée de Floride. Mais il reste assez d’hommes perdus au bar du club pour qu’il oublie de passer sa nuit de noce avec Emma. Celle-ci disparaît. Poussé par ses nouveaux amis, et noyé dans des litres d’alcool le héros se lance dans une quête mi-romantique, mi-pathétique pour retrouver celle qu’il aime et dont il ne sait rien.

Portrait décalé d’une jeunesse désoeuvrée, et qui ne croit plus vraiment en elle-même, avec une touche d’esprit sundance, des références malignes et une poésie qui ne se prend pas au sérieux, En moins bien est un roman américain écrit par un français. Et en plus, il est réussi, sa forme hachée menue en petits paragraphes laissant place à beaucoup de rêverie. Si bien qu’on se laisse prendre et laisse passer même certaines grosses ficelles comme les interruptions oniriques ou le coup du roman dans le roman. Un joli livre autour du sordide.

Arnaud Le Guilcher, En moins bien, Stéphane Million éditeur, 17 euros


« Ma mère était belle. Mon père avait raté le coche, j’aurais pu être beau. Pas beau et intelligent. Non, faut pas charrier, mais au moins présentable… Le jour de la giclée fatidique, il a du penser à une vieille tante moustachue, et pan, un spermatozoïde blindé de gènes de thon a conquis le saint Graal. Bilan des courses : ma gueule. Merci du cadeau » p. 61

Ravalec : l’auteur est de retour

Lundi 31 août 2009

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Pour son 37  e  livre, Vincent Ravalec remet le couvert dans les coulisses du monde de l’édition. 14 ans après son roman caustique, l’Auteur, voici le Retour de l’Auteur.

ravalec1Lorsque Vincent Ravalec remporte le très tendance prix de Flore, en 1994, pour Cantique de la racaille, il devient comme l’a nommé avec a propos l’éditrice François Verny un « petit quelqu’un » dans les milieux littéraires parisiens. Il décide alors sous forme d’essai détaché de peindre les coulisses d’une ascension qu’il sait d’autant moins fulgurante qu’elle risque à tout moment de pencher vers la dégringolade. En 1995, avec l’Auteur, il avait si bien peint les volées de champagne au Flore et les volées de bois vert légèrement régressives des collègues lors de salons et de colloques en Province, qu’il avait ravi tous les critiques littéraires. Quinze ans plus tard, et pas mal de livres et de scénarios plus tard, l’Auteur est de retour et embringué dans une histoire un peu louche de société secrète des lettres. On lui fait miroiter l’Académie Française, mais il s’agit surtout de messes noires inquiétantes et conservatrices pour sauver l’objet livre du spectre du e-book…

Se plaçant au centre avec son éternel verre de Perrier, Ravalec séduit quand il fait une satire où il se moque aussi de lui-même, et où il ne fait pas vraiment d’autobiographie puisqu’il se peint « de profil ». Son point de vue faussement posé aiguise la caricature des hystéries collectives du monde de l’édition. Rien de très nouveau sous le soleil de Saint-Germain-des-Prés depuis quinze ans… Mais s’il n’y a pas de second souffle dans la vie d’un auteur qui continue son bonhomme de chemin, ce retour publié par le Dilettante permettra à ceux qui aiment Ravalec de rire encore avec lui, et à ceux qui n’ont pas lu le premier volet d’en redécouvrir les pages.

Vincent Ravalec, Le Retour de l’Auteur, Le Dilettante, 17 euros.

« – L’important c’est que vous admettiez une certaine rigueur métrique. Vos livres sont fagotés comme l’as de pique.

Comme l’as de pique ? je bredouille, piqué au vif. Vous êtes sûr ?

Absolument.

Cet ‘absolument’, sec et sans forme, m’envoie dans les cordes sans que j’aie la présence d’esprit de trouver une repartie. J’ai juste la vision de mes livres affublés d’un fagot et piquetés de cartes à jouer, d’as de piques sournois et rigolards » p. 226


Vincent Ravalec
par auteursTV

Couverture : Joost Swarte

Dvd : Un père, une fille et 35 rhums

Lundi 31 août 2009

Claire Denis transpose les relations de sa mère à son grand-père vers un conducteur de RER et sa fille étudiante. Une intrigue familiale simple et touchante sur fond de rails parisiens disponible le 9 septembre chez Arte vidéo.

Lionel, conducteur de RER et sa fille Joséphine, étudiante, vivent en harmonie fusionnelle dans leur appartement de la banlieue parisienne. Autour de Lionel, les autres employés de la RATP commencent à prendre leur retraite, tandis que les hommes commencent à s’intéresser à Joséphine qui n’est plus une petite fille… Malgré la force et le bien être que leur procurent leur relation exclusive, il est peut-être temps de se séparer et pour Lionel de prendre la cuite des grandes occasions : celle des 35 shots de rhum.

35 Rhums Claire DenisRetrouvant Alex Descas pour le rôle de Lionel et nous faisant découvrir la toute jeune Mati Diop, Claire Denis s’est inspirée de son histoire familiale pour peindre avec pudeur la force intérieure d’une relation si forte qu’elle voudrait figer le temps. Sur la douceur d’un son sonore composé par Tindersticks, et au rythme lancinant des images de rails de RER signées Agnès Godard, la réalisatrice dépeint autour du couple fusionnel mais pudique tout un monde inconnu et pourtant si proche de nous : les voisins de Lionel et Joséphine s’entraident, les conducteurs de RER se posent de questions existentielles, dansent et boivent du rhum au café, et les étudiants d’anthropologie de Nanterre manifestent pour que leur discipline perdure. La capacité de Claire Denis à filmer sans intrusion les relations les plus fortes et à transfigurer la vie de ses personnages par l’image donne lieu à une poésie lancinante, et d’autant plus poignante qu’elle se tisse sans la brutalité de l’appropriation. Un voyage initiatique et onirique vient clore le film comme il avait commencé : en beauté. Avec en invitée divine l’hypnotisante Ingrid Caven.

Dans les bonus du Dvd, les interviews réalisées par Olivier Bombarda lors de la dernière Mostra de Venise permettent d’en savoir plus sur la modestie et le bel engagement de Claire Denis derrière sa caméra.

35 rhums, de Claire Denis, avec Alex Descas, Mati Diop, Nicole Dogué, Grégoire Coli et Ingrid Caven, 2008, 1h40, Arte éditions, 20 euros.

Dimanche 30 août 2009

All the friends are back in town, and my days are so busy, that I can’t sleep at night… or I have nightmares about my thesis. I should be happy though, as the articles I publish are read and appreciated, our firm and my brother’s name appear in today’s “Madame Figaro”, I managed to gather a team for our website,  and I get to devour again current french culture to review it day after day. Also I had some heartwarming encounters, last week : a long and deep lunch with the doctor who  saved my grandpa, 15 years ago, nighttalks with my brothers, a great “poulet aux écrevisses” cooked by a friend, a long conversation  place des Vosges, and I even played the guide yesterday for the people who welcomed me so well in Buenos Aires, long ago.

Paris will always be Paris, drinks at the Flore, Catherine Deneuve as my neighbour in a movie theater,  the urge to whisper the names we quote in restaurants, real talks and complicated explanations about the simplest facts, real optimism behind the appearance of being blasé, and days booked until they explode, from breakfast with a friend to the club with a merry crowd.

I feel like a princess, overprotected, with sometimes unexpected phonecalls. I read two books a day : in the subway, waiting for late friends at the café, and  during my sleepless nights. My readings range from  wonderful Franz Werfel to the empty contemporary French writers. And the movies I get to see are as differents as 1950’s japanese rare works and funny comedies. Musically too it is a messy melting pot : Between Arctic Monkeys, Captain Beefheart, Lady gaga at the gym, Beethoven and Tchaïkovsky  while writing,  jazz at the Trois maillets with musicians and composers, and new french songs to review, the choice is broad.

Why does perfection give me the drive to be even more perfect than my life?

Le poète

Il a beau plonger sa main dans les ténèbres
sa main ne noircit jamais. Sa main
est imperméable à la nuit. Quand il s’en ira
(car tous s’en vont un jour), j’imagine qu’il restera
un très doux sourire en ce bas-monde,
un sourire qui n’arrêtera pas de dire “oui” et encore “oui”
à tous les espoirs séculaires et démentis.

Yannis Ritsos(1909-1990), Tard bien tard dans la nuit, traduit du grec par Gérard Pierrat

Audiard, le prophète sans ciseaux

Vendredi 28 août 2009

Grand prix du jury du festival de Cannes, Un prophète de Jacques Audiard était le film français le plus attendu de cette rentrée. Film d’apprentissage en prison aux images somptueuses, un prophète écrase son public en longueurs : 2h35 !

Désormais majeur à l’âge de 19 ans, Malik El Djebena (Tahar Rahim) est incarcéré à la « centrale ». Il en a pris pour six ans. Dans la prison les Corses dirigés par Cesare (Niels Arestrup) dominent. Ils forcent le jeune homme à travailler pour eux. Ce baptême va forcer le jeune homme frêle et solitaire à utiliser son cerveau. Il apprend à lire, à parler Corse, fait le go-between avec les Arabes et  se lance dans la maîtrise des rouages d’un monde masculin où l’on s’entre-utilise sans foi ni loi pour devenir un cador…

Avec un thème fort et original, la prison, Jacques Audiard promettait pour son 5 e long métrage un film exceptionnel. Et cependant, ce prophète traîne en longueurs. Quelle que soit la beauté des plans, rien ne justifie 2h35 de film. Au niveau du message, si les rouages de la domination sont extrêmement bien analysés, Audiard qui nous avait habitué à éclairer certains aspect ambigus de la nature humaine (Un héros très discret, Sur mes lèvres et De battre mon cœur s’est arrêté) est trop occupé à jouer lui-même le rôle du prophète du cinéma pour creuser les relations entre ses personnages.

On croit qu’un lien père/fils va se nouer entre Malik et Cesare ; il n’en est rien. Malik ne sacrifie rien pour devenir « parrain », il calcule, c’est tout. Même le personnage du meilleur ami qui lui apprend à lire (Adel Bencherif) a un cancer pour rien : il sert Malik. Point. Et les femmes qui pourraient être complètement absentes, font quelques apparitions où elles servent soit à sucer, soit à enfanter. En l’absence de tout lien humain et filmés de l’extérieur, les excellents Nils Arestrup et Tahar Rahim, aussi charismatiques soient-ils, en sont réduits à toujours montrer le même visage. Quant à leur répliques, elles se vident de sens pour tomber comme des pierres.

Enfin, si les scènes de sang et de rêves sont formellement superbes et si  leurs accents mystiques justifieraient le titre.,elles sont tout aussi inutiles dans l’économie du film : dans un tel monde, il n’y a finalement pas de transcendance. Et la dernière heure du prophète qui se transforme en film de gangster au gré des sorties de 12 heures de Malik est réellement pénible. Dommage que personne n’ait dit au réalisateur de prendre les ciseaux et la colle pour sagement couper ses jolies images et donner un rythme et un sens à un film qui aurait pu être un coup de poing.

Un prophète, de Jacques Audiard, avec Tahar Rahim, Niels Arestrup, Adel Bencherif, Gilles Cohen, France, 2009, 2h35


Un Prophète, de Jacques Audiard, bande-annonce
par telerama

Théâtre : Maudites vacances

Mardi 25 août 2009

u Théâtre du Nord-Ouest, la compagnie Théâtre vivant époussette le buste de Carlo Goldoni pour proposer une Trilogie de la villégiature transposée du XVIII e siècle au krach boursier des années trente. Quand la bourgeoisie désargentée de Livourne part en vacances à Montenero, les intrigues amoureuses se nouent et se dénouent avec un peu plus de classe et parfois plus de suspense que chez les gamines huppées de Gossip girls.

trilogiePetite salle pour la ville et grande salle pour la campagne, les ressources d’intimité du théâtre du Nord-Ouest conviennent parfaitement à l’expérience que propose la metteuse en scène Carlotta Clerici : nous rendre proche les dilemmes de personnages sortis de la tête d’un dramaturge vénitien du XVIII e siècle. Pour ce faire, la jeune femme a retraduit dans une langue contemporaine le texte de Carlo Goldoni et l’a écrémé des derniers restes de la commedia dell’arte. Deux ou trois domestiques donc, et pas plus, pour ces gens un peu snobs de Livourne qui s’intéressent surtout aux apparences, même quand à leur porte, les fournisseurs doivent faire beaucoup de bruit pour essayer de se faire payer. Le tout est transféré dans les années 1930, dans un climat de crise économique tout à fait d’actualité. Et finalement, le protocole reste le protocole et n’a pas tellement changé : on se rend des visites entre bourgeois, on divertit la compagnie avec des jeux de cartes, on se fait faire des jolies robes à la mode même si l’on n’a pas de quoi payer de boulanger, on arrange des mariages à la hâte, et si une veuve a un joli porte-monnaie, elle trouvera toujours un homme bien fait de sa personne pour l’accompagner.

Les amours contrariées de la jolie Giancinta (excellente Rebecca Aïchouba) sont prenantes : un vieil ami de son père convainc ce dernier de la donner en mariage à Leonardo (Simon Gleizes), en apparence, fils de très bonne famille. Pour que les choses soient bien claires avant le départ estival en vacances, un contrat de mariage est signé. Mais arrivée à Montenero, où elle réside avec son père, sa tante, et où elle a emmené le joli Gugliemo (Pascal Guignard), Giancinta se rend compte qu’elle n’aime pas Leonardo, son fiancé, mais Gugliemo. Les vacances se transforment en enfer pour la jeune fille qui refuse de revenir sur la promesse donnée et de compromettre son honneur. En parallèle à cette intrigue principale, d’autres amours se développent dans l’ennui cancanier d’une villégiature où l’on ne fait que manger et parler. Pour imiter sa maîtresse Giacinta, Brigida (Nathalie Lucas) aimerait, entre deux services d’apéritif, pouvoir épouser le valet de Leonardo, Paolo (Jean Tom). Vittoria, la sœur de Léonardo (Isabel de Francesco) s’éprend elle aussi de Gugliemo, la tante de Giacinta souffre, parce que son divertissant amant (pétillant Benoît Dugas) exige une dotation pour l’épouser, la jolie femme de marchand Costanza (Florence Tosi) a amené sa nièce pauvre, parce qu’elle est jeune et divertissante, et celle-ci tombe dans les bras du fils du médecin. Bref, des vacances mouvementées pour les personnages et croustillantes pour le public qui suit l’évolution rapide des liaisons avec autant de plaisir qu’un bon feuilleton.

La qualité des comédiens, leur belle stature tout à fait italienne, le sans chichi de la mise en scène, et la rapidité des dialogues font honneur au tableau enlevé de la nature humaine imaginé par Goldoni. Cette Trilogie de la villégiature a la légèreté d’une belle fin d’été et l’on rit beaucoup de situations et de sentiments qui nous sont étonnamment proches. Pari gagné donc, pour la talentueuse metteuse en scène Carlotta Clerici, qui nous livre un théâtre bien vivant et parfaitement orchestré.

“La trilogie de la villégiature” de Carlo Goldoni, mise en scène : Carlotta Clerici,, jusqu’au 2 octobre, les jeudis et vendredis 27, 28 août,10, 17, 24 septembre et 1ier octobre, pièce 1 : 17h, pièce 2 : 19h, pièce 3 : 20h45, ainsi que les vendredis 4, 11, 18 septembre et 2 octobre, pièce 1 : 19h, pièce 2 : 20h45, pièce 3 : 22h30, Théâtre du Nord-Ouest, 13 rue du Faubourg Montmartre, Paris 9e, m° Grands Boulevards, 20 euros.

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Le plus : pour les entractes, le bar du théâtre du Nord-Ouest est vraiment sympathique!


Dvd : Des jumeaux en état de marche

Lundi 24 août 2009

Le premier long métrage de Pascal-Alex Vincent est désormais disponible en Dvd. Un road movie expérimental et bien français sur les thèmes du double, de la différence et de la beauté physique.

A l’âge de 18 ans les jumeaux Quentin et Antoine décident de quitter la boulangerie de leur père pour se rendre en Espagne, à l’enterrement d’une maman qu’ils n’ont pas connue. Sans argent, ils font une grande partie du trajet à pied et en stop. Sur la route, ils testent la profondeur de leur lien et multiplient les rencontres.

Débutant son film sur agile une scène d’animation qui le rend irréel, Pascal-Alex Vincent propose avant tout de belles images : belles gueules de ses acteurs, Alexandre et Victor Carril, belles batailles chamailleuses entre frères où les muscles saillent, et beaux champs de blés. Le reste du message est assez simpliste (finalement deux jumeaux ne sont pas toujours identiques), ou passé sous silence (le spectateurs ne sait pas pourquoi les garçons n’ont pas connu leur mère), et les dialogues minimaux.  On pourra s’irriter de scène de sexe, de course dans les champs et de batailles au bord du fleuve ou de la mer trop esthétisantes, sur la musique parfois mal “collée” du groupe électro Tarwater. Ou alors l’on pourra regarder les 1h20 de beaux clichés avec indulgence, un peu comme un brouillon chiadé de films plus profonds à venir…

Donne moi la main, de Pascal-Alex Vincent,  avec Alexandre et Victor Carril, France, Bodega Films, 2008, 1h20.

Dans les bonus, ne pas rater les deux courts métrages du réalisateur : Bébé requin (2005) et Tchernobyl (2009).

Dvd: La Boum, reloaded

Jeudi 20 août 2009

Trente ans après… Sophie Marceau est maman d’une charmante adolescente de 15 ans, Lola, dite « Lol ». Sauf que les ados de 2009 semblent bien moins romantiques que ceux de 1980. Sexe (avec capote), drogue, et mauvais rock’n’roll sont leur quotidien qui effraie des parents pas si libérés que cela…

lolLol a 15 ans et fait partie des filles « cool » de son lycée du XVI e arrondissement. Les notes elle s’en fiche complètement. Et que sa maman re-couche secrètement avec son père alors qu’ils sont officiellement divorcés la fait plutôt sourire. En revanche que son meilleur ami, Maël, s’envoie en l’air avec la bimbo dans les toilettes du bahut la fait terriblement souffrir….

Comédie extrêmement légère, « LOL » met en scène des ados gâtés d’aujourd’hui. Si ceux-ci sont équipés de téléphones portables qui sonnent sans discontinuer, et passent leurs soirées sur MSN, ils prennent encore le métro, tiennent des carnets secrets, piquent encore les fringues de leurs parents, et font le mur, puisque malgré leurs faux airs libérés, ces derniers n’arrivent toujours pas à accepter que leurs enfants aient leur propre vie (y compris sexuelle).
Vous l’aurez compris, du point de vue des images comme du point de vue de la musique, « LOL (Laughing Out Loud) » tient plus du téléfilm grand public que du digne héritier du film culte du tandem Pinoteau-Cosma. Caricaturaux, les ados sillonnent les couloirs du Lycée Jean-Baptiste Say, sont immanquablement en retard, sont incapables de suivre un cours, sauf si le prof est mignon et semblent plus tenir de la horde en rut, que de la bande de copains aux personnalités fragiles et contradictoires. Quand à la génération des parents, on dirait qu’elle a refusé de grandir et ne joue pas son rôle. En jolie maman divorcée, Sophie Marceau pique quelques colères, mais sans conviction ; éternelle adolescente, elle fume des pétards en douce, jure comme un charretier et se cache presque plus que sa fille pour voir ses amants, leurs scènes de lit étant tournées en parallèle. Mais la tendresse est là, supposément rédemptrice…
Et le point de vue féminin de la réalisatrice, Liza Azuelos, sur ce quotidien assez mièvre apporte une petite touche de fraîcheur au blockbuster. Le joli plus : Françoise Fabian en grand-mère qu’on drogue pour faire la fête….

Les Dvds que Pathé met en vente de « LOL » sont de jolis objets, soit sous forme « fourreau simple », soit « blu-ray », soit encore en mode box collector avec le journal intime de Lola, la BO et un sac en toile inclus dans les « goodies ». L’interface simili informatique aux tons fushias est assez jolie, et les commentaires des tous jeunes comédiens gagnent à être connus.

“LOL”, de Liza Azuelos, avec Sophie Marceau, Christa Théret, Jérémy Kapone, Alexandre Astier et Françoise Fabian, 2009, 1h45, Pathé 19,99 à 29,99 euros.

Dvd : Eden, sans frère et sans papiers

Jeudi 20 août 2009

Quand Costa-Gavras (« Z », « Amen », « Le couperet ») engage le magnétique Riccardo Scamarcio (« Romanzo Criminale ») pour jouer le rôle d’un immigrant illégal en France, Emir Kustirica rencontre les frères Dardenne sur un scénario signé par l’immense Jean-Claude Grumberg. Le DVD de cette fable personnelle et touchante sort le 9 septembre.

Elias quitte son pays pour immigrer sur un rafiot d’un pays mythique (la langue a été inventée par Grumberg et Costa-Gavras) vers un autre pays mythique : la France. Mais la police veille, et Elias est obligé de laisser son seul bien, un livre de langue française, pour sauter à l’eau et rejoindre le rivage. Il débarque alors dans un club de vacances nudiste, Eden, où il doit se cacher, et ne pas perdre trop de temps avant de réaliser son rêve : rejoindre un magicien au Lido, à Paris.

« Eden à l’Ouest » est un véritable conte, avec son héros au nom messianique, ses méchants (la police et les spécialistes de l’exploitation des sans-papiers), ses adjuvants (une maîtresse allemande généreuse, des tsiganes qui le prennent pour l’un des leurs, des camionneurs turco-allemands, Michel Robin en gardien bienveillant du Lido, Annie Duperey en femme des beaux quartiers qui offre à Elias la veste de son défunt mari…), et son but à atteindre : les Champs-Elysées. Avec une beauté que Costa-Gavras a voulu rendre enfantine, Riccardo Scamarcio exprime tout un panel de sentiments juste avec ses grands yeux bleus. Touchant sans provoquer des litres de mélodrame, courageux comme un homme doit l’être, et aussi sagement méfiant, le personnage d’Elias est aussi complexe que vraisemblable. Lui-même immigré de Grèce, Costa-Gavras rend hommage avec son dernier film à tous ceux qui ont un jour rêvé de vivre en France. Malgré les difficultés, et le glauque de certaines situations, le pays d’accueil reste un lieu magique, un ouest mythique à conquérir en traçant une longue route. Marche à l’étoile et road-movie initiatique, le film est merveilleux, dans tous les sens du terme.

“Eden à l’Ouest”, de Costa-Gavras, avec Riccardo Scamarcio, Eric Caravaca, et Ulrich Tukur, 2009, 1h47, Pathé, 19,90 euros. Bonus : Making of, commentaire audio, scènes coupées.

Petits bobos de vacances

Jeudi 20 août 2009

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L’auteur de « Rade Terminus » et de « Beau Rôle » (P.O.L.) rapatrie avec un sourire grimaçant ses personnages de Français bobos vers le continent. Après le jeune cabotin parisien Antoine Mac Pola, c’est au tour du demi-américain d’âge mur et normand pas tout à fait local, John Bennett d’être le faux mec détendu de l’histoire. Avec « Le Roman de l’été », Nicolas Fargues perfectionne son art de la satire « cool », et nous fait sourire d’un très beau jaune.

Fils d’un artiste local d’origine américaine, divorcé et père un peu léger, John Bennett décide de s’installer dans sa résidence secondaire de Normandie, à Vatenville, pour se mettre à écrire. Mais entre les voisins du cru qui souhaitent le convaincre de percer un mur de son jardin pour avoir vue sur la mer, sa fille Mary qui débarque avec son faux rocker de petit copain et une amie italienne diablement sensuelle, et les évènements politiques de Vatenville qui accueille, le temps d’une signature par un reporter un peu bidon, le Président le plus bling bling d’Histoire de France, il est bien difficile de commencer sa propre recherche du temps tué.

Au fil des romans, Nicolas Fargues progresse dans la satire du bobo sous toutes ses formes. Les caricatures se suivent sans se ressembler et sans épargner personne : le beauf local et sa femme, le faux rocker fils à papa, la jeune fille curieuse enfermée dans le rôle de belle plante sympathique (ça c’est un classique chez Fargues), le type des médias qui fait écrire ses livres par d’autres et ampoule les phrases pour marquer le vide de sa pensée, et enfin, le président Sarkozy lui-même, que Fargues n’épargne pas. La grande force de Fargues est que derrière la vacherie facile de la satire, ces archétypes de Français sont aussi émouvants. Les anti-héros sont sympathiques et l’on peut s’identifier à leurs doutes, à leurs affirmations-boucliers, et à leur manière médiocre mais si proche de la notre de vivre. Derrière la frange de cheveux blonds et les lunettes de soleil, Nicolas Fargues sait faire preuve d’une certaine empathie, qui rend ses références incessantes à notre pop-culture, et son sacre de l’instant social, un peu plus durable qu’il n’y paraît. De là à dire que l’écrivain est entrain de produire, volume après volume, la comédie humaine de ce début du XX e siècle, il n’y a qu’un pari à assumer… En tous les cas pris isolément, « le Roman de l’été » coule, fait grimacer délicieusement, et peut aussi se lire aussi légèrement que nécessaire.

Nicolas Fargues, Le roman de l’été, P.O.L., 19,50 euros.

Pour lire les premières pages du roman, cliquez ici.


“Hubert: son mètre quatre-vingt douze, son beau prénom idéalement suranné, sa voix grave, ses longues mains, ses cheveux, sa permanente barbe d’une semaine, son jean slim et ses converses pâles sales. Hubert le beau ténébreux aux poses hautaines éthérées, se rêvant Kurt Cobain, Pete Doherty ou Julien Casablancas […] Hubert qui pour le bus sussurait présent d’un air pénétré de mâle meurtri : “They all let me down/ In this town/ And now/ I know/ i’m alone/ On my own/ With that bone/ I’m alone/ On my own/ my own hound/ grown/ From the underground” p. 44