Les montagnes escarpées du nouveau monde
New-York calmement et si longtemps est vraiment une expérience très étrange. Je crois que je n’ai jamais été aussi posée et aussi sage depuis le lycée, et pourtant… Au long fleuve tranquille des journées passées devant mon ordinateur et des soirées à lire des vieux rabats-joie sur la sécularisation et le christianisme, des pics vifs de vie viennent me griser. Ces derniers jours j’ai eu le temps d’être follement gravement amoureuse, et d’un instant à l’autre de sauter dans un taxi pour retrouver un “date” assez platonique mais tendre, tout en parlant avec Paris dans la voiture où un homme que j’ai vraiment aimé m’a demandé en mariage “out of the blue” trois ans après. J’ai dîné avec un couple improbable et touchant : lui japonais chrétien, elle juive française avec l’accent du sud dans ma langue, elle ancienne enfant cachée et psy, et lui travaillant dans les assurances. Ils se parlent en anglais, aiment cecilia bartoli, se sont rencontrés sur une île où l’on médite sans électricité et s’aiment depuis des années. Le moment le plus mignon a été quand elle a voulu m’apprendre à remercier en japonais pour le dîner divin et m’a dit de dire “toda raba”… J’ai aussi réussi à être malade, à me réveiller dans des sursauts d’angoisse à 4 heures du matin, à me mépriser de travailler lentement, ce qui n’est pas mon habitude, à me laisser impliquer dans les histoires sentimentales compliquées de trois amis (objectivement, il faut soit que j’arrête de donner des conseils de coeur vu ma situation déplorable, soit que je fasse carrière comme journaliste à cosmo), je me suis mise à cuisiner, j’ai bu du champagne tous les soirs, à la maison et dans des bars branchés du lower east-side et du west-village. J’ai fait la queue pour l’ouverture du très vulgaire “top-shop” de Soho (yaelestunemidinette.com). J’ai essayé des perruques. je suis allée voir Rigoletto qui est vraiment un opéra parfait, aussi loin soit-il de ma sensibilité et j’ai adoré DANSER. J’en sors et c’est fou comme c’est bon, sans aucun “paradis artificiel” et même sans alcool (mais peut-être étais-je shootée aux antibiotiques) de bouger, de sentir son corps et d’y prendre du plaisir. J’aime cela depuis l’enfance et ne le fais pas assez, le tango étant vraiment une discipline. Bref, si je n’arrive pas à briser la cage de verre, au moins avec le recul, je pourrai dire que 1) j’ai vraiment essayé d’être heureuse à la Pascal en restant en repos dans une chambre 2)Que j’ai vu pas mal de morceaux étrange d’un new-york éviscéré par la crise 3) Que j’ai peut-être failli m’oublier dans tout ça.
5 avril 2009 à 9:41
Hey sister . . .
Excellent texte – sur le plan du style, les dexu averbes du début sont excitants : “calmement et si longtemps” . Superbe intro. Je te trouve dans la maitrise,
un peu “luxe la main froide”, mais j’aime parfois la belle technique, au-dessus de l’oraison Pascalienne.
Tu me manques
7 avril 2009 à 21:48
Même commentaire, tout aussi lointainement ‘fraternel’. Beaucoup de vivacité. dans ce texte. Puis ces deux adverbes ‘calmement et si longtemps’! Comment dire? C’est à ces ‘si peu de chose’ qu’on reconnait un talent. Vous êtes bien trop vivante pour songer ainsi à la mort. Et vous avez beaucoup à dire. Evitez la maîtrise, et l’aisance, malgré votre facilité. Faites-vous violence. Amitiés. Je vous lis, et vous lirai, avec une grande attention.
7 avril 2009 à 22:59
J’aime beaucoup ton côté “Loup des Steppes”… joli parcours.
Bises.
L.
8 avril 2009 à 5:48
Merci les brothers, lointains ou pas. Paris me manque quand même hein, la folie française est plus douce